Libellés

vendredi 10 février 2023

LE PAYS BASQUE EN OCTOBRE 1922 (première partie)

LE PAYS BASQUE EN 1922.


Le Pays Basque, depuis très longtemps, est une terre de voyages pour touristes et/ou journalistes.



pays basque autrefois casino labourd
CASINO MUNICIPAL BIARRITZ 1922
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet l'hebdomadaire La Revue Politique et Littéraire, le 8 octobre 

1922, sous la plume d'André Rousseaux : 



"Le Pays Basque.


Parmi toutes nos belles provinces françaises, il n en est peut-être pas une qui soit demeurée, plus que le pays basque, indépendante, et jalouse de ses traditions conservées.



C'est le propre des provinces qui touchent les frontières, de garder ainsi le charme de leurs coutumes et la force de leur caractère. Les provinces limitrophes sont les derniers fleurons de la couronne ; et si elles se sont données de tout cœur à la patrie, du moins gardent-elles la fierté de leur consentement. On pourrait presque dire que leur amour est celui d’une épouse plutôt que d’une fille. Et puis, il y a plus de paix, au cœur du pays. Il semble que ce soit là le foyer où travaille tranquillement la famille. Mais aux portes de la nation, l’étranger est en vue. Une frontière, c’est souvent la perspective d’une guerre ; c'est toujours une barrière où s’élèvent des postes de défense ; c’est le champ de combat des douaniers et des contrebandiers. Là se tiennent, comme des vigies, des races énergiques. les Lorrains, les Alsaciens, les Savoyards ; les Basques aussi, plus heureux que bien d’autres, grâce à la paix de deux siècles déjà que leur a assurée la politique de Louis XIV, mais qui n'ont pas laissé sommeiller, dans cette quiétude, les vieilles qualités de leur belle race.



pays basque autrefois frontiere labourd guipuscoa
PONT BEHOBIE 1922
PAYS BASQUE D'ANTAN



Le charme du pays basque tient peut-être essentiellement à sa place un peu étrange, à cheval sur une frontière et sur une chaîne de montagnes, au bord mystérieux du golfe profond où ces monts s’engloutissent. La Catalogne tient une place semblable à l’autre bout des Pyrénées. Car les montagnes ne séparent pas les peuples. Les limites profondes, où finissent les provinces et les Etats, ce sont les eaux, les fleuves et les mers. Les monts gardent, sur leurs deux versants, jusqu’au fond de leurs plus étroites vallées, presque jusqu'à leurs cimes, de vieilles races dont on a peine à retrouver l’origine, attachées au sol escarpé, qui ne font place à des hommes différents que dans la plaine où le torrent s’assagit. Quand le pays d’un tel peuple s’arrête à la mer, il est plus mystérieux encore. Ainsi ces Pyrénées qui plongent dans le golfe de Biscaye. Elles ne dressent plus la barrière, au front haut et droit du Marboré ou de la Maladetta. Mais elles ne s’abaissent pas en humbles contreforts. Il semble que la fierté rehausse leur petite taille. La Rhune, quand le soir la teinte d’améthyste, grandit dans l'ombre qui noie déjà sa base. Après elle, c est bien une chaîne qui poursuit vers l’Ouest sa cavalcade de sommets. L’Océan est là, qui la guette. Elle lui échappe. Elle fait un écart vers le Sud. Par les matins clairs, vous la verrez filer encore bien loin, en une longue bande bleue, au delà du golfe qu’elle embrasse. L'Océan n’a pas pu dévorer la chaîne cantabrique ; sa rage écume sur les rochers de Biarritz et sur la montagne de Fontarabie.



pays basque autrefois port fort labourd
FORT ET PORT DE SOCOA 1922
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les grands rochers inclinés, tout ébréchés par les flots, gardent sous les assauts de la mer, l'aspect feuillets qu'ils doivent aux vieux plis de la terre. Ils témoignent que cette écorce dont ils font partie continue, sous l'eau, à se dérouler vers des abîmes inconnus. Ils mettent sous les yeux le mystère de la séparation de la terre et des eaux. La terre, comme Vénus, surgit-elle un radieux matin de l'Océan, ou quelque curieux raz de marée a-t-il recouvert, en une nuit de terreur, de fertiles pays qui s’étendaient jadis jusqu’à cet horizon ? Nous touchons au problème de l’origine du peuple basque. D'aucuns ont imaginé qu’ils étaient réfugiés au fond de ce golfe, sur les dernières terres épargnées par les flots, le vestige tenace d’un peuple englouti, les derniers habitants de l’Atlantide.



Car on ne sait rien des Basques. Nul n’a percé le secret de leur naissance. Il a fallu se résoudre à les dire autochtones, c’est-à-dire renoncer à connaître depuis quand les porte le sol où on les a toujours vus attachés. Leur langue, loin de renseigner les chercheurs, les a déroutés un peu plus. Elle est seule de son espèce, elle ne se classe dans aucune famille. Tout ce qu’on sait, c’est qu’elle est aussi vieille que ceux qui la parlent, les ancêtres de ces bouviers et de ces pêcheurs, qui furent peut-être contemporains d’Homère, peut-être de Moïse.



pays basque autrefois mystere origines
DE L'ORIGINE DES BASQUES
PAR WILIAM D'ABARTIAGUE


L’imagination rapproche facilement le langage de l'homme qui le parle ; une langue nous évoque un type. La langue basque, mieux que toute autre peut-être, se prête à ce rapport. Son accent un peu rude, mais aussi souple et chantant, accompagne bien, dans leur vie quotidienne, ces hommes aux traits durs, mais dont les corps robustes sont légers comme des félins.



Il faut, pour les bien voir, quitter la côte où trop d’étrangers se sont installés. Par les routes toutes blanches de soleil, où les platanes découpent leur ombre d'encre, on grimpe rapidement vers la montagne. Les prés, toujours verts, finissent à pic sur la mer, tachetés, çà et là, d’une maison blanche, ou variés d'un bouquet d’arbres. Jusque dans les sentiers des falaises, des vaches paissent et font tinter leurs clochettes.



pays basque autrefois maison etxea
MAISON BASQUE 1892
PAYS BASQUE D'ANTAN



Par un beau matin de dimanche, tout le village est déjà debout pour aller aux offices. Une foule de bérets et de mantilles emplit les rues. Elle se mêle à quelques paysans encore attachés à un travail qu'ils achèvent vite avant la grand’messe. Il faut bien traire et nourrir les bêtes. Un char revient des champs, un char rustique aux roues pleines, traîné par deux bœufs dont une peau de mouton couvre la tête. Devant les bœufs, la démarche assouplie par les sandales aux semelles de corde, une gaule en travers des épaules et sous ses bras étendus, l'homme va, calme et beau. Il ne semble point marcher, mais danser un pas très simple et très mystérieux.


pays basque autrefois agriculture attelage
ATTELAGE DE BOEUFS
PAYS BASQUE D'ANTAN


Une heure plus tard, le voici à l’église. Il est allé prendre sa place dans un des balcons réservés aux hommes, et qui font le tour de la nef, en trois étages. Tous les hommes du pays, rangés sur des bancs, sont accoudés à la balustrade. Derrière eux, au mur blanchi, s’alignent les bérets. De ce balcon, on domine toute l'église : le chœur, riche de cuivre et d’or, lourd de statues et d’ornements, suivant le style de l'Espagne voisine, la nef où sont agenouillées les femmes. Les jeunes filles portent la mantille noire sur leurs toilettes claires ; les veuves disparaissent sous la cape qui les fait ressembler à des religieuses. C’est un pays de deuils, sévères. Un Basque vous dira que le deuil d’un père ou d’une mère dure trois ans, et si vous lui demandez combien dure alors un deuil de veuf ou de veuve, il vous répondra, indigné : "Toute la vie!"



pays basque autrefois eglise religion
EGLISE DE ST-PEE-SUR-NIVELLE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Enfin les derniers chants s’éteignent, les orgues s'apaisent. Une grande heure durant, tous ces hommes sont restés immobiles, fixés dans la position qu’ils avaient prise en arrivant. Tels on les retrouvera les jours de grande fête, aux processions, en longues files admirables de silence et de respect, devant les bannières d'or qui se balancent sous le soleil.



pays basque autrefois religion labourd procession
PROCESSION PONT MAYOU BAYONNE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Maintenant ils vont regagner leurs maisons blanches disséminées dans la campagne, ou bien se réunir au cabaret. Un cabaret basque, c’est une maison comme les autres, un toit de tuiles rouges sur des murs blancs, des murs éblouissants que l'on badigeonne à la chaux tous les ans, et qui chantent à l’œil sous le soleil, comme chanterait à l’ouïe une nuée de cigales. Un mur bas l'entoure, un petit mur large où l'on pourrait s'asseoir, qui semble contenir comme une gerbe les platanes plantés derrière lui. Car il n’y a pas de maison basque sans un rideau de platanes, alignés dans la cour étroite formée par le petit mur blanc, et taillés en un long berceau plat, qui projette à midi, au pied même des arbres, une bande fraîche d’ombre verticale. Derrière cette zone protectrice, les salles du cabaret sont plus fraîches encore, plus frais les vins de Bordeaux corsés de vins d’Espagne qu'on aime comme apéritifs. Et l’on va pouvoir commencer à discourir, à discuter, à parier sur le grand événement de ce dimanche, la partie de pelote."



pays basque autrefois cabaret
AU CABARET
PAR PABLO TILLAC



A suivre...



Merci ami(e) lecteur (lectrice) de m'avoir suivi dans cet article.

Plus de 4 800 autres articles vous attendent dans mon blog :

https://paysbasqueavant.blogspot.com/


N'hésitez pas à vous abonner à mon blog, à la page Facebook et à la chaîne YouTube, c'est gratuit !!!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire