LES "PROVINCES VASCONGADAS" ET LE ROYAUME DE NAVARRE EN 1808.
Les "provinces Vascongades" désignent trois territoires du Pays Basque Sud : l'Alava, la Biscaye et le Guipuscoa.
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien la Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel, le 8
octobre 1808 :
"Détails géographiques et statistiques sur les trois provinces dites Vascongades, savoir, de la Guipouscoa, de la Biscaye et de l'Alava, ainsi que sur le royaume de Navarre. — Fin. (Voyez le numéro d'hier.)
... Le royaume de Navarre ou des Pyrénées, a eu des limites différentes, selon la fortune diverse des monarques qui l'ont possédé. A certaines époques, ils se sont agrandis aux dépens des rois de Castille et d’Aragon ; à d’autres, leurs frontières ont été resserrées par les conquêtes de ces monarques. Aujourd’hui, la Navarre renferme cinq mairies, celle de Pampelune, celle d’Estella, celle de Tudela, celle de Sanguesa et celle d'OIite. La sixième, qui est celle de Saint-Jean-Pied-de-Port, resta aux rois de Navarre après la conquête de ce royaume par les armes de Ferdinand-le-Catholique ; Charles V l’abandonna vers l’an 1530, et elle fut réunie à la France lors de l’avènement de Henri IV au trône.
BLASON DU ROYAUME DE NAVARRE DE 1234 A 1580 |
La Navarre est bornée au nord par la France ; à l’ouest par la Guipouscoa, au sud par Alava et Castille, et à l’est par Aragon. Elle est située entra le 15e degré 22 minutes et le 16e degré 42 minutes de longitude de l'île de Fer, entre le 42e degré 17 minutes et le 43e degré 15 minutes de latitude. Sa plus grande longueur est de 23 lieues sur 19 de largeur ; on peut évaluer sa surface à 437 lieues carrées.
Outre l’Ebre qui arrose cette province dans sa partie méridionale, elle est fécondée par plusieurs ruisseaux et rivières qui prennent naissance dans les montagnes voisines. Les rivières les plus considérables de la Navarre sont l’Aragon, l'Arga et l'Ega.
PONT DE LA ROCHAPEA SUR FLEUVE ARGA PAMPELUNE NAVARRE D'ANTAN |
Une grande partie du sol est montueuse ; et dans les montagnes, le blé, l'huile et le vin sont fort rares ; en revanche, la plaine en produit en abondance, spécialement les terres riveraines de l’Ebre. Le vin de Tudela et celui de Peralta sont des meilleurs vins de liqueur d’Espagne, et je m'étonne qu’on n’ait pas songé en France à les substituer à ceux de Malaga et de Xerèz dont le transport est si dispendieux en temps de guerre, tandis que les vins de Navarre sont à la portée de la France en tout temps. C’est une spéculation qui ne peut manquer d’enrichir les premiers qui l’entreprendront.
La Bardena réal est une plaine très étendue sur la rive gauche de l’Ebre, qu’on laisse sans culture, et qui, bien cultivée, pourrait fournir de blé la province entière.
MASSIF DE LA PISQUERA BARDENAS REALES NAVARRE D'ANTAN |
Les pâturages sont très abondants dans cette province, où les pluies sont aussi fréquentes qu'elles sont rares dans le midi de l'Espagne ; c’est pourquoi le bétail y est nombreux.
Les principaux produits de l’agriculture en Navarre sont le froment, le vin, l’huile d’olive et le lin. Il y a quelques mûriers, mais la récolte de soie est loin d'égaler ce qu'on pourrait attendre d'un climat si propre à l'éducation des vers. Il y a des mines de fer et de cuivre, des salines, et la célèbre mine de sel fossile de Valtierra, décrite par Bowles. La galerie principale de cette mine a plus de 1 200 pieds de long ; il y en a plusieurs autres de chaque côté de 240 à 300 pieds de longueur, soutenues par des piliers de sel.
La population de la Navarre s’accroît assez rapidement, comme celle de toutes les provinces frontières ou maritimes de l’Espagne. En 1725 , on n’y comptait que 34 715 familles, et en 1777 on en dénombra 43 220, dont 6 623 nobles. Enfin le recensement fait en 1797 donna 226 467 habitants, dont 64 446 hommes et 58 007 femmes célibataires ; 84 825 hommes et femmes mariés, 5 303 veufs, 9 148 veuves ; 4 739 prêtres, moines et religieuses. De sorte que, sur chaque lieue carrée, il y a un peu plus de 518 habitants ; mais comme il n’y a guère que le quart du sol susceptible de culture, on doit compter 2 077 personnes par lieue carrée de terrain fécond.
En 1786, l’exportation des produits ruraux et industriels de la Navarre s’éleva à près de deux millions de francs. Les objets de cette exportation furent l’eau-de-vie, légumes, sel, lin, herbes de jardinage et fruits, fromage, froment, laine sale, peaux, charbons, cochons, cercles de tonneau, orge, fer, amadou ; parchemin, garance, agneaux, chocolat, peignes, laine mérina et vin.
Les objets importés s’élevèrent à une valeur de 3 500 000 francs, ils consistaient en toute sorte d’étoffes de laine, de soie, de coton et de toiles de lin, en peaux tannées, papier, bas et mouchoirs, chapeaux, bouteilles, vitres de fenêtres, soufre , fil, sucre, cacao, cannelle, poivre, riz, cire, fer-blanc, étain, cuivre, clincaillerie, faïence, fil de fer, verre, drogues, etc.
Pampelune, capitale du royaume est située au centre de la Navarre, sur l'Arga qui fait presque le tour de la ville. Elle est bâtie dans une plaine, et enfermée par de hautes montagnes. Sa population est de 2 818 familles, composées de 14 054 personnes, habitant 1632 maisons.
SIEGE DE PAMPELUNE 1813 GRAVURE DE 1840 |
La police s’occupe avec soin de la propreté des rues ; mais à ses règlements utiles, elle en ajoute d’autres gênants et ridicules ; comme d’empêcher que les cafés communiquent à plusieurs rues, que les hommes puissent y mener des femmes après le coucher du soleil, et autres minuties non moins puériles. Cette sorte de règlements, très communs en Espagne, donnent à ce royaume l’air d’un vaste couvent, où chaque habitant, semblable à un cénobite, est astreint aux règles les plus sévères. Misérable législation, qui étouffe dans les âmes tout principe d’activité !
L’industrie manufacturière est très languissante à Pampelune ; mais la terre est cultivée avec soin. Les manufactures de cette ville ne méritent pas que nous nous y arrêtions elles se bornent à la fabrication de quelques draps grossiers qu’on fait à l’hospice, ou dans quelques ateliers de la ville ; à celle d’un peu de fayence commune et au blanchissage de la cire qu’on importe du dehors.
Les terres des environs de Pampelune sont bien fumées, et la méthode fatale des jachères y est presque inconnue. Les récoltes alternent généralement dans l’ordre suivant :
Première année, froment ; deuxième, fèves ; troisième, froment ; quatrième, maïs.
La quatrième année, on laboure les terres avec la laya, que nous avons déjà décrite ; les années intermédiaires, on se contente du labourage des bœufs.
LAYA MUSEE BASQUE BAYONNE PAYS BASQUE D'ANTAN |
L’instruction publique à Pampelune est très vicieuse ; ce sont des religieuses qui savent à peine épeler l’espagnol, qui se chargent de celle des filles, et qui leur inculquent, dès leur enfance, les plus absurdes préjugés ; celle des garçons n'est guère mieux soignée.
Pampelune contient une église cathédrale et trois autres paroisses ; elle est le siège d’un évêché suffragant de la métropole de Burgos. Il y a aussi dans cette ville neuf couvents de moines et deux de religieuses ; nombre qui est prodigieux, eu égard à sa faible population.
La seconde ville de la Navarre est Tudela, dont la population s'élève à 7 295 habitants. Cette ville est, depuis 1788, le siège d'un évêché érigé à cette époque par Charles III ; fondation dont le pays n’a retiré aucun profit.
TUDELA SUR EBRE NAVARRE D'ANTAN |
Tudela est située au confluent de l'Ebre et du Oueyles ; elle est entourée de belles promenades, et ses environs offrent un coup d'oeil très pittoresque. Nous avons déjà parlé de l’excellence des vins de son territoire ; on y récolte aussi du froment en abondance, de l’orge, des fèves, des haricots, des olives, du chanvre et des fruits d’un goût exquis. On évalue à 7 000 les agneaux qu’on y élève tous les ans.
Les manufactures de draps sont ici moins languissantes que dans les autres villes de la Navarre ; elles fleuriraient encore plus sans les règlements gênants de jurandes et maîtrises, qui y sont en vigueur depuis qu’en 1438, Jean II et Blanche de Navarre sanctionnèrent les ordonnances de la confrérie des fabricants de draps.
On compte à Tudela six fabriques de savon, et quelques-unes de tuiles, de briques et de poterie.
Corella, ville de près de 4 000 habitants, est remarquable par sa manufacture de jus de réglisse, qu’on extrait, du bois de cet arbre, et qu'on réduit en pâte. On en exporte beaucoup pour l’Europe septentrionale.
MULTIVUES DE CORELLA-KOREILA NAVARRE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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