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jeudi 18 novembre 2021

UNE "HISTOIRE NATURELLE ET POÉTIQUE" DES BASSES-PYRÉNÉES EN 1926 (première partie)

"HISTOIRE NATURELLE ET POÉTIQUE" DES BASSES-PYRÉNÉES EN 1926.


En 1926, Francis Jammes, poète, romancier, dramaturge et critique français, raconte son histoire détaillée des Basses-Pyrénées.




pays basque autrefois département basses-pyrenees
CARTE DU DEPARTEMENT DES BASSES-PYRENEES
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet La Revue Universelle, le 15 septembre 1926, sous la plume de 

Francis Jammes :



"A Madame Ida Charles-Dupuis. 


Géologie.


Grottes.



On demeure confondu, en prenant connaissance de l’inventaire qu’en a dressé M. Passemard, par le nombre d’animaux dont il a découvert les fossiles dans la caverne d'Isturitz et dans l’abri d’Olha.



Je rends hommage au docteur de l’Université de Strasbourg, non seulement au nom d'une science où il est passé maître, alors que je n'y suis qu’un pur profane, mais encore de la poésie.



Je ne peux qu’admirer, tandis que les fauvettes chantent dans mon jardin de Hasparren, et que tout à l’heure y glissait une musaraigne entre les feuilles, qu’à dix kilomètres d’ici, non loin de mon château de Belzuncia, à Isturitz, aient été mis à jour ces indiscutables ossements d’ours, d’hyènes, de cerfs, de rhinocéros, de mammouths, de rennes, de bisons, de lagopèdes, de goélands, d’aigles, et ces coquillages ! Les squelettes d’ours, en particulier, s’enchevêtrent, s’entremêlent, s’agglomèrent, avec une telle abondance, qu’ils firent naître la singulière idée, heureusement abandonnée, de les exploiter comme engrais chimique.




pays basque autrefois grottes
GROTTES D'ISTURITZ BASSE-NAVARRE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Ossements et fossiles.



J’ai donc pris connaissance de cet ouvrage sur les Stations paléolithiques du Pays basque et leurs relations avec les terrasses alluvions. Il ne quitte guère ma table. Et ma joie est grande à considérer les photographies de ces molaires d’éléphants, de ces humérus de gypaètes en m’assurant que si les Basques prétendent à ce que l’arche ait touché terre sur la montagne de Hasparren, les vestiges de cette collection en témoignent.



Mais que M. Passemard, et cet autre maître en mêmes matières, mon cousin l’abbé Breuil, se rassurent. Je ne marcherai point sur leurs brisées. Et, avant que de laisser apparaître à leurs yeux les cavernes de mon ignorant, je les prie de n’admirer ici qu’elle-même. Je requiers seulement le crédit accordé par les princes de la médecine aux empiriques. On pourrait, en filtrant tout le sable de la Garonne, peut-être y découvrir quelques paillettes d’or.



Vue sur le déluge



Trois éléments nous retiennent dans la spéléologie qui nous occupe : les pierres travaillées, l’homme et les animaux.



Je ne m’arrête point aux silex qui sont, pour ainsi dire, les empreintes digitales d’une race de chasseurs : coups-de-poing, lames servant à l’industrie osseuse des flèches et des harpons ; grattoirs et burins qui sur la paroi d'Isturitz servirent à sculpter lièvres, rennes et bisons. 



Je ne retiens que les galets et les puddings. Comment, tout autour de ces stations paléolithiques, Isturitz, Cambo, Ustaritz, Biarritz, ont-ils été roulés, cimentés ? M. Passemard a observé, avec un soin méticuleux, que ces cailloutis forment aujourd’hui des terrasses dont l'altitude varie au long de la Nive qui, sans doute, est descendue peu à peu comme ferait une scie dans la pierre tendre qu'elle partage. Et cela durant des siècles.



Mais, de ces cailloux roulés que nous rencontrons à de telles hauteurs, au-dessus d'Itxassou par exemple, dans la vallée de Laxia, il me paraît naturel de conclure à la submersion de tout ce pays sous une seule nappe et non par des déplacements torrentueux, ramiformes et successifs.



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VALLEE DE LAXIA
PAYS BASQUE D'ANTAN


Je regarde le ciel monter, car il s’élève 

Comme une mer couleur de feuille de maïs 

Barrant tout l'horizon bien au-dessus des grèves, 

Prête a combler d’un bond tous les creux du pays.



C'est d'ailleurs là une idée qu’adopte M. Passemard quand il écrit, au sujet des cailloutis de la bergerie : "Il ne fait pas de doute que nous sommes en présence des restes d’une ancienne nappe de cette altitude." 



Soit, mais ici, j’interviens et je précise : il ne peut s'agir d'une nappe fluviale parce que rien ne révèle l’immensité d'un tel lit ; ni lacustre, immobile et peu sculptante ; mais de celle, immense et mouvementée de l’océan. Et d'ailleurs, en langue basque, Louhossoa, qui est tout près signifie la mer. 



Je tire ma conclusion générale : le déluge marin, tel que les enfants l'apprennent dans l’histoire sainte sans le discuter : voilà le niveleur et le polisseur. 



Cette grotte — je n’envisage que celle qui est au flanc de la montagne d'Isturitz, — comment expliquer que s’y trouve en telle abondance cette mêlée d’ossements et de coquillages ? Ceux-ci, i1 est vrai, sont perforés à leur charnière et comme afin de servir de colliers à des peuplades sauvages. Mais je m'en expliquerai.



Donc pourquoi l’existence de cet ossuaire innombrable ont à peine quelques mètres ont été soumis à des fouilles qui laissent supposer une étendue plus riche infiniment ? 



Repaire d'ours, dites-vous ? 



Mais alors que l'ours actuel ne semble pas d’humeur à reconnaître une ascendance qui a colonisé dans les cryptes, faudra-t-il inventer des aigles, des vautours, des gypaètes, des perdrix de caverne ? Je ne le crois pas. Un charnier d’alimentation ? Les restes de repas anté-pantagruéliques ? Je me refuse d'y croire, quel que soit l’appétit féroce de l’Eskuarien.



Et quoi donc alors ? 



C'est que, pressés par le déluge qui montait vers eux peu à peu dans cette contrée, les animaux qui l'habitaient, aériens ou terrestres, apercevant ce seul abri, s'y sont blottis et y sont morts noyés quand les flots y ont pénétré. 



Quant aux poissons, il en reste si peu de traces qu'autant dire qu’il n’y en a point. Ils se sont laissé remporter par le flot, qui ne les gênait pas. Les chasseurs, fils de Noé, ne sont venus qu’ensuite, et c’est eux qui semèrent ça et là des pédoncules percés qui formèrent les premiers colliers et pendants d’oreilles.



J’ai relevé des marques diluviennes encore, en Béarn..."



A suivre...




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