L'AFFAIRE FINALY AU PAYS BASQUE EN 1953.
En ce début d'année 1953, sans atteindre les proportions de l'affaire Stavisky, l'affaire Finaly fait tout de même de Bayonne une des capitales mondiales du fait divers.
Je vous ai déjà parlé de cette affaire dans plusieurs articles précédents, le 5/07/20, le 5/08/20, le
5/09/20 et le 5/10/20.
Voici ce que rapporta le journal Carrefour, dans son édition du 25 mars 1953, sous la plume
de Charles Favrel :
"Une déclaration exclusive de l'Abbé Aritzia : Ce sont les enfants Finaly qui m'ont demandé de les enlever".
Bayonne 24 mars.
— Ce jour-là, dans le tête-à-tête du cabinet d’instruction de Bayonne, deux hommes s'affrontaient dans un débat passionné, opposant deux convictions contradictoires du devoir. Le premier représentant la société et la justice, parlait de légalité. Le second répondait au nom des droits spirituels de la personne humaine.
Celui-ci, l’abbé Latxague, professeur de morale au grand séminaire de Bayonne, se rendant compte que ce dialogue de sourds risquait d’égarer pour longtemps la procédure, usa soudainement d’un argument qui laissa sans souffle son adversaire obstiné :
— Je pourrais vous dire qui m'a demandé de participer à l'enlèvement des enfants Finaly, mais je ne vous le dirai pas.
Remis de son émoi, le juge envoya son contradicteur en prison où il retrouva celui qu'il protégeait et à qui le juge n'avait accordé qu’un rôle de comparse. Aujourd’hui que l’affaire basque est décantée, il est enfin possible de révéler que le personnage qui a été au centre de l'affaire n'est pas l’abbé Latxague, mais l’abbé Aritzia, le fougueux directeur des Œuvres de jeunesse du pays basque.
CURES BASQUES AFFAIRE FINALY 1953 PAYS BASQUE D'ANTAN |
"J'ai été interpellé par deux gosses".
Sitôt libéré, l'abbé Aritzia s’en est allé faire retraite, car il se sentait un besoin de calme et de silence pour voir clair en sa conscience, comptable de deux ou trois mensonges.
Et c’est parce que nous voulions lui demander les raisons de ces deux ou trois mensonges- là que nous avons sonné, ce dimanche, a la porte de la maison de repos des ecclésiastiques, aménagée dans les communs de l’ancien château de Poyanne, dans les Landes.
— Ce n'est pas deux ou trois mensonges que le juge pourrait me reprocher, nous dit-il. C'est au moins cinq ou six, car j'ai donné de l’affaire cinq ou six versions différentes, mais il n’y a pas mensonge quand on est contraint et forcé de dire certaines choses pour éviter d'en dire d’autres.
— Ce qui pourrait signifier, remarquons-nous, que, parlant aujourd'hui sans contrainte d'aucune sorte, vous allez établir une vérité définitive ?
— Exactement ! approuve d’un éclat de rire l'abbé Aritzia. Donc, sachez que c’est à moi que les enfants Finaly se sont adressés en premier, après leur fuite de Saint-Louis de-Gonzagues. Au moment où j'allais pénétrer dans les couloirs de la J.O.C., dont les locaux sont situés devant la cathédrale, je fus interpellé par deux gosses : "Cachez nous, monsieur l'abbé", me demandèrent-ils.
FRERES FINALY 1953 PAYS BASQUE D'ANTAN |
"C'est toujours à la frontière qu'on pense".
Les ayant considérés avec curiosité, je les fis monter dans mon bureau où je les interrogeai. Ce nom de Finaly ne me disait pas grand-chose, car j'avais lu très superficiellement leur histoire dans la presse.
Fort embarrassé et ne sachant trop quelle conduite tenir vis-à-vis de la justice, mais aussi vis-à-vis des autorités ecclésiastiques, je décidai de prendre conseil de mon ami l’abbé Latxague, qui s'y connaît en loi morale.
Après un examen de la situation, nous décidâmes d'agir seuls puisque le vicaire général de l'évêché et l'abbé Silhouette, directeur du collège, avaient engagé leur parole devant le procureur.
Nous ne voulions connaître que l'impératif "cachez-nous" qui avait été le premier cri des enfants. Ceux-ci n'avaient qu'un désir : revenir auprès de leur mère adoptive, Mlle Brun. Mais il ne pouvait en être question pour l’heure et, pour moi, la meilleure façon de les cacher, c’était de leur faire passer la frontière. Quand on est du pays, c'est toujours à la frontière qu'on pense dès qu'il s'agit de se mettre à l'abri.
Le plan de départ fut donc préparé et exécuté dans les conditions que l'on sait. Dès leur arrivée en Espagne, les enfants s’inquiétèrent de savoir s’ils pourraient écrire à Mlle Brun et recevoir de ses nouvelles. Leur ayant montré le journal qui parlait de son hospitalisation, je leur fis comprendre qu'il serait nécessaire d'attendre un certain temps et je les laissai au couvent de Lascano.
Le prieur les reçut avec enthousiasme et simplicité. Quand je lui laissai entendre que leur hébergement nécessiterait des frais et qu’il m'était impossible de dire quand et comment il pourrait en être remboursé, le prieur se récria : "Ne vous inquiétez pas" d'un pareil détail. Il ne saurait être question de cela. A partir de l'instant où vous nous les confiez, c’est à nous d'assurer leur sécurité et leur entretien.
L'AFFAIRE FINALY 1953 DANS LE JOURNAL RADAR |
"J'ai perdu leur trace".
Les circonstances ont fait que les enfants ont quitté Lascano. J’ai perdu leur trace et aucun accord ne sera valable tant que ceux qui en ont actuellement la garde ne seront pas consentants à leur retour.
Une chose pourtant est sûre : la décision qui sera prise regardant l’avenir immédiat des enfants le sera en fonction de leur volonté et en vue de leur bonheur.
C'est ce sentiment qui nous a guidés et dont nous entendons ne pas nous départir."
AFFAIRE FINALY 1953 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire