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dimanche 27 octobre 2024

UNE BALADE À LA GUADELOUPE À FONTARRABIE EN GUIPUSCOA AU PAYS BASQUE EN 1899 (deuxième et dernière partie)

 

BALADE À LA GUADELOUPE À FONTARRABIE EN 1899.



Le hameau de Guadalupe, et son sanctuaire domine la ville de Fontarrabie, en Guipuscoa.



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VILLAS DE LA ROUTE DE GUADALUPE FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet le mensuel La Grande Revue, le 1er mai 1899, sous la plume de 

Louis de Robert :



"Flânerie au Pays Basque.


II. Guadeloupe.



"... Ils vont, ces chiens, la langue pendante et la queue en trompette. Plus prudents et moins lestes, nous allons d'une pierre à l'autre, en calculant nos enjambées. Et de tous nos sautillements réunis, naît, sur les chemins, une sarabande de petites ombres folâtres et diaboliques.



Il est près de cinq heures quand nous atteignons la Guadeloupe. Une courte place carrée, vêtue d'herbe et plantée de chênes, s'avance en terrasse sur le versant de la montagne. A l'ombre de ces chênes une vingtaine de moines se reposent des fatigues de la journée. Apparition imprévue qui appelle dans ce décor de feuilles l'idée soudaine d'un troisième acte d'opéra comique. En effet, devant ces robes de bure, cette corde semée de noeuds et trop neuve qui ceint leurs reins, cette tonsure trop nette et comme factice, j'ai, oh ! très fugitive ! l'impression de figurants s'avançant sur une scène pour entonner un choeur. C'est que, habitué à voir la réalité différer toujours des formes artificielles qui veulent la représenter, l'esprit ne conçoit pas immédiatement que ces moines, ces vrais moines puissent avoir avec le classique père capucin des grands et des petits guignols une aussi parfaite identité. Toute fugitive, je l'ai dit, mon impression ne mérite pas ces phrases. Déjà elle est loin, et j'éprouve peu à peu la gravité dont ces hommes austères imprègnent ce lieu. Barbus ou rasés, la plupart vigoureux, dans la force de l'âge, ils goûtent, par cette journée d'été, l'apaisement qui tombe des grands chênes. Ils parlent peu entre eux, adossés aux troncs ou assis sur la pierre, gardant là, dans cette trêve du travail, leurs habitudes de recueillement et d'humilité. Et, à étudier leurs visages qui respirent la force et la paix, à pénétrer la sérénité puissante de ces âmes qui ont renoncé à tout, on sent déconcertée en soi l'étroite, l'égoïste, la fragile conception que nous avons du bonheur.




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SANCTUAIRE DE N.S. DE GUADALUPE FONTARRABIE GUIPUSCOA
PAYS BASQUE D'ANTAN



L'un d'eux, assez grand, avec un visage fin, une barbe presque gracieuse et un air d'élégance dans sa robe de bure, se promène à quelques pas des autres. Il est manifeste que c'en est le supérieur. Certains s'approchent pour lui parler, puis s'en reviennent. Oui, il y a quelque distinction dans la personne de ce moine. Marius, au courant de toutes les légendes qui circulent, me conte qu'il est appareillé aux plus grandes familles d'Espagne. Quel chagrin secret l'a jeté dans ce cloître ? Voici qu'il m'inspire aussitôt un intérêt tout neuf et qu'il se trouve, par ce détail, rehaussé d'un prestige. C'est qu'il a subitement cessé d'être un personnage de la vie courante pour prendre, à mes yeux, le relief d'un personnage de roman.



Et je songe de nouveau confusément à toutes nos joies périssables, tout en suivant dans une sorte d'auberge ouverte sur la place, mes compagnons que tourmente la soif. C'est, au premier, une salle commune où deux artilleurs espagnols jouent aux cartes. Ils viennent d'un fort établi sur le plateau et qu'on découvre d'ici. Dans cette salle, nous voyons bientôt apparaître le supérieur suivi d'un gros moine à la ceinture duquel pendent des clés. Ils nous saluent, vont au fond, dans une salle plus petite, où ils se font servir du cidre, du pain et du jambon. Pendant ce temps les autres moines, les simples moines demeurent devant la porte. Ce qui prouve que, partout chez les hommes, égalité, fraternité, ne sont que de vains mots.




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ARTILLEURS FORT DE GUADALUPE A FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN




Quand nous redescendons, un peu plus tard, la place est vide. Le troupeau des robes de bure est rentré silencieusement dans le monastère dont le clocher domine le hameau. Alors, malgré le soleil qui le dore, cet asile du bonheur m'apparaît glacial maintenant, à la façon d'une caserne redoutable et mystérieuse, d'une caserne où des gens ordonnent et des gens peinent, sans garantie, ici plus qu'ailleurs, de justice, de bonté, de solidarité et d'amour.



Cependant, il nous reste à gravir une dernière bosse de la montagne. Il n'y a plus de chemins, ou plutôt nous n'en distinguons pas, et c'est une montée à l'aventure, sur de la terre durcie en s'accrochant des pieds et des mains aux mousses desséchées, aux herbes cassantes. Ici, vers la cime, plus de reposantes verdures, un sol aride, sous l'âpre vent qui le rase sans cesse. A mesure que nous montons, l'horizon se recule, s'ouvre, s'élargit. Voici l'Océan bleu. Voici la côte brune, la côte de France jusqu'à Biarritz, la côte d'Espagne jusqu'à Saint-Sébastien. C'est une figure d'atlas avec ses sinuosités, ses villages, ses cours d'eau, ses montagnes. Celles-ci, par leurs formes, prennent des apparences de vie. Il semble que nous marchions sur le dos d'une énorme bête accroupie là les pattes repliées, auprès d'autres bêtes, ses soeurs, et, vraiment, une fois au faîte, étendu sur son poil rude, je crois l'entendre vivre et respirer, cette bête géante qui me porte.




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HENDAYE VUE PRISE DE GUADALUPE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



La vertu de ces courses en plein air est de vous composer une âme enfantine. Nous nous laissons aller, pour redescendre, à une course vertigineuse. C'est fou ! il y a de quoi se rompre vingt fois les jambes à dégringoler ainsi sur des pentes raides. Mais bah ! le vent et la vitesse nous grisent ; la terre durcie paraît molle et élastique ; l'herbe piquante prend le moelleux d'un tapis. On court, on glisse, et on se retrouve à la Guadeloupe étourdis, essoufflés et riants.




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VUE PRISE DE GUADALUPE FONTARRABIE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Le soleil a disparu quand nous sommes de retour à Fontarabie. Une courte brise passe sur la Bidassoa qui, maintenant, coulant à pleins bords, fait danser devant le quai une flottille de barques légères. Dans l'une d'elles, où nous avons pris place, un jeune passeur déployant sa voile nous ramène à Hendaye. Il fait presque nuit, et cette traversée, dans le silence et l'obscurité, a je ne sais quel air d'aventure qui m'impressionne. Notre barque glisse, comme une ombre, avec les seuls bruits négligeables de la brise enflant la voile et de l'onde qui ruisselle. Et, sur cette rivière agitée de vagues, par ces ténèbres qui semblent hostiles, nous avons l'air de fuir la vieille et mystérieuse Espagne, pareils, en cette fuite sourde et précipitée à des conspirateurs d'autrefois."






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