Libellés

mercredi 28 mai 2025

LE FILM "GACHUCHA FILLE BASQUE" EN 1922 (troisième partie)

  

LE FILM "GACHUCHA FILLE BASQUE" EN 1922.


C'est un film muet, en noir et blanc, de 45 mn, réalisé en 1922 par Maurice Challiot et projeté pour la première fois le 9 février 1923.





FILM GACHUCHA LA FILLE BASQUE 1922



Le scénariste de ce film est Charles Torquet.

La société de production est Natura Films.

Les principaux acteurs sont : Ninon Balzan, Hugues de Bagratide, Paulette Ray et Raoul Paoli.



Le synopsis de ce film est le suivant : Gachucha veut venger la mort de son frère, le contrebandier, qu'une dénonciation a envoyé en prison. Elle est fiancée à un honnête garçon, mais courtisée par un homme habile qui lui promet de livrer le mouchard s'il est choisi comme époux. Adroitement ce rival arrive à compromettre le fiancé de Gachucha...



Depuis 2017, je vous ai parlé de plusieurs films tournés au Pays Basque ou avec des histoires se 

passant au Pays Basque, tels que Euskadi (1936), l'Appel du stade (1941), la Robe Rouge (1933), 

Au Pays des Basques (1930), Emak Bakia (1925), le Pays basque espagnol (1931), Sinfonia Vasca 

(1936), El Mayorazgo de Basterretxe (1928), Im Lande Der Basken (1944), Odette (1928), Vicenta 

(1920), Le Mariage de Ramuntxo (1947), Gure Sor Lekua (1956), l'Athlète aux mains nues (1952), 

The Land of the Basques (1955), La Reine de Biarritz (1934), Haut-le-Vent ou Air Natal (1942),

Ramuntcho (1938), le film "Véronica" (1923) et le film "Gachucha fille basque" (1922).




Voici ce que rapporta au sujet du film "Gachucha fille basque" l'hebdomadaire Le Film Complet

le 6 mai 1923 :



"Gachucha par Jean Morlaix. — (Natura-Film).


pays basque autrefois cinéma gachucha
MLLE PAULETTE RAY GACHUCHA 


... Gachucha était épouvantée. Elle aurait voulu douter encore, mais comment ne pas croire celui qui se réclamait avec tant d'assurance de Bestégui ? Quel avantage ce Bestégui aurait-il eu à soutenir un mensonge ? Mendiaz parlait comme un homme certain de prouver son dire. Il n'y avait pas de doute possible. Pourtant, elle résista encore :




— José-Miguel, agir ainsi ? Ce n'est pas possible.

— C'est certain, affirma l'autre. Bestégui vous le dira comme moi. Et après, José est parti avec les hommes, dans la direction indiquée.

— Ce n'est pas vrai !

— D'ailleurs, vous savez bien qu'il blâme toujours ceux qui font de la contrebande, quand tout le monde en fait dans le pays. Vous l'avez certainement entendu cent fois. De là à les dénoncer, il n'y a qu'un pas.

— Non, non, vous mentez, José n'est pas pour la contrebande, c'est entendu, mais il n'est pas non plus un mouchard.

— Le ciel m'écrase si je mens. Demandez à Bestégui, vous dis-je, si ce que je vous ai raconté n'est pas la vérité pure.

— Allons, vous êtes jaloux de José.

—Oui, j'en suis jaloux. Oui, je suis heureux de l'accuser, mais je dis vrai... Demandez à Bestégui !



Cette fois, Gachucha était convaincue. Son chagrin se transforma en une froide fureur.


— Et voilà, conclut effrontément Mendiaz, l'homme que vous me préférez, dont vous accueillez les grâces !



pays basque autrefois cinéma gachucha
HEBDOMADAIRE LE FILM COMPLET 6 MAI 1923
FILM GACHUCHA LA FILLE BASQUE 1922


Elle ne répondit pas. Elle réfléchissait et le fourbe comprit qu'il fallait la laisser méditer.



Pendant ce temps, José-Miguel, au comble de la tristesse et de l'inquiétude, voguait sur les eaux bleues du golfe. Il ne pouvait oublier le regard soupçonneux qu'il avait surpris dans les yeux de Gachucha. Ne fût-ce qu'un instant, elle l'avait soupçonné, lui ! Il ne s'accordait pas de qualités, mis il savait bien être loyal, et n'avoir jamais trompé personne. Et il fallait que ce fut sa fiancée, celle qu'il adorait, en qui il mettait une confiance entière, il fallait que ce fut Gachucha qui lui infligeât cet affront, cette abominable injure !



Il tenait la barre et les hommes d'étonnaient des distractions d'un aussi habile marin. Il "arrivait" quand il fallait "lofer", ne serrait pas le vent et sa voile blanche, détendue, battait au mât comme une aile blessée.


— Mais qu'est-ce qu'il a donc, aujourd'hui, José-Miguel ? Il va comme un mousse, disait l'un.

— Tu dors, José-Miguel ? risquait un autre.



Mais José-Miguel n'entendait plus rien, rien que le cri de son brave coeur endolori. Il souffrait beaucoup, partagé entre le chagrin et la colère. Lui, l'ami de Chico, lui qui avait tout fait, il le savait bien, pour sauver son camarade, lui, être pris pour un traître ! Et comment prouver la fausseté de cette accusation infâme, qu'elle n'avait pas encore formulée, certes, mais qui tomberait bientôt de sa jolie bouche ?



Gachucha venait de relever la tête. Sa résolution était prise. Elle fixa sur Mendiaz un regard luisant de flammes sombres et elle lui dit :


— Qu'un pareil Judas ne soit pas puni, ce n'est pas possible.

— Je m'en charge, dit Mendiaz en frémissant.

— Comment ?

— Soyez tranquille. Je vais combiner mon affaire. Mais il faut du courage pour s'attaquer à un ours comme José. Quelle sera ma récompense ?

— Si vous faites ce que vous dites, Mendiaz... 



pays basque autrefois cinéma gachucha
HEBDOMADAIRE LE FILM COMPLET 6 MAI 1923
FILM GACHUCHA LA FILLE BASQUE 1922


Elle s'arrêta. Un profond dégoût lui serrait le coeur. Mais elle reprit :


— Si vous faites ce que vous dites, je serai votre femme.

— Jurez-le ! cria-t-il.



Elle étendit la main vers la Vierge et dit :


— Je le jure !

— Alors, comptez sur moi, dit-il joyeusement. 



Et, ravi et tout léger, le traître s'éloigna d'un pas alerte. Il ne sentait plus que son bonheur et, momentanément, il avait oublié son crime.



Quant à Gachucha, quelque chose lui disait déjà qu'elle regretterait son engagement. Mais elle crut ne pas devoir s'abandonner à ce qu'elle prenait pour une faiblesse. Elle voulut s'affermir dans sa résolution et... logique comme une amoureuse blessée, elle se laissa tomber sur un rocher en pleurant amèrement.



Pendant deux jours, José-Miguel et Gachucha ne se revirent pas. Un autre que José aurait provoqué une explication, exigé des accusations précises. Il aurait fait de son mieux pour les prouver fausses, se serait défendu avec éloquence, aurait plaidé sa cause. Mais José-Miguel n'était pas l'homme des explications. Une accusation aussi monstrueuse le paralysait. Il craignait de ne pas savoir répondre et de se couvrir de confusion. Incapable d'une perfidie, la seule pensée qu'on l'en pouvait accuser lui "coupait bras et jambes". Le dimanche, à la sortie de la messe, il se trouvait sur la place, dans l'espoir de lire, au passage dans les yeux de Gachucha qu'elle avait oublié ses méchantes idées. Bientôt la jeune fille sortait de l'église avec sa mère. Mme Irigoyen s'arrêta à bavarder avec d'autres commères. Gachucha continua son chemin. José-Miguel la vit et, bravement, il marcha vers elle. Mais, au lieu de s'arrêter pour l'attendre, Gachucha, la tête haute, l'oeil chargé d'un indicible mépris, vint passer devant lui et s'éloigna dédaigneusement. Le malheureux garçon resta stupide. Il ne trouva pas un mot à dire et s'en alla à son tour, tout piteux.



pays basque autrefois cinéma gachucha
HEBDOMADAIRE LE FILM COMPLET 6 MAI 1923
FILM GACHUCHA LA FILLE BASQUE 1922


Mendiaz n'était pas loin et il avait suivi cette scène avec un sourire de contentement. Comme José-Miguel se retournait, il vit le toucheur de boeufs qui rattrapait la jeune fille, l'abordait avec une certaine familiarité et, favorablement accueilli, l'accompagnait en faisant l'agréable et en causant avec ostentation, comme un homme qui tient beaucoup à ce que les passants s'avertissent de sa bonne fortune. Sans grande vanité, pourtant, José-Miguel ne put s'empêcher de se dire :


— Si c'est celui-là mon successeur...



Mendiaz causait avec volubilité, faisait des frais et cherchait à se présenter sous son meilleur jour. Mais, si Gachucha le tolérait à ses côtés, elle ne paraissait pas grandement impressionnée de tout cet esprit non plus que de ces plaisanteries. Et puis, au bout de quelques pas, elle s'arrêta net en disant :


— Je vous remercie, Mendiaz, de m'avoir tenu compagnie jusqu'ici, mais il faut nous quitter. Je ne veux pas faire jaser.



Mais l'autre s'habituait à son bonheur et se croyait déjà des droits. Il protesta :


— Déjà ? Vous n'êtes pas très généreuse.

— Vous savez bien qu'il y a de mauvaises langues.

— Mais puisque je me suis engagé à punir le coupable et que vous serez ma femme ?

— Ce n'est pas encore officiel et ma rupture avec José-Miguel ferait scandale. Il faut le temps.



En somme, elle s'accoutumait déjà à la perspective d'être à lui. Mendiaz se félicita. Ses affaires étaient décidément en bonne voie. A lui de faire sa besogne et de conquérir sa dame comme un galant chevalier de jadis, mais par des procédés peut-être moins chevaleresques. Bah ! on fait ce qu'on peut. Il voulut la retenir :


— Ecoutez, dit-il, j'ai une idée.



Mais, en dépit de tous ses désirs de vengeance, Gachucha n'était pas autrement pressée de connaître une pareille idée. Elle ne parvenait pas à se déshabituer d'aimer José-Miguel et la perspective des catastrophes qui attendaient ce traître ne pouvait la réjouir.


— Non, non, dit-elle. Vous me direz ça tantôt.



Elle partit, toujours plus triste. Quant à Mendiaz, il était devenu tout faraud et, en le voyant passer, ceux qui le connaissaient se demandaient ce qu'il avait de changé. Le fait est qu'il n'était plus le même homme. Son allure était transformée du tout au tout. Il allait d'un pas élastique et, s'il n'avait pas eu l'air si faux, l'amour l'aurait rendu presque beau.



pays basque autrefois cinéma gachucha
HEBDOMADAIRE LE FILM COMPLET 6 MAI 1923
FILM GACHUCHA LA FILLE BASQUE 1922


De son côté, José-Miguel promenait n'importe où son désoeuvrement et sa tristesse lamentable. Le hasard l'amena devant un petit café, sur le port, où il lui arrivait de boire une bouteille de limonade.



Auprès de lui, deux matelots-pêcheurs jouaient aux cartes. Ils ne furent pas longtemps sans se disputer bruyamment. L'un d''eux se levait déjà et parlait sous le nez de son adversaire, quand José, qu'ils incommodaient par leurs récriminations, les rasait tous deux de deux tapes en sens contraire, pas méchantes, mais pesantes. Cinq minutes plus tard, la dispute se ranimait et, cette fois, à seule fin de déterminer si l'un d'eux avait eu tort ou raison de couper avec un roi, les deux gaillards s'empoignèrent à bras-le-corps et, en s'injuriant copieusement, cherchèrent à se terrasser.



Cette fois, José, impatienté, se leva, les saisit tous deux ensemble, les enleva comme deux fétus et les rejeta à distance.


— Allez vous disputer et vous battre plus loin. C'est insupportable ! dit-il avec toute l'aigreur dont il était capable ; et ce n'était guère.



Refroidis par cette puissante étreinte, les deux champions s'en allèrent et, une fois à quelques pas, l'un d'eux, qui était Gascon, cria à José :


— Eh ! toi, petit malheureux, qu'est-ce qu'on te ferait voir, si tu n'étais pas si fort !



Ce dimanche-là devait rester dans la mémoire de Mendiaz comme l'un des plus beaux de toute sa vie. Tandis que José et Gachucha ne roulaient dans leurs têtes que de lugubres pensées, assuré de pouvoir prouver ses dires sans que José-Miguel pût en rien se disculper, le toucheur de boeufs se voyait près d'un but vainement visé depuis longtemps. A son tour, il éprouva un besoin de solitude pour mieux savourer son succès et c'est ainsi qu'il se trouvait bientôt cheminant par les terres au long des grèves et berçant sa joie au rythme monotone des vagues qui se brisaient non loin de lui. il se demandait aussi comment tenir sa promesse à Gachucha, car il avait tout de même vendu la peau de l'ours.



Au détour d'un sentier, il entendit une voix qui disait :


— Mon ballot est prêt chez Joroba, à Fontarabie, mais c'est dimanche, personne ne veut aller le chercher et moi, je suis surveillé. Comment faire ?



Deux hommes causaient derrière un monticule de terre, le visage tourné vers la mer.



Mendiaz s'était arrêté. Les paroles qu'il venait d'entendre résonnaient encore à ses oreilles quand, soudain, il eut comme une illumination. Tout son plan se dressa dans sa tête, net et précis. Il tenait son idée. Il tourna autour de la motte de terre qui le séparait des interlocuteurs, allongea le bras et tira la manche de celui qui venait de parler. L'autre tressaillit et se retourna, croyant à un douanier et déjà prêt à fuir. Mais à la vue de Mendiaz, connu pour affilié à des entreprises contrebandières, il se calma. Mendiaz dit simplement :


— J'ai votre affaire.

— Et qui donc ?

— Je peux envoyer José-Miguel à Fontarabie.

— Tu en as de bonnes ! Je t'ai entendu dire qu'il ne fallait pas avoir confiance en lui, qu'il blâmait la contrebande et qu'il était prêt à dénoncer toutes les expéditions dont il entendrait parler.

— On dit ça pour détourner des soupçons. Mais José est un bon et, comme sa réputation de sagesse est faite chez les gabelous, c'est aussi un homme sûr avec lequel on ne risque pas de se faire pincer.

— En somme, tu en réponds ?

— Comme de moi même !



Belle garantie ! Mis en confiance, les deux fraudeurs discutèrent l'affaire avec Mendiaz qui promit de faire partir l'émissaire au plus tôt.



Pour mieux mettre ces gens-là en confiance, il discuta avec âpreté la commission qui devait lui être réservée sur l'affaire et, tout bien convenu, il prit le chemin de la maison de Gachucha."




A suivre...




Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

Plus de 6 400 autres articles vous attendent dans mon blog :

https://paysbasqueavant.blogspot.com/


N'hésitez pas à vous abonner à mon blog, à la page Facebook et à la chaîne YouTube, c'est gratuit !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire