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mercredi 14 février 2024

LES "EMBELLISSEMENTS" DE SAINT-JEAN-DE-LUZ EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN FÉVRIER 1923 (deuxième et dernière partie)

LES "EMBELLISSEMENTS" DE SAINT-JEAN-DE-LUZ EN FÉVRIER 1923.


En 1923, se pose la question du seuil de garantie à Saint-Jean-de-Luz.



pays basque port fort digue labourd rempart
SEUIL DE GARANTIE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Voici ce que rapporta à ce sujet La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, le 21 

février 1923, sous la plume d'Henri Godbarge



"Les "Embellissements" de St-Jean de-Luz.

A propos du seuil de garantie.



Evidemment, la municipalité de Saint-Jean-de-Luz a été bien inspirée, le jour où elle a pris la décision d'élargir le seuil de garantie aux endroits où la promenade était par trop étroite. Grâce lui soit rendue ! Il faut, en effet, profiter des avantages de la nature, les souligner même et au besoin, en tirer profit. Cette Baie est idéalement dessinée ; sa ligne harmonieusement curviligne est une élégance en elle-même. Il n'est décorateur de génie qui ne pourrait mieux la styliser. Et ce "certi" de premier plan arrête et limite le décor le plus pittoresque du monde ; d’une part, des collines verdoyantes, métairies blanches et fort de Socoa, que dominent les aériennes montagnes de la Rhune et les Trois-Couronnes ;  d'autre part, de gracieuses villas et les rochers schisteux de Sainte-Barbe. Il n'est âme sensible aux attraits de la nature qui ne soit émerveillée d'un pareil spectacle. Il n'est promeneur ou hiverneur qui ne goûte un charme infini à jouir de féériques soleils couchants lorsque, à une heure tardive, le ciel empourpré se reflète, dans cette eau cuivrée aux stries de feu. 


pays basque port fort digue labourd rempart
PROMENADE DE SAINTE-BARBE SAINT-JEAN-DE-LUZ
PAYS BASQUE D'ANTAN


Aussi, élargir cette délicieuse promenade pour permettre le libre accès à une foule enthousiaste, c'est ajouter aux bienfaits de la nature, déjà prodigue ceux qui découlent de l'ingéniosité humaine, c’est enrichir le patrimoine naturel, c'est doter, à tout jamais quelquefois, une ville, d’un suprême attrait et d’un impérissable souvenir. Et il en sera ainsi le jour où une vaste esplanade reliera les rochers de Ste-Barbe à ceux du Socoa. Puisse le trait d'union, entre cette pointe et l'autre, être aussi élégant que possible, et posséder les lignes gracieuses d'oeuvres créées par les constructeurs gothiques ou japonais ?... Puisse-t-il, surtout, être affranchi des désolantes conceptions mercantiles de métallurgistes béotiens ! surtout évitons le cauchemar en vérité abhorré du fameux transbordeur... Plutôt rien que cela. Mieux vaudrait le néant actuel qu'un tout défiguré et grimaçant. 



Donc, fort bien le principe d’un élargissement du seuil de garantie. Mais voyons l'exécution. En effet. que d'ingénieuses idées ont été déformées, mutilées, ridiculisées par l'application !... En sera-t-il ainsi ! Et, ma foi, je n’ai pas lu, sans appréhension, le compte rendu paru dans la "Gazette". Et quoi, il est donc vraiment nécessaire de relier les points d'appui par des arcs de vingt mètres ! Vingt mètres ! Vous avez bien lu, lecteurs, il s’agit d'arcs gigantesques aussi larges qu'un gratte-ciel est haut. Vingt mètres !... La hauteur d'une maison à loyer de Paris. Et voyez-vous cette plateforme chargée se prolongeant ainsi, à l'infini, reposant sur des arches de pont uniformément et indéfiniment répétés... Et pourquoi cette disparate et scientifique conception, dans ce joli coin de pays basque aux modestes pentes maisons blanchis, au-dessus d'un prosaïque mur de moellons, bien moins coûteux et bien plus pittoresque — encore que sans prétention — que ces élucubrations algébriques dont le moins qu'm puisse dire est qu'elles dérivent trop directement de la science et pas assez de l’art ? Est-ce cela les travaux d'"embellissements" projetés, exécutés, avec les deniers des touristes et des hiverneurs ? En vérité, singuliers "travaux d’art" ces travaux qui consistent à enlaidir ce site délicieux ! A mon sens, feraient beaucoup mieux notre affaire, de simples adjonctions de remblais parementés de moellons, de modestes petits moellons, matériaux six fois moins coûteux que le mirifique ciment armé. Et, ma foi ! si tant est qu'il est vrai que des arcades soient à l'ordre du jour sur des points d’appui affaiblis, qu’on les réduise, de grâce, de façon qu’elles soient à une échelle humaine, l’échelle du reste des choses environnantes ! Et je suis assuré d'avance que les modestes crayons d'empiristes permettraient la solution à la fois élégante et peu coûteuse, adéquate aux constructions voisines. 



Du reste, ce seuil est un soubassement. Or un soubassement doit donner l'impression de robustesse et de stabilité que procure justement une maçonnerie de moellonnage apparent. Des arcs donnent, il est vrai, parfois cette même impression ; mais, alors, ils doivent être trapus et courts, aux dimensions qu’exige la matière dont ils sont composés. Et s’éloigner de ce principe, c'est s'éloigner de la vérité non seulement artistique, mais même scientifique. Un grand arc. un arc de vingt mètres a sa raison d’être quand les points d'appui font défaut, quand il s’agit de franchir des espaces immenses tels que vallées, cours d'eau, etc... Un grand arc, c'est l'élément architectonique d'un pont, d’un viaduc. Ce n’est pas celui d’un soubassement, d’un seuil de garantie.



Vérité là où il y a cours d’eau, devient erreur là où est la terre ferme. De plus le gigantesque bien compris, peut s’admettre dans une immensité, de nature grandiose : "vastes et mornes plaines" ou puissants massifs montagneux. Le recul, d'ailleurs, lui donne sa valeur. Il n’en est rien, hélas ! quand il s’offre aux regards rapprochés, quand il s’enchâsse dans un ensemble d’habitations humaines à échelle réduite. De la disproportion naît l’inharmonie. Et la beauté est faite d’harmonie. 



Ainsi donc, tout bien examiné, édiles, édiles luziens, au nom de la raison aussi bien que de l’esthétique, pas d'"embellissement" qui ne soit sujet de laideur, pas de ciment armé coûteux où il peut y avoir de simples rocailles de pays, et enfin, si, après tout, il faut du ciment armé, surtout pas de zèle, pas de tours de force algébriques. Donc pas d’arcs de vingt mètres. Pas de "kolossal". Laissons ces errements à nos voisins d’outre-Rhin. Notre science, à nous, est faite de mesure, notre art, d’harmonie. Ediles, ayez le souci de l’harmonie."








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