L'ÉLAN PATRIOTIQUE DES BASQUES EN 1914.
Suite à l'assassinat à Sarajevo, le 28 juin 1914, de l'Archiduc Autrichien François Ferdinand, l'Europe s'embrase, et la France proclame la mobilisation générale, le 1er août 1914.
Je vous ai parlé dans un précédent article du premier mort Basque de cette première Guerre
Mondiale.
ORDRE DE MOBILISATION GENERALE 1ER AOUT 1914 |
Je vais vous parler aujourd'hui des déserteurs et des insoumis Basques pendant cette guerre.
Tout d'abord, il faut faire la différence entre les insoumis et les déserteurs.
En premier lieu, les insoumis.
- L'insoumission est une infraction commise par une personne astreinte aux obligations
du service militaire et qui n'a pas répondu à une convocation régulièrement notifiée. C'est-à-
dire, tous les hommes appelés à 20 ans pour les trois ans de service militaire du temps de paix
ou ceux qui, à la déclaration de guerre, ne sont pas sous les drapeaux, mais font partie des
classes mobilisables : réserve, territoriale, voire réserve de la territoriale. Ceux-là, qui n'ont
pas répondu à la convocation, sont des insoumis.
- La désertion concerne les hommes ayant revêtu l'uniforme, avec ses diverses formes :
- le déserteur à l'intérieur du territoire français en temps de guerre, encourt de deux à
cinq ans de travaux forcés (articles 231 et 232 du code de justice militaire).
2. le déserteur qui quitte le territoire pour se réfugier dans un pays étranger : cinq à dix ans
de travaux forcés (articles 235 et 236).
3. le déserteur qui passe à l'ennemi : mort avec dégradation militaire (article 238).
Suite à la déclaration de guerre à l'Allemagne le 3 août 1914, les autorités civiles et militaires
ont cru tout d'abord que les habitants frontaliers, et en particulier les Basques, se
soustrairaient massivement à leurs obligations militaires.
Dès le 7 août 1914, le sous-secrétaire d'Etat à la Guerre envoie une circulaire "pour la
recherche des déserteurs et insoumis" dans toute la France.
Le 18 août 1914, le préfet des Basses-Pyrénées, Antoine Coggia, envoie une lettre circulaire aux
sous-préfets et aux maires du département, où il prescrit :"de faire rechercher avec la plus
grande vigueur les hommes qui se seraient soustraits à leur devoir militaire à l'heure grave que
traverse la France".
Le préfet ajoute que les maires sont tenus de prêter "leur concours le plus actif" à la
gendarmerie pour la recherche des déserteurs et insoumis.
Cependant, le problème de l'insoumission, des Basques essentiellement, ne date pas de la
mobilisation.
Quant aux déserteurs, que la gendarmerie se doit de rechercher, on ne les verra franchir la
frontière espagnole, et pas seulement les Basques, qu'au cours du second semestre 1915,
pendant la généralisation des permissions.
Certains, dès la mobilisation, passent la frontière et s'installent en Espagne.
D'autres, le groupe le plus nombreux, sont des émigrants temporaires ou définitifs, installés en
Amérique du Sud ou du Nord, et malgré la loi d'amnistie (du 5 août 1914, qui permet aux
insoumis vivant à l'étranger, soumis aux obligations militaires, de rentrer en France, sans qu'il
y ait des poursuites pénales à leur encontre), restent où ils sont.
Quant aux motivations qui empêchent leur retour, il n'y a pas grand peine à imaginer que les
bergers du Nevada, les blanchisseurs de San Francisco ou les ouvriers des abattoirs de Buenos
Aires, qui ont du travail, ont peut-être fondé une famille, ne sont pas enclins à "prendre" un
billet pour un retour au pays fait d'incertitudes.
Certains d'entre eux néanmoins reviendront en France pour se battre.
Combien d'insoumis dans les Basses-Pyrénées ?
Un rapport de gendarmerie du 30 novembre 1916, établi par le chef d'escadron Delrieu,
concernant les réfractaires depuis la mobilisation (3 août 1914), donne les chiffres suivants, par
arrondissement :
RAPPORT DE GENDARMERIE 30 NOVEMBRE 1916 |
Bonsoir, je suis d'accord avec vous sur la présentation que vous faîtes de ce phénomène, j'ajouterai, concernant l'insoumission qu'il faut également prendre en compte les délais de communication entre les continents à l'époque. En effet, la mobilisation générale en a surpris plus d'un en France, où l'on savait la guerre imminente, mais pas qu'il y aurait une mobilisation générale.
RépondreSupprimerles bergers basques de la Pampa, ou des fins fonds du Nevada, n'apprirent la nouvelle que très tardivement, or ils ne disposaient que de 30 jours pour se présenter à l'incorporation avant d'être déclarés insoumis. Compte tenu des délais de traversée cela était quasiment impossible. Le besoin en hommes fit que des aménagement furent effectués pour ceux qui revenaient. Pour toutes les raisons que vous avez cité, peu le firent, ce qui fit du Pays Basque le coin de France où les taux d'insoumission battirent des records.
Si cette période vous intéresse, je vous conseille quelques uns de mes livres qui traitent du sujet : "American Edition", Eric le Blay, Memoring Edition, Bordeaux 2017 (en cours de réédition); "Biarritz 1919, le Printemps Américain des Années Folles", Memoring Ed., Bordeaux 2018; un ouvrage auquel j'ai collaboré : "La Grande Guerre en Basse-Navarre", Ed. Terres de Navarre, Garazi 2019, et le prochain qui sortira avant Noël sur le peintre Antoine de Salaberry et les Donazahartars au front : "Des Pyrénées aux tranchées", Memoring Edition.