L'AFFAIRE STAVISKY ET BAYONNE.
C'est une crise politico-économique qui secoue la France à la fin de décembre 1933, mettant en cause de nombreuses personnalités y compris en Pays Basque Nord.
Comme je vous l'ai indiqué précédemment, puisque nous sommes samedi, voici un autre article
sur le "feuilleton" de l'affaire Stavisky et ses répercussions au Pays Basque.
Voici ce que rapporta à ce sujet la Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays basque, le 18 janvier
1934 :
"L’enquête sur le Crédit de Bayonne et l’affaire Stavisky semble réserver encore des surprises.
L’état de l’instruction à Bayonne. - L’enquête de Chamonix.
Hier, au cours de la perquisition opérée chez M. Garat, un dossier qui parait relatif à l'affaire a été saisi. Que contient-il ? C'est ce que nous ne saurons peut-être pas tout de suite.
Mais ce qu'on brûle de savoir, c’est ce que contient la lettre "testamentaire" de Stavisky et qui mit si longtemps à parvenir au juge d'instruction.
Il est curieux, en effet, de constater que tous les éléments d'accusation qui présentent un intérêt certain, sc promènent quelque part et qu'on n'en parle à Bayonne que par ouï-dire.
L'instruction a encore tant de points importants à élucider, tant de documents à examiner, tant de compromissions à découvrir ! Mais si le juge ignore tout des chèques de Stavisky saisis à Paris, il ne connaît rien non plus de la destination des millions de bijoux expédiés la veille de l’arrestation de Tissier.
Mais à présent, sans doute, va-t-il recueillir quelques précisions, que le public pourra connaître à son tour, il faut croire.
A Bayonne.
L’état de l'instruction.
Si à Bayonne l'instruction de l’affaire du Crédit municipal est entrée, momentanément du moins, dans une période plus calme, d’où les coups du théâtre sont exclus, elle continue cependant à progresser et M. d’Uhalt mène toujours l’information avec autant de précision.
JOSEPH GARAT MAIRE DE BAYONNE PAYS BASQUE D'ANTAN |
La perquisition chez M. Garat.
Hier après-midi, le juge d'instruction, accompagné de M. Steg, substitut du procureur, de M. Sicre, son greffier et de deux témoins, un employé de la mairie, et un inspecteur de la Sûreté, a procédé à une enquête au domicile de M. Garat.
Un dossier a été saisi qui parait être relatif à l’affaire et qui sera examiné très prochainement.
Les chèques de Stavisky.
Ce matin, M. d’Uhalt a reçu de Paris les talons des chèques émis par Stavisky. Un certain nombre de ccs chèques étaient payables au porteur, mais plusieurs d'entre eux portent des noms.
M. d’Uhalt enverra à Paris des commissions rogatoires afin que les bénéficiaires soient interrogés. Nous croyons savoir qu’aucun chèque n’a été émis au bénéfice de personnalités de notre région.
Les demandes de mise en liberté provisoire.
Demain matin à 10 heures, la chambre du Conseil statuera sur la mise en liberté de Darius. M. Camille Aymard sera appelé devant la même chambre vendredi à 10 heures.
PIERRE DARIUS DIRECTEUR JOURNAL BEC ET ONGLES AFFAIRE STAVISKY 1934 |
CAMILLE AYMARD DIRECTEUR LA LIBERTE PHOTO DE L'AGENCE MEURISSE |
Les valises et la lettre du mort.
Demain après-midi les caisses contenant les objets trouvés dans la chambre de Stavisky, à Chamonix, seront ouvertes, ainsi que la lettre testamentaire de l’escroc que M. d'Uhalt fera photographier et examiner par un expert en écritures. L’original de la lettre sera remis à Mme Stavisky.
Les documents saisis chez M. Garat, à Paris.
Les documents saisis au domicile parisien de M. Garat ne paraîtraient pas présenter un intérêt immédiat. Ils seront envoyés à Bayonne afin d’y être examinés.
Les bijoux disparus.
En ce qui concerne les bijoux envoyés à Stavisky par Tissier, la veille de son arrestation, on compte sur les déclarations de l’ancien directeur du Crédit Municipal pour savoir ce qu’ils sont devenus.
L’appréciateur qui doit venir de Paris examinera les six cent dix boites de bijoux en présence des déposants.
Les interrogatoires.
Le prochain interrogatoire de Darius aura lieu le 20 janvier à 14 heures.
M. d'Uhalt fixera la date de celui du député Bonnaure après s’être entendu avec Me de Moro-Giafferi, son défenseur.
Le juge d’instruction ne verra Mme Stavisky que si elle vient à Bayonne pour chercher les objets ayant appartenu à son mari à moins qu’auparavant une confrontation ne soit jugée nécessaire entre l’un des accusés ou des témoins et la femme d'Alexandre.
Neuf mois d’expertise !
Le dossier sera envoyé au parquet général de Pau vendredi.
M. d’Uhalt estime que le travail d'expertise durera environ neuf mois.
"Le charme d'Alexandre".
M. d’Uhalt a procédé ce matin, en présence des défenseurs, à l’ouverture des deux caisses contenant les valises de Stavisky, contenant entre autres choses une pelisse.
Et de tout cela se dégagea une odeur subtile, prenante...
Ce qu’un parfumeur eût pu lancer sous l'étiquette : le charme d’Alexandre.
M. Sadron à Paris.
M. Sadron, receveur des finances de Bayonne, qui eut à contrôler la comptabilité de Tissier, et fournit l'été dernier deux rapports sur la gestion financière du Crédit municipal, a été convoqué au ministère des finances. Il est parti d'urgence pour Paris.
L’amie de Tissier ne sera pas inculpée.
On laissait hier courir le bruit que Mlle Mathilde Sabatier, amie de Gustave Tissier, pourrait être inquiétée par la justice.
Mercredi encore, aucune décision semblable n’avait été prise.
Des sanctions.
Nous reproduisons sous toutes réserves, cette dépêche de Paris :
Paris. 18 janvier. — Le prochain conseil des ministres qui aura lieu lundi, examinera les sanctions que proposera M. Chautemps, à la suite des rapports sur les enquêtes administratives dont ont été chargés de hauts fonctionnaires.
Un haut magistrat du parquet serait atteint par ces sanctions, ainsi que le préfet des Basses-Pyrénées, M. Mireur, un haut fonctionnaire du ministère du commerce ; un autre directeur au ministère du travail, et plusieurs fonctionnaires de la préfecture de police et de la Sûreté générale.
Le parquet de la Seine et Bayonne.
Enfin, La Liberté émet ces réflexions : On a pu s’étonner de la décision prise dimanche soir par M. d’Uhalt concernant la libération de M. Camille Aymard.
Le samedi, en effet, après l’interrogatoire de M. Aymard, le juge d’instruction indiquait dans un communiqué quel était son sentiment : il développait longuement les moyens de défense de l’inculpé qu’il venait d’interroger, sans insister le moins du monde sur les charges relevées par l’instruction.
Et, le lendemain, ce fut le rejet de la requête de Me Freyssenge !
Que s'était il donc passé ? C’est bien simple : la pression du Parquet de la Seine s’était exercée, comme le mercredi précédent.
Le mardi soir M. Ordonneau avait entendu l’un des secrétaires "boxeurs", de Stavisky, Romagnino. Celui-ci avait accusé M. Aymard. Le lendemain, M. Fontaine téléphonait à Bayonne et, immédiatement, deux mandats étaient lancés, l’un contre M. Aymard, et l’autre demandait la levée de l’immunité parlementaire du député Bonnaure.
Après mais après seulement, M. Ordonneau put entendre M. Aymard à titre de témoin.
Et le jeudi, on apposait les scellés sur son appartement.
Maintenant, le parquet de la Seine intervient encore ; il faut faire déclarer qu’en l’état actuel de l’instruction, la libération provisoire ne peut être prononcée, car l’enquête n’est qu’à son début :
— On n'a pas encore perquisitionné dans l’appariement scellé, déclare Paris à Bayonne, et à Pau, la Chambre, des mises en accusation ne peut donc libérer, sans savoir ce que l'on va trouver chez M. Aymard.
— Alors, pensez vous, on va perquisitionner immédiatement et l'on sera fixé.
Pas le moins du monde. Le parquet de la Seine n’est pas pressé, bien au contraire. Il attend l'arrêt de Pau pour que celui-ci soit un arrêt de confirmation de l’ordonnance de rejet.
Des démissions probables au Conseil municipal.
Nous publions d’autre part une lettre ouverte à MM. les conseillers municipaux.
Noua croyons savoir que plusieurs démissions sont imminentes.
Combien fâcheuse sera la situation de ceux qui resteraient les derniers.
M. Bonnaure exclu des Jeunesses laïques et républicaines.
La Commission exécutive de la Fédération nationale des Jeunesses laïques et républicaines de France, réunie le 14 janvier 1934, en assemblée plénière, a voté l'ordre du jour suivant :
"L'assemblée, ayant pris connaissance des accusations portées contre son président d’honneur, Gaston Bonnaure, considérant que les leaders d’un parti politique ou d’un groupement doivent être inattaquables si l'on ne veut pas que le discrédit public atteigne ce parti ou ce groupement ; considérant que, quel que soit le résultat des poursuites judiciaires intentées contre Gaston Bonnaure, il n’en reste pas moins, dès maintenant moralement condamné ;
Exclut purement et simplement Gaston Bonnaure de la Fédération nationale des Jeunesses laïques et républicaines."
DEPUTE GASTON BONNAURE PHOTO AGENCE MONDIAL |
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