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lundi 5 juin 2023

L'INTERDICTION DES CORRIDAS À BAYONNE EN LABOURD AU PAYS BASQUE EN SEPTEMBRE 1895

L'INTERDICTION DES CORRIDAS À BAYONNE EN 1895.


A la fin du 19ème siècle, de nombreux débats ont lieu, en France, au sujet des corridas : autorisation ou interdiction.




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ARENES BAYONNE 1900
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet La Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, le 6 

septembre 1895 :



"Courses de taureaux.



Des courses de taureaux devaient avoir lieu dimanche dernier aux Arènes Bayonnaises avec Mazzantini et sa double cuadrilla. La location avait donné de brillants résultats. Environ 6 800 places étaient déjà retenues, et la journée s’annonçait sous les plus heureux présages quand on apprit que la fantaisie avait pris à M. Leygues, ministre de l’Intérieur, de contrarier toute une population en interdisant ces courses. 



L’arrêté concernant cette interdiction, pris le jeudi soir, 29 Août, en Conseil des ministres, a été signifié au Comité des Arènes le samedi soir. Il était bien temps, alors que plus de 25 000 francs de frais avaient été engagés déjà, alors que des trains de plaisir organisés en faveur de ces mêmes courses avaient écoulé déjà tous les billets disponibles, alors que Biarritz avait renoncé à ses courses de vélocipèdes au profit de la corrida bayonnaise, alors que nos hôtes, à qui déférence est due, avaient, en grand nombre, retenu leurs places pour Bayonne et renonçaient, en laveur des courses locales, aux courses de Saint-Sébastien aux quelles ils auraient tant voulu assister ! 



Il était bien convenable d’expulser de France, comme un vulgaire malfaiteur, un homme de mérite, un parfait caballero, Mazzantini, qui séjournait paisiblement au Grand-Hôtel, avec sa famille ! 



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TOREADOR MAZZANTINI 1903



Quelque orgueil que nous inspire notre qualité de Français, nous avons rougi dimanche, en présence des mesures arbitraires et ridicules qui ont été prises, nous avons rougi d’être les administrés de l’actuel et probablement éphémère ministre de l’Intérieur français. 



En vain le Comité des Arènes, la Municipalité de Bayonne, le député Lafont, le sénateur Haulon, le sous-préfet, le préfet, ont exposé au ministre les inconvénients d’une mesure tardive et odieuse, le préjudice matériel et moral fait à notre région, et demandé un sursis pour l’application de la loi, M. Leygues s’est contenté de s’offrir une angine imaginaire et de n’accorder au surplus aucune satisfaction. 



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GEORGES LEYGUES
MINISTRE INTERIEUR 1895



Le dimanche matin, les troupes ont été consignées, les arènes gardées militairement, la gendarmerie mobilisée, Mazzantini et ses picadores expulsés, la population dupée, et, en présence de ces circonstances, la municipalité et le Conseil municipal tout entier ont démissionné et adressé, au sous-préfet, la lettre qui suit : 



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TOREADOR MAZZANTINI ET PICADOR A TERRE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Monsieur le Sous-Préfet de Bayonne, 


Le Maire de Bayonne, ses adjoints, les membres du Conseil Municipal, réunis aujourd'hui, ont décidé de donner leur démission et vous prient de la transmettre à qui de droit. 


C’est pour eux le seul moyen légal de protester contre l’interdiction des courses de taureaux qui étalent, depuis longtemps, fixées au 1er Septembre. Ils n’ont pas à se prononcer sur les questions administratives ou légales des Courses, mais ils ne sauraient admettre une interdiction tardive et intempestive, compromettant les intérêts de la ville de Bayonne ; ils ne sauraient admettre, non plus, que les démarches pressantes de la municipalité, des sénateurs et députés n’aient pu aboutir à une tolérance pratiquée depuis longtemps. 


La population bayonnaise, légitimement froissée d’une mesure tardive qui l’atteint dans ses intérêts et dans sa dignité, attend, de ses conseillers municipaux, la seule protestation qui lui soit possible : la démission. 


Ils vous prient d’agréer, etc. 


Ont signé : Tous les Conseillers municipaux. 



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ARENES BAYONNE 1900
PAYS BASQUE D'ANTAN



De son côté le Comité des Arènes faisait afficher la proclamation suivante :


Bayonnais et Biarrots, 


Vous avez appris, avec stupeur et indignation, l’inqualifiable mesure de police qui vient d’être prise. 


Nos arènes sont fermées gardées par la force armée. Nos Courses de taureaux sont interdites. Des étrangers honorables sont expulsés comme des malfaiteurs, alors qu’ils n’ont commis aucun délit en France, alors qu’ils n’y doivent occasionner aucun trouble. 


En supprimant nos courses, le Gouvernement, qui nous ruine par son système économique, tarit, pour nous tous, une source de légitimes bénéfices. 


C’est ce même Gouvernement qui autorise le baccarat, qui autorise les courses de chevaux, souvent suivies de mort d’homme, qui autorise enfin la chasse aux faisans, les tirs aux pigeons et les combats de coqs, où l’immoralité des sévices exercés contre des animaux indiscutablement domestiques s’aggrave de l’immoralité des paris engagés. 


Il agit contre toute légalité, les spectacles de l’arène n’étant ni attentatoires aux mœurs, ni susceptibles de provoquer des conflits et des désordres. 


Non seulement il use ici d’arbitraire, mais encore il se rend coupable d’une duperie. Par son ministre des travaux publics, il autorise des trains de plaisir à l’occasion de ces mêmes courses de taureaux qu’il fait interdire par son ministre de l’intérieur. 


Notre droit est clair. Restons calmes. Tous ceux qui ont reçu de nous un mandat public sont avec nous, décidés à se faire les artisans de nos revendications. Il y a toujours une heure pour la justice. 


Le Comité. 



Le soir, la foule très animée était nombreuse autour de la Mairie, plus méprisante qu’agressive, malgré les nouvelles connues sur les courses de taureaux qui avaient eu lieu à Arles et ailleurs. Mais ce n’était pas assez du ridicule et de l’arbitraire, il a fallu que l’odieux s’en mêlât sous forme de charge de gendarmerie. 


Nous ne voulons pas insister sur les détails de troubles provoqués par l’excès des mesures policières et qui ont eu lieu dans la soirée de dimanche, ni sur le vacarme des nuits de lundi et mardi. 



Ce que nous voulons en retenir, c’est que le ministre de l’Intérieur au lieu de sauvegarder l’ordre public, l'a compromis, et que toute responsabilité doit, en toute justice, être rejetée sur lui. Et pour juger ainsi il n’est pas besoin d’être un fanatique de la tauromachie, car quelque avis que l’on professe sur les courses de taureaux, on est bien obligé de convenir que toute solution eût été admissible, toutes sauf la solution sans aucun bon sens, à laquelle s’est arrêté M. Leygues."






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