LA FAMILLE HARANEDER DE SAINT-JEAN-DE-LUZ.
La famille Haraneder de Saint-Jean-de-Luz est une très ancienne famille noble et bourgeoise.
Voici ce que rapporta à ce sujet Joseph Nogaret dans le Bulletin de la Société des sciences, lettres &
arts de Bayonne, le 1er janvier 1933 :
"Une famille de riches Bourgeois sous l'Ancien Régime : les Haraneder de Saint-Jean-de-Luz.
Grâce à la grande pêche et à son commerce avec les pays d'outre-mer, la ville de Saint-Jean-de-Luz fut, de tous temps, la plus riche du pays de Labourd. On y compta plusieurs familles qui acquirent ainsi de très grosses fortunes : les Lohobiague, les Chibau, les Casabielle, les Lasson, les Hayet et bien d'autres parmi lesquels les Haranader méritent une mention spéciale. En très peu de temps en effet ils arrivèrent à une situation des plus brillantes mais qui ne se prolongea pas plus de 3 ou 4 générations, pour péricliter ensuite rapidement et disparaître tout à fait.
D'origine espagnole (leur nom s'écrivait primitivement Araneder) ils se fièrent en France au milieu du XVIe siècle, et on les trouve établis à Ciboure. La famille s'accrut assez vite et quelques-uns de ses membres s'établirent à Saint-Jean-de-Luz où ils figuraient déjà parmi les bourgeois au commencement du siècle suivant. On y trouvait alors deux frères : Jeeannot et Martissans.
Jeannot commença par être capitaine de navire. Il voyagea beaucoup, aux Indes et ailleurs, réussit dans ses entreprises ; ce qui lui permit de devenir armateur et de gagner une grosse fortune. Il en fit un noble usage, se montra généreux à l'égard des malheureux et parmi ses bonnes oeuvres on peut citer l'ancien hospice désaffecté depuis peu et qu'il construisit en entier de ses deniers. Pour l'en remercier la jurade lui fit cadeau d'une maison sur le port. Cette belle demeure existe encore et est connue sous le nom de "maison de l'Infante".
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MAISON DE L'INFANTE SAINT-JEAN-DE-LUZ AVANT SA RESTAURATION 1875 |
En 1627, Louis XIII ayant demandé l'appui de la marine marchande pour ravitailler l'île de Ré bloquée par la flotte anglaise, Jeannot fit cadeau au roi, à cette occasion, de deux vaisseaux armés et pourvus d'artillerie, belles unités qui furent jugées dignes d'être incorporées à la flotte royale. Cette générosité valut au donateur les remerciements de Richelieu et des lettres de noblesse. Jeannot et sa femme, Françoise de Chibau, eurent trois enfants morts tous trois sans postérité.
Martisans eut 6 enfant qui eurent des fortunes diverses. L'un d'eux, nommé Martin, né vers 1600, devait porter lui est ses descendants, le commerce luzien à un degré de prospérité qu'il n'avait jamais connu jusqu'alors. Nommé bayle en Janvier 1660, il occupait ces fonctions depuis 4 mois, lorsque la ville fut mise en émoi par l'annonce de l'arrivée du roi Louis XIV venant au devant de sa fiancée Marie-Thérèse d'Autriche. Sous l'impulsion de son bayle, la ville fit au roi une magnifique réception dont les mémoires du temps nous ont laissé le récit.
Le 8 Mai, Martin de Haraneder avec ses 4 jurats revêtus de leur costume officiel, simarre et chaperon rouge avec fleur de lys d'or, alla attendre le cortège royal à l'entrée de la ville. Le roi, la reine-mère, le duc d'Anjou, la grande Mademoiselle, le cardinal Mazarin et toute la cour, escortés par les gardes du corps et les mousquetaires, débouchèrent de la route de Bayonne aux acclamations d'une foule immense, au bruit du canon et des cloches sonnant à toute volée.
Le bayle harangua le roi et le conduisit à la maison Lohobiague où il devait loger. Anne d'Autriche reçut à Joanoenea l'hospitalité de Marie de Haraneder, cousine germaine du bayle et veuve de Saubat Lohobiague. Les Haraneder et les Lohobiague surent faire les choses grandement et leur hospitalité eut un caractère de somptuosité et d'élégance hautement apprécié de leur hôtes illustres.
Le 20 Mai 1660, le bayle obtint du roi la confirmation des privilèges de Saint-Jean-de-Luz assurant son indépendance administrative et la liberté individuelle de ses habitants au point de vue commercial. C'était là un grand événement pour cette population qui vivait du négoce. Aussi la ville témoigna-t-elle à son bayle sa gratitude et ses félicitations.
Des 7 enfants de Martin Haraneder, 3 fils eurent une nombreuse postérité et formèrent 3 branches principales désignées, pour le distinguer, sous les surnoms : Haraneder-Putil, Haraneder-Monségur, et Haraneder-Geroliménéa.
Le premier, Joannis surnommé Putil, à cause de sa petite taille, était le troisième enfant et le premier fils de Martin. On le trouve souvent mêlé aux affaires municipales et il eut même quelquefois maille à partir avec les magistrats municipaux, sans que ce fût toujours sa faute, ainsi qu'on le constatera par la relation de l'incident suivant :
La population de la ville ayant beaucoup augmenté au XVIIe siècle, l'église paroissiale était devenue tout à fait insuffisante et, en 1649, la municipalité avait décider de l'agrandir. On avait commencé à reconstruire un mur mais les travaux avaient dû être arrêtés faute d'argent. Joannis, qui était clavier de l'église, proposa alors d'avancer 3 000 livres qui lui seraient remboursés sur les rentes et revenus provenant des sépultures et aumônes.
Son offre était des plus raisonnables et les jurats l'acceptèrent avec reconnaissance ; mais au lieu de tenir les engagements pris et de consacrer cette somme aux travaux auxquels elle était destinée, ils l'employèrent à d'autres buts et, en outre, ils destituèrent Joannis de ses fonctions de clavier. Joannis fut très vexé de semblables procédés et il porta plainte au sénéchal ; mais l'affaire traîna en longueur, à la suite des difficultés créée par les magistrats municipaux ; et le bayle de Lasson, cause présumée de l'indélicatesse commise, étant mort avant l'arrêt du sénéchal, Jeannot perdit patience. Il fit saisir la part de la veuve de Lasson sur un navire revenant de Terre-Neuve avec un important changement de morues.
Mme de Lasson à son tour, porta plainte contre Joannis et l'affaire devenait très compliquée lorsque le nouveau bayle, un cousin de Haraneder, intervint et arrangea les choses. Il fut entendu que les 3 000 livres prêtées à la commune lui seraient abandonnées aux deux conditions suivantes : un intérêt à 4% serait servi au donateur toute sa vie durant ; en outre, il obtenait la concession à tout jamais d'une sépulture dans l'église, au premier rang, près du choeur. Ainsi se termina un différend qui avait duré près de 10 ans.
Joannis Haraneder-Putil se maria en 1655 et eut 10 enfants qui n'eurent pas de descendance. Certains moururent en bas âge ; deux de ses fils, d'accidents et l'un dans des circonstances particulièrement tragiques. Il naviguait comme officier sur un navire appartenant à son oncle Jean-Péritz de Haraneder de Ciboure, ayant comme compagnon un de ses cousins, Jean d'Ascoube d'Etchégaray, lieutenant comme lui. Au mois d'Octobre 1702, leur navire revenait de Bilbao et se disposait à entrer dans le port, lorsque, poussé par la tempête sur les rochers qui bordent l'entrée de la Nivelle, il se perdit corps et biens, sous les yeux des parents et mais impuissants à porter secours au malheureux équipage. Un frère de ce jeune officier, marin comme lui, mourut aussi en mer au cours d'une campagne.
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FAMILLE HARANEDER BRANCHE PUTIL |
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