Libellés

dimanche 3 décembre 2023

L'AFFAIRE PORTAGO AU PAYS BASQUE EN FÉVRIER 1938 (quatrième partie)


L'AFFAIRE PORTAGO EN FÉVRIER 1938.


En février 1938, en pleine guerre civile espagnole, éclate au Pays Basque Nord "l'affaire Portago".



pays basque autrefois guerre civile espagnole franquistes espions marquis
MARQUIS DE PORTAGO 1938


Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien Le Populaire, dans son édition du 12 février 1938, 

sous la plume de Jean-Maurice Herrmann :



"Le complot C.S.A.R. Trois nouvelles arrestations.



Depuis plusieurs mois on avait découvert de nombreux uniformes de miliciens du C.S.A.R. : vestes de cuir, culottes de cheval. Sur le terrain de Vincennes, place de la Nation, rue Saint-Lazare, rue La-Quintinie, c'est par centaines que ces équipements étaient entreposés dans l'attente du jour J.



On Se souvient que dès les premières trouvailles la police judiciaire avait établi l'origine des vestes de cuir. Elles provenaient des établissements Simplex, 12. rue Béranger, dirigés par un Arménien nommé Joseph Aslangul, âgé de 47 ans. Celui-ci avait déclaré avoir vendu environ 1 100 de ces vestes pour l'armée rebelle espagnole par l'entremise d'un certain Dequeker.



Devant la quantité de vestes existant dans les dépôts du C.SA.R. et après vérification du poids des colis expédiés à Saint-Sébastien, Aslangul fut à nouveau interrogé. Il dut reconnaître qu'il avait menti et fut mis en état d'arrestation. \



Fin juillet dernier, un de ses amis, René Pélissier, fabricant de produits à polir, 18, avenue de Joinville, à Nogent-sur-Marne, l'avait présenté à un certain M. Labuche, c'est-à-dire Jacques Corrèze, Une commande de 1 500 vestes de cuir et de 500 culottes, pour un total de 105 000 francs, fut passée. Elle fut livrée par échelon, à la demande des clients, jusqu'au 15 octobre, au fur et à mesure de la constitution des dépôts.



Cette vente n'avait pas figuré sur la comptabilité régulière d'Aslangul, mais seulement sur son livre personnel qui a été retrouvé.



Arrestation de Pélissier.



Plusieurs perquisitions ont eu lieu chez René Pélissier, ainsi que dans les ateliers et bureaux qu'il possède 8, impasse Daunay, 7, rue du Grenier-Saint-Lazare et 75, rue Beaubourg. Des documents ont été saisis.



René Pélissier et son frère André ont été conduits quai des Orfèvres où ils étaient encore entendus hier soir. On dit que René Pélissier était chef de division du C.S.A.R.



Finalement il a été déféré à M. Béteille, tandis que son frère était remis en liberté.



Arrestation du chef de bataillon Durand.



D'autre part, l'enquête sur l'affaire des bacilles avait permis d'apprendre que, sous la direction de l'ingénieur Roidot, les conjurés s'exerçaient à tirer au fusil-mitrailleur allemand dans une carrière des environs de Paris.



Plusieurs d'entre eux avaient prêté serment ou assisté à des réunions dans les locaux de la fabrique de biscottes de M. Durand, 32, rue Damesme. C'est dans la camionnette de Durand qu'ils avaient été conduits au "champ de tir".



Après vérification, la police judiciaire a arrêté hier matin, sur mandat de M. Béteille, Roger Durand, né le 17 juin 1911, qui était chef de bataillon dans l'armée fasciste de guerre civile.



Georges Cachier, dit Fontaine, est confronté avec le témoin Bourlier, qui précise les attributions du chef de la 3e brigade du C.S A.R.



Le chef de la 3' brigade du C.S.A.R., Georges Cachier, lieutenant-colonel de réserve, a été confronté hier par le jugé Béteille avec le témoin Thomas Bourlier qui, décidément, occupe la vedette, à l'instruction, depuis quelques jours.



Thomas Bourlier a rencontré chez Georges Cachier, Eugène Deloncle, Duseigneur et un certain Gautier, dont nous aurons peut-être à reparler quelque jour. Il décrit l'appartement. Mais l'inculpé le trouve en défaut.


— J'habite au 16 et non au 11 bis, rue du Colonel-Bonnet, dit-il, et je n'ai jamals eu ma photographie en commandant de chasseurs à pied sur mon piano.


— Le fait remonte à octobre 1936, répond le témoin, j'ai pu commettre quelques erreurs de détail. En tout cas, il est certain que Cachier était bien chef de la Se brigade du C.S.A.R.


— Je ne connais pas le C.S.A.R., soutient Cachier, et je n'aurais pas eu les loisirs suffisants pour remplir ces fonctions. Le témoin fait des déductions fantaisistes, mais ne peut apporter aucune preuve de ce qu'il dit.


— Alors je vais préciser, riposte Bourlier. Quand je suis allé chez Cachier, j'ai été chargé de faire au cadre supérieur du C.S.A.R. quatre conférences sur l'organisation du terrain dans l'offensive et l'utilisation des explosifs. Cachier devait traiter d'autres sujets. Son nom de guerre était Fontaine.

 


L'inculpé essaie de répliquer. Son argument est piètre. D'après lui, Bourlier, officier du génie, n'aurait pas eu la compétence nécessaire pour parler des combats de rue.



Il reconnaît avoir pris le surnom de Fontaine. Mais c'était, dit-il, pour faire le départ entre ses fonctions "civiles" et son action politique.



Sans doute, aussi, nous avons déjà eu l'occasion de le dire, par raison de bienséance et pour éviter des sourires désobligeants.



Cachier, pardon ! Fontaine déclare qu'il a uniquement conféré sur l'anticommunisme et qu'il n'avait jamais vu Bourlier avant d'être confronté avec lui  ce qui excite chez le témoin une hilarité inextinguible,.



Après quoi, l'inculpé Cachier, dit Fontaine, a été reconduit à la Santé.



histoire guerre civile espagne portago cagoule franco
COLONEL CACHIER ET COLONEL BENOIT
LE POPULAIRE 10 FEVRIER 1938


Trafiquants d'armes ou simples malfaiteurs ?

Les 1 000 fusils-mitrailleurs Schmeisser "vendus" par Amédée Pelletier existent-ils, ou ne servaient-ils que d'appât à une victime éventuelle ?



Rochefort, 11 février.  Les trois individus arrêtés hier : Amédée Pelletier (né le 11 septembre 1908 à St-Georges-d'Oléron, agent d'assurances) ; André Munn, (né le 9 octobre 1907 à Bar-le-Duc, marchand forain) et Henri Goujon (boucher, né le 20 janvier 1909, à Nanterre) tous trois domiciliés à Paris, étaient-ils des trafiquants d'armes ou des escrocs ?



Ils étaient surveillés depuis deux mois par la Sûreté Nationale qui les soupçonnaient de vendre des armés et des munitions de contrebande.



C'est dans les environs de la gare Saint-Lazare, à Paris, que l'inspecteur Bernol, qui parle couramment l'espagnol, fit connaissance d'un Espagnol qui le prit pour un compatriote franquiste et qui lui offrit de le mettre en rapport avec des vendeurs d'armes.



M. Bernol accepta et fut conduit dans un appartement rue de Rome, où trois individus lui dirent qu'ils pouvaient livrer tout de suite un million de cartouches et 1 000 fusils-mitrailleurs.



Par la suite, ils lui présentèrent celui qui traiterait la livraison : Pelletier.



Le marché traité, l'un et l'autre se retrouvèrent à Rochefort. Le soi-disant Espagnol  M. Bernol  grâce à M. Rouil, commissaire de police de Rochefort, avait en mains un chèque de quatre millions 780 000 francs, tiré sur une banque de la ville, et à sa disposition deux camions pour recevoir les armes.



"Pour les commodités de la discussion", Pellettier proposa à son interlocuteur de discuter dans la voiture de celui-ci, une auto de la police judiciaire dont le numéro avait été maquillé, et au volant de laquelle se tenait l'inspecteur Deluc. Plusieurs inspecteurs de Paris et de Bordeaux, sous la direction de M Fougerit, chef de section à la police judiciaire, à Paris, se tenaient dans les environs.



Mais Pelletier prit ses précautions. Il convoqua "l'acheteur" dans un hôtel de Rochefort.


 Etes-vous en mesure de payer, lui dit-il ? Si oui, prouvez-le moi ou j'abandonne immédiatement les négociations.



Ainsi mis en demeure, l'inspecteur dut brusquer les choses. Il se jeta sur son interlocuteur, le ceintura et lui passa les menottes...



Pelletier était porteur de deux mitraillettes et d'un browning, tout comme son complice Munn, qui fut arrêté à son tour quelques instants plus tard par le commissaire Fougerit, de la Sûreté Nationale qui dirigeait les opérations.



Henri Goujon, lui, réussit à bousculer les inspecteurs qui allaient l'appréhender et à prendre la fuite en auto. A Surgères, il passa au travers d'un barrage de gendarmes mais il ne devait pas aller plus loin que Niort.



Aucune trace des armes.



Jusqu'ici la trace des 1 000 fusils-mitrailleurs et du million de cartouches que Pelletier devait livrer dans les environs de Rochefort, n'a pu être retrouvée.



Interrogé, Pelletier, qui paraissait être le chef de l'expédition, avait déclaré qu'il n'était qu'un "courtier". A un endroit qu'il avait désigné, une perquisition a eu lieu. Elle n'a pas permis de découvrir d'armes.



Et l'on se demande alors si les trois compères ne cherchaient pas à attirer un "amateur" dans un guet-apens pour le dévaliser et, peut-être, l'assassiner.



Mais il est tout aussi vraisemblable de penser que Pelletier et ses complices "travaillaient" bien pour le compte de trafiquants dont les chefs seraient à Paris.



Une demi-douzaine de perquisitions sans résultats ont eu lieu hier soir dans la région parisienne. Il semble probable, dit-on, que certaines des personnes qui en ont été l'objet aient naguère détenu des armes.



guerre civile espagnole pays basque autrefois espions assassins
ARRESTATION DE NEILA FEVRIER 1938
PHOTO POLICE MAGAZINE


Les mystérieuses affaires de Bayonne.

Neila est inculpé de recel.



Bayonne, 11 février.  M. Bannel, juge d'instruction, a procédé, cet après-midi, à l'ouverture des bagages du marquis de Portago, en présence de l'inculpé et d'un de ses avocats, Me Latzague.



Les lourdes malles ont été fouillées minutieusement. Elles ne contenaient que la garde-robe de M. de Portago. Toutefois, quelques lettres et des médicaments ont été saisis.



A 16 heures, le marquis de Portago regagnait sa prison. Demain matin, M. Bannel entendra la femme de Neila, puis le magistrat remettra la suite de ses interrogatoires à lundi.



Et l'analyse des ampoules ?



M. Mondanel a déclaré hier soir aux journalistes que la Sûreté n'avait pas encore reçu le scellé contenant une des ampoules saisies, ni la commission rogatoire en prescrivant l'analyse.



La justice ne semble pas pressée de savoir la vérité sur un détail pourtant capital !



L'étrange figure de Neila.



On s'occupe surtout beaucoup  est-ce pour faire diversion  du nommé Neila dont nous avons hier annoncé l'arrestation.



Des déclarations faites au juge d'instruction il ressort que Neila, qui est âgé de 41 ans, exerçait la profession de marchands de tissus à Santander. Au cours de la révolution il fut nommé commissaire de police de cette ville. A la veille de la prise de Santander, il se réfugia en France, à bord d'un bateau, et débarqua à Bayonne pour de là se rendre à Valence.



De retour en France quelques jours après, il s'installa, avec sa femme et ses enfants, une fillette de 16 ans et un garçonnet de 14 ans, dans une villa située à Anglet, près de Biarritz, où il fut découvert et arrêté par la police spéciale. Neila a été trouvé porteur de plusieurs passeports à des noms différents. Toutefois, sa véritable identité a été établie.



L'ancien commissaire de police de Santander n'a pu fournir aucune indication sur les bijoux et valeurs trouvés à son domicile au cours de la perquisition opérée par le commissaire de police Tourret. Il a été mis en état d'arrestation, sous l'inculpation de recel, et écroué à la prison de Bayonne.



Au cours d'une communication qu'il a faite aux journalistes, M. Bannel, juge d'instruction, a déclaré que l'inculpation de Neila n'avait aucun rapport, avec l'affaire du marquis de Portago. Toutefois on assure à Bayonne que les nationalistes espagnols cherchaient à s'emparer de l'ancien policier pour le conduire en Espagne nationaliste afin de le faire déférer en jugement.



Ils lui attribuaient de nombreuses exécutions, notamment celle d'un jésuite. D'autre part le bruit court que Neila ne serait pas sans responsabilité au sujet de la mort, en Espagne, du journaliste français Pierre Plessis. 



Il est à remarquer que Neila, contrairement aux milliers de miliciens basques et asturiens qui ont réussi à échapper à Franco s'est bien gardé d'aller prendre du service en Espagne gouvernementale. Au contraire, il n'y a fait qu'un très bref séjour, lorsqu'il y fut conduit après son arrivée en France et revint en toute hâte se fixer à Biarritz, loin de toute activité guerrière.



L'énergique répression exercée par le gouvernement républicain envers les responsables de quelques excès commis au début de la guerre civile, alors que tous les efforts des autorités étaient tournés vers la résistance à l'ennemi, n'a peut-être pas été étrangère à cette désertion."



A suivre...


 

Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

Plus de 5 500 autres articles vous attendent dans mon blog :

https://paysbasqueavant.blogspot.com/


N'hésitez pas à vous abonner à mon blog, à la page Facebook et à la chaîne YouTube, c'est gratuit !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire