AU PAYS DE "RAMUNTCHO" EN 1900.
"Ramuntcho" est un roman français de Pierre Loti. Publié pour la première fois en 1897, il a connu une vingtaine de rééditions françaises jusqu'en 1994. C'est un des ouvrages les plus connus de Pierre Loti, et un de ses principaux succès d'édition.
ASCAIN 1900 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Le Temps, dans son édition du 23 septembre 1900,
sous la plume de Gaston Deschamps :
"Au pays de Ramuntcho".
...Qu’est-ce donc que cette pelote, tant aimée sur les deux versants des Pyrénées, sur les deux rives de la Bidassoa, — aussi, chère aux Français de la Soule et du Labourd qu’aux Espagnols de la Navarre et du Guipuzcoa ?
La "pelote" est une petite balle de corde serrée, recouverte d’une enveloppe en peau de mouton. Cela est presque aussi dur qu’une bille de billard. Si l’on recevait la pelote entre les deux yeux, on risquerait d’apercevoir plus de trente-six étoiles. Le choc de la pelote est si rude, lorsqu’elle rebondit après avoir frappé le mur, que les joueurs qui saisissent la balle au bond en ont les mains, meurtries et gonflées. Aussi, les "joueurs à la main", les eskuhustas sont relativement rares. Les pelotaris se servent ordinairement d’une armature d’osier, appelée chistera. La chistera se fixe au poignet par des lanières de cuir. Cet appareil, façonné en tresses de brindilles souples, par un célèbre vannier d’Ascain, sert à recevoir, la balle et à la renvoyer. La chistera, en des mains inertes, ne serait qu’un panier de forme bizarre. Lorsqu’elle est maniée par le petit Arroué ou par le grand Ayestaran, c’est une foudroyante raquette.
Aujourd’hui, la place d’Ascain, sous les platanes, entre l’église et le fronton de pelote, est déserte. Un ciel, invraisemblablement bleu et pur avive la blancheur des maisons et colore de nuances délicates les verdures et les rochers de la Rhune. On est bien ici. Tout ce qu'on voit, tout ce qu’on devine est agréable, plaisant, coquet. Sur une façade blanche, dont le double étage aux six fenêtres est égayé de contrevents, verts, je lis ces mots : Hôtel de la Rhune. Je me souviens qu’une des plus jolies baigneuses de Saint-Jean-de-Luz m’a dit : "Surtout, n’oubliez pas d’aller voir, à l’hôtel de la Rhune, la chambre où Loti a écrit Ramuntcho."
HÔTEL DE LA RHUNE ASCAIN PAYS BASQUE D'ANTAN |
J’obéis à ce conseil. J’entre. Et je suis ravi d’abord de ne point rencontrer, dans cet hôtel, les garçons glabres et indiscrètement obséquieux auxquels se heurte habituellement le voyageur intimidé. Point, non plus, de ces servantes d’auberge, dont les doigts rougis racontent des vaisselles mal essuyées. La maîtresse, du logis est plus ou (si l’on veut) autre chose qu’une patronne. C'est vraiment la dame de céans. C’est une fine Basquaise, au profil net, aux cheveux sombres, aux yeux noirs, aux longs sourcils. Elle a gardé, jusqu’aux extrêmes limites de la jeunesse, un air juvénile, une allure dégagée, avenante. Je reconnais, en elle, les traits de sa race : la vivacité du regard, la finesse des attaches, l’élégance de la taille, la mobilité du visage, souvent éclairé par un gracieux sourire.
— Madame, lui dis-je, me serait-il possible de voir la chambre de Loti ?
— La chambre de M. Loti ? Mais oui... Elle est occupée en ce moment par un Anglais. Mais ça ne fait rien. Je vais vous la montrer pendant qu’il déjeune...
Sur les pas de mon aimable interlocutrice, je monte les degrés d’un escalier soigneusement ciré. La dame ouvre une porte. Et me voici dans. une chambre proprette, où tout est reluisant, depuis le parquet bien frotté, jusqu’au plafond bien blanchi. Les murs sont recouverts d’un papier peint que fleuronnent des ornements exempts de prétention. Dans des cadres accrochés au mur, on voit le Trocadéro, les Diamants de la couronne et une Mauresque de Constantine. Le portrait de Loti est exposé à une place d’honneur. L’auteur de Ramuntcho est habillé en Arabe. Les plis de son burnous blanc sont savamment arrangés et mettent en valeur l’expression de son visage ardemment maigre, où brillent, d’un éclat étrange, deux grands yeux extasiés...
PIERRE LOTI |
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