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mardi 20 février 2024

DOLORÈS IBARRURI "LA PASIONARIA" EN 1948 (deuxième partie)

DOLORES IBARRURI "LA PASIONARIA" EN 1948.


Dolores Ibarruri Gomez, connue sous le nom de La Pasionaria, était une militante, une femme politique et une figure emblématique de la Guerre d'Espagne.



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DOLORES IBARRURI LA PASIONARIA


Voici ce que rapporta Dolorès Ibarruri dans le mensuel Démocratie Nouvelle, le 1er avril 1948 :



"L'Espagne, tête de pont Yankee en Europe.



... Colonisation yankee.



L'aide de Hitler à Franco pour écraser la démocratie espagnole n’était pas déterminée, ni par la sympathie pour le "caudillo" ni par la disposition servile de ce général félon envers l’hitlérisme. Elle l'était, d’une part, par l’existence des richesses minières espagnoles ; d’autre part, par la situation stratégique de l’Espagne dont la possession, disait Bismarck en 1870, serait un aiguillon dans la nuque de la France.



Ces réserves minières de l’Espagne, — le fer de Biscaye, le cuivre de Huelva, le mercure d’Almadén, le charbon des Asturies et d’Andalousie, le zinc et l’étain de Santander, le nickel et le cobalt d’Aragon, |e plomb de Linarès et de Peñarroya, le wolfram de Galice — sont aujourd’hui en grande partie sous le contrôle américain, et bientôt elles le seront en totalité.



C’est en pensant à ces richesses que Gœring écrivait en 1938 dans la National Zeitung :


A l'ouest de l'Europe, sur les frontières des Pyrénées, a surgi un Etat national allié à l'axe Rome-Berlin. Cet Etat est le plus riche d'Europe en matières premières nécessaires à une guerre moderne.



Du point de vue stratégique que représente la situation de l’Espagne ? Une géographie militaire publiée en 1936 par un militaire réactionnaire souligne les points suivants :


Dans les échanges internationaux, l'Espagne apparaît située entre la ligne de trafic qui suit le bassin d'Aquitaine et la région méditerranéenne, et la route commerciale jalonnée par Suez, Gibraltar, Panama ou New-York... Par ailleurs, elle est encadrée par les routes commerciales dont l'une joint la France à l'Algérie et l'autre relie l'Europe centrale et occidentale à l'Amérique du Sud et au Cap.


L’Espagne est aussi la route continentale historique des relations entre l'Europe et l'Afrique, qui est déjà jalonnée, qui le sera plus encore dans l'avenir, par les lignes aériennes.

(Geographica militar española, 1936)



Si l’on ajoute que Vigo, ville de Galice, au nord-ouest de l'Espagne, est le point de l’Europe le plus proche des Etats-Unis, on comprendra l’intérêt que les impérialistes américains manifestent actuellement pour l’Espagne.



Cet intérêt s'accroît dans la mesure où la puissance de l'impérialisme anglais diminue et où l’hégémonie passe aux potentats du dollar.



Les Américains ont commencé leurs manoeuvres bien avant la fin de la guerre antihitlérienne. Ils devancèrent les Anglais qui n’étaient pas en mesure de consolider leurs positions, dès que Hitler, après ses défaites sur le front soviétique, ne put plus exercer de pression sur son complice franquiste.



En 1943, après Stalingrad, les Américains, convaincus de l'imminence de la catastrophe pour Hitler, malgré leur sabotage de l’ouverture du second front, rêvent déjà de domination mondiale, une fois disparu le rival allemand. Ils envisagent de faire de la Méditerranée une mer américaine, par laquelle ils auraient un accès facile vers le pétrole de l’Orient et vers le continent africain. Depuis lors, les représentants de la "démocratie" américaine cessent leurs humiliantes attentes dans les antichambres des ministères de Madrid, et commencent à mettre leurs pieds sur les tables des ministres de Franco.



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FRANCISCO GOMEZ-JORDANA SOUSA
COMTE DE JORDANA



En novembre 1943, au nom des gouvernements des Etats-Unis et de Grande-Bretagne, l’ambassadeur Hayes présentait une demande au comte Jordana, ministre des Affaires étrangères du gouvernement franquiste, par laquelle il réclamait :


a) l’embargo sur les exportations de wolfram en Allemagne ;


b) la livraison des bateaux de guerre et des navires marchands italiens retenus dans les ports espagnols ;


c) la fermeture du consulat allemand à Tanger ;


d) l’expulsion des agents fascistes de la zone de Tanger et des diverses zones du territoire national ;


e) l’autorisation d’établir un circuit radiotélégraphique direct entre l'Espagne et les Etats-Unis.



Après plusieurs semaines de discussion et une suspension temporaire par les Etats-Unis des envois de pétrole à l’Espagne, le gouvernement franquiste accepta l’essentiel de la demande américaine. Les choses furent plus faciles par la suite : la puissance hitlérienne s’écroulait, la puissance de l’impérialisme nord-américain augmentait et Franco offrait de servir les Anglo-Américains comme il avait servi Hitler et Mussolini.



C’est ainsi que, cinquante ans après l’agression des Etats-Unis contre l’Espagne, dont le prétexte fut l'explosion d’un bateau américain à la Havane, les Etats-Unis, qui ont dépouillé l’Espagne de Porto-Rico et de Cuba dans les Antilles, et des îles Philippines dans le Pacifique, mettent aujourd’hui le pied sur le territoire de la péninsule. Avec la complicité du franquisme, ils prennent les premières mesures pour faire de l'Espagne une simple colonie yankee avec tout ce que ce mot représente d'odieux pour les Espagnols, qui n’ont perdu ni la mémoire ni le sens de la dignité nationale.



Les grands financiers yankees sont entrés en Espagne avec le même sans-gêne que les nouveaux riches entrent dans les maisons mises aux enchères des nobles ruinés, s'offrent comme acheteurs à tout prix après qu’ils se sont assuré la complicité d'un laquais malhonnête. Le général Franco et sa coterie, après avoir plongé l’Espagne dans une catastrophe économique sans précédent, après avoir abaissé jusqu'à la limite de l’indignité la personnalité internationale de l’Espagne, l’offrent aujourd’hui aux enchères publiques aux Nord-Américains. Ceux-ci acceptent volontiers cette offre ; en échange, ils soutiennent en Espagne un régime réactionnaire à leur dévotion qui sauvegarde les intérêts des banquiers et des aristocrates, des militaires et des princes de l'Eglise, responsables de la ruine de l’Espagne et complices de la politique fasciste et terroriste du franquisme.



Franco vend l'Espagne.



Je ne veux pas faire un tableau de la situation économique de l’Espagne sous le régime franquiste ni des répercussions de cette situation catastrophique sur le niveau de vie des masses travailleuses espagnoles qui n’ont jamais connu tant de misère et tant de privations, même dans les périodes les plus noires de l’histoire de l’Espagne.



Cependant, il est intéressant de recueillir quelques opinions de personnalités financières connues qui ne peuvent être accusées de sympathie envers le communisme.



Le ministre de l’Industrie et du Commerce du gouvernement franquiste en personne déclarait devant les autorités de Bilbao, à la fin de l’année dernière, que "du point de vue technique, la situation de l’Espagne est sans issue".



Mais celui qui a exposé le plus crûment la situation catastrophique de l’économie espagnole, est le marquis de Urquijo, président du Conseil d’administration de la banque du même nom et un des plus grands financiers et industriels espagnols, en liaison depuis toujours avec le Vatican et présentement avec la finance nord-américaine. Il déclara, le mois dernier, au Conseil d’administration de ladite banque, que "la situation financière et économique de l’Espagne est intenable" et que "sans l’aide extérieure, c’est-à-dire sans l’aide des Etats-Unis qui seuls peuvent accorder cette aide, l’écroulement de l’économie espagnole sera irrémédiable, et à bref délai".



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MANUEL DE LA SIERRA
MARQUIS D'URQUIJO



Un tel état de choses offre une occasion au plus haut point favorable à l’impérialisme américain pour se présenter en sauveur. Et les castes dominantes espagnoles, suivant leur vieille tradition antiespagnole et antinationale, cherchent le remède à la catastrophe, non pas dans le développement des grandes richesses du pays, mais dans la protection du capital étranger, qui coûte si cher aux peuples, aux dépens de l’indépendance et de la souveraineté nationales.



L’impérialisme américain dispose de bases aériennes à Madrid et à Barcelone, servies par un personnel américain, et personne ne met en doute qu’avec la servilité de Franco, bientôt l’état-major américain pourra disposer, face au Gibraltar anglais, de la position stratégique dominante de Ceuta, à l’entrée de la Méditerranée, et en général de toutes les positions espagnoles au Maroc et aux Canaries.



Le franquisme prépare une grande opération financière qui mettra l’économie et la sécurité espagnoles à la merci du capitalisme américain.



Les chemins de fer espagnols, aux mains des compagnies particulières, étaient déficitaires en raison de leur mauvaise organisation. Le gouvernement franquiste les prit à sa charge, payant à prix d'or un matériel très vieux, facilitant ainsi une affaire fantastique pour les actionnaires des compagnies ferroviaires. Mais l’incapacité de la direction étatique franquiste a créé une situation de chaos dans les transports. Maintenant, on projette de réaliser une nouvelle affaire en rendant le monopole des chemins de fer à des compagnies particulières, en permettant la participation de capitalistes étrangers, spécialement nordaméricains, dont la puissance financière attire fortement les capitalistes espagnols.



On parle dans les milieux financiers de céder ce monopole au capitalisme nord-américain.



En liaison avec le Vatican, le capital américain intervient activement dans toutes les grandes opérations financières des capitalistes espagnols, notamment par l’intermédiaire de la Banque Urquijo et de la Banque Hispano-Américaine.



La réquisition des avoirs allemands en Espagne a servi de prétexte aux impérialistes américains pour une intervention plus directe dans l’économie du pays : ils ont placé sous leur direction la plupart des entreprises espagnoles importantes, notamment celles de l’industrie textile catalane et de la construction navale.



En mai 1947, s’est tenue, à Barcelone, une réunion de la Chambre de Commerce américaine en Espagne. A cette réunion assistaient, entre autres personnages, l’attaché commercial des U.S. A., M. Randall, et M. Walter Smith, président de la Vacuum Oil Company en Espagne. Le président de la Chambre, Max H. Klein, prononça un discours dans lequel il exposa quelques-unes des conditions auxquelles était subordonnée "l’aide" américaine. C’est ainsi qu’il préconisa la conclusion d’un traité de commerce de longue durée entre l’Espagne et les Etats-Unis, qui seul pouvait autoriser l’espoir d’une amélioration sensible de la situation. "Les énormes difficultés du moment, déclara-t-il, dues au manque de devises, pourront être surmontées, soit par l’augmentation des exportations, soit par l’emploi d’autres méthodes d’un effet plus rapide, comme, par exemple l’octroi de crédits... Au point de vue américain, nous savons que l'Espagne est ce que nous appelons un bon débiteur."



Quelles étaient les conditions minima exigées par les Américains pour l’établissement d’un traité commercial avec l’Espagne ? 

a) liberté des investissements américains en Espagne ; b) dévaluation de la peseta ; c) concession de bénéfices spéciaux aux importateurs de marchandises nord-américaines.



Le traité n’a pas encore été conclu, mais les suggestions du président de la Chambre de Commerce américaine en Espagne sont en train de passer dans la vie.



Des négociations sont en cours pour l'achat, par des compagnies nord-américaines, de gisements de wolfram et d’autres matériaux d’importance stratégique. Tout cela dans le but de faire du nord-ouest de l'Espagne une base industrielle des Etats-Unis, dont les points d’appui seraient constitués par La Coruña et Vigo, ports européens les mieux placés et les plus proches des Etats-Unis. 



Ford est en train de négocier l’établissement d'une grande fabrique en Galice et la construction d’une route stratégique jusqu'à la frontière."

A suivre...


(Source : Who’s Who dans le crime des marquis Urquijo quarante ans | La fermeture numérique (elcierredigital.com))




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