LES "PROVINCES VASCONGADAS" ET LE ROYAUME DE NAVARRE EN 1808.
Les "provinces Vascongades" désignent trois territoires du Pays Basque Sud : l'Alava, la Biscaye et le Guipuscoa.
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien la Gazette Nationale ou Le Moniteur Universel, le 8
octobre 1808 :
"Détails géographiques et statistiques sur les trois provinces dites Vascongades, savoir, de la Guipouscoa, de la Biscaye et de l'Alava, ainsi que sur le royaume de Navarre. — Fin. (Voyez le numéro d'hier.)
La province d’Alava, quoique très montueuse, l’est bien moins que les deux autres dont nous venons de parler ; elle est aussi beaucoup plus fertile. Sa situation est entre la Biscaye, la Guipouscoa, la Navarre et la Vieille-Castille ; elle a dix-huit lieues de longueur, et quinze dans sa grande largeur. Alava est bornée au nord par la Biscaye et la Guipouscoa ; à l’est, par le royaume de Navarre ; au sud et à l’ouest, par la Vieille-Castille.
Cette province est entourée de trois grandes cordillères de montagnes qui partent des Pyrénées, avec lesquelles elles forment une chaîne non interrompue. La première et la plus haute est celle qui la ceint du côté du septentrion, depuis la vallée de Llodio, et en suivant les confins de la Guipouscoa et de la Navarre ; ici se trouve le rocher d’Alogua ; c’est un roc de marbre de couleur cendrée. La seconde cordillère s’étend du nord au Sud, et projette plusieurs branches de différentes hauteurs, qui pénètrent jusque dans le centre de la province. Enfin, la troisième sépare de la Navarre la partie orientale d'Alava. Toutes ces montagnes produisent du bois en abondance ; les chênes propres à la construction des vaisseaux y sont très communs ; les chantiers de la marine espagnole s'en fournissent en grande partie. On y trouve aussi des carrières de marbre et des mines de fer et de cuivre.
La portion la plus unie et la plus fertile de l’Alava est celle désignée sous le nom de rioja alavesa, et qui est à Alava ce que l’infanzonado est à la Biscaye. Cependant, même dans ce district, les terres sont inférieures à celles de la Vieille-Castille.
RIOJA ALAVESA PAYS BASQUE |
L’Alava est arrosée par un grand nombre de ruisseaux, de torrents et de petites rivières, qui prennent naissance dans ces montagnes. Les rivières sont très poissonneuses, surtout la Zadorra, la plus considérable de toutes celles de la province.
LAC ZADORRA ALAVA PAYS BASQUE D'ANTAN |
Le grand nombre de villages et de riantes maisons de campagne qui se touchent les unes les autres, font que le chemin de Vitoria à Vergara ressemble plutôt à une longue rue qu'à une grande route. La beauté de celle-ci, la vue délicieuse de la Zadorra, qui semble se plaire à couler dans ce pays, et qui serpente en mille détours sans s’éloigner du chemin ; l’air d’aisance que les villageois respirent, la propreté et la bonne tenue des auberges, tout enchante le voyageur qui parcourt cette terre de féerie.
Malgré le peu d'étendue d'Alava, sa population s’élève à plus de soixante-dix mille habitants, répartis en une ville, soixante-douze bourgs et trois cent cinquante-sept villages ou hameaux.
Depuis 1567, la province est divisée en six quadrilles, lesquelles comprennent cinquante-sept confrairies ou hermandades. Les quadrilles sont celles de Vitoria, de Salvatierra, d’Ayala, de la Guardia, de Zuya et de Mendoza. La première renferme dix-huit hermandades, la seconde six, la troisième cinq, la quatrième trois, la cinquième cinq, et la dernière douze.
Il y a dans la province d’Alava une église collégiale, dont le chapitre est composé de seize chanoines ; quatre cent trente-quatre paroisses desservies par huit cent neuf prêtres, sept couvents de moines, et neuf de religieuses.
La ville de Vitoria, que l'on regarde ordinairement comme la capitale de la province, parce qu’elle est la plus peuplée et la plus considérable de toutes ses communes, a six mille cinq cents habitants, qui occupent mille dix huit maisons, dont cent soixante-neuf dans les faubourgs. On prétend que la population de cette ville était plus nombreuse au 14e siècle et au commencement du 15e ; mais les assertions des historiens espagnols sur l’ancienne population de la presqu’île et de ses différentes provinces, méritent rarement la confiance d’un critique sensé. Salvatierra dit qu’en 1423 la ville ne voulut pas payer 48 000 maravédis au roi Jean II, ayant allégué que sa population était réduite de plus de dix mille habitants à quatre cents. "Le nombre d’hommes mariés, ajouta la ville, lorsqu’on imposa sur elle cette capitation, était de huit mille, dont deux mille veufs ou célibataires ; et maintenant les habitants ne vont pas au-delà de quatre cents." Il est impossible de croire à cette diminution soudaine, et l’on ne voit pas d’ailleurs comment le nombre d’hommes mariés pouvait être quadruple de celui des célibataires ou veufs. Soixante-treize ans après, en 1496, Alexandre VI dit, dans une bulle pour la translation de l’église collégiale d’Armentia à Vitoria, qu’il y avait dans cette dernière deux mille maisons habitées. Voilà un nouvel et rapide accroissement, aussi difficile à concevoir que la dépopulation soudaine qui l’avait précédé.
RENCONTRE DE NAPOLEON BONAPARTE AVEC SON FRERE JOSEPH 1ER VITORIA ALAVA 5 NOVEMBRE 1808 |
Vitoria présente tous les symptômes de l’aisance, qui suppose toujours une population croissante. Les maisons des particuliers sont commodes et bien bâties ; la police s'occupe avec un zèle soutenu de tout ce qui peut contribuer à la salubrité ; les habitants sont sains et robustes. On ne souffre pas de mendiants dans la ville ; ordonnance de police d'autant plus aisée à faire observer, que l’indigence, si commune dans la Castille, est inconnue à Vitoria. Il y a un hospice on l’on entretient cent cinquante personnes qui y ont pris demeure sans y être forcées ; les ordonnances de cet établissement pieux n'ont rien de gênant ; les pensionnaires peuvent entrer et sortir à l’heure qu'ils le jugent à propos, quand ils ont fait l’ouvrage qui leur est assigné tous les jours, et qui n’est jamais très pénible. Les enfants y apprennent à lire, à écrire, et le catéchisme.
Vitoria a une église collégiale, quatre autres paroisses, trois couvents de moines, trois de religieuses, et cinq chapelles. La municipalité qui administre la ville et son district se compose d'un alcade, un substitut ou second alcade, deux regidors, dix députés de la ville, et deux des villages, un syndic, deux députés de ta communauté, un alguasil major, deux alcades de la hermandad et un greffier. Il y a dans chaque village un ou deux hommes qui exercent des fonctions analogues à celles de nos maires et nos juges de paix collectivement, et que l’on nomme fiales. Tous ces officiers sont choisis pour un an, à la fin de décembre, par une assemblée composée de leurs prédécesseurs.
EGLISE SAN MIGUEL VITORIA ALAVA PAYS BASQUE D'ANTAN |
L’agriculture à Vitoria est très florissante ; mais la froidure du climat empêche la culture des fruits qui exigent un certain degré de chaleur. Il parait qu'on remarque un refroidissement progressif dans l’atmosphère qui rend tous les jours certaines cultures moins productives.
L’industrie et le commerce ont une très grande activité dans cette ville ; on y trafique en fer brut et ouvrage ; en denrées coloniales, dont Vitoria est l’entrepôt pour une grande partie de la Navarre et de la Vieille-Castille, en laine, draps, toile, soie, cuir tanné, chaises de paille, batterie de cuisine en fer, chapeaux, souliers, poterie grossière, tanneries, nappes et serviettes, etc.
A sept lieues de Vitoria est Salinas d’Agnana ; ici sont des salines inépuisables ; on y fabrique tous les ans 60 000 fanègues de sel marin, et on en pourrait fabriquer dix fois autant sans craindre d'épuiser l’eau salée, qui se rend dans les bassins de trois sources très copieuses, provenant d’un immense lac d’eau salée, situé dans une colline au sud de Salinas.
SALINAS DE AÑANA ALVA |
Avant de passer à la description du royaume de Navarre, nous dirons un mot sur Ognate et les Encartaciones : celles-ci font partie de la Biscaye, elles s'étendent l'espace de deux lieues le long de la côte ; leur plus grande longueur est de sept lieues, sur trois et demie de largeur. Quoique le sol soit très montueux, on y trouve de gras pâturages, les forêts y sont fort touffues. C’est dans le territoire des Encartaciones, que sont situées les célèbres mines de Somorrostro, dont on tire 800 000 quintaux de minerai tous les ans, et qui fournissent en grande partie les forges de Biscaye, de Guipouscoa, d'Alava, de Navarre, de la Vieille-Castille et des Asturies.
MINES DE SOMORROSTRO BISCAYE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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