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jeudi 2 décembre 2021

LA SOULE AU PAYS BASQUE EN 1881 (troisième partie)

 

LA SOULE EN 1881.


La Soule est la plus petite des 7 provinces du Pays Basque. Située dans les Pyrénées-Atlantiques, elle est peuplée d'environ 15 000 habitants et a pour capitale Mauléon-Licharre (Maule)




pays basque autrefois frontiere soule
CARTE FRONTIERE PAYS BASQUE NORD ET SUD



Voici ce que rapporta Paul Perret dans son livre "les Pyrénées françaises" en 1881 :



"Le pays de la Soule


Un moment après, nous roulons sur une belle route, qu'enserrent encore à gauche les montagnes vertes. Le chemin tourne ce haut rideau vert, qui, d'ailleurs, se déchire ; - la première chaîne des grands monts nous apparaît à l'est, au-devant d'un long chainon de collines arrondies ; à l'ouest s'ouvre une plaine d'une richesse peu commune, même dans les quartiers bas de cette terre fertile. Le Saison coule entre des cultures dont l'hectare, nous dit notre conducteur, ne se vend pas moins de vingt ou trente louis ; çà et là de grands bouquets de bois, puis des oseraies sur les bords du torrent, et de superbes prairies. - La première bourgade que nous rencontrons est Libarrenx. L'église au triple pignon est entourée de chênes gigantesques. Partout ces ombrages épais se répètent ; de vieux manoirs se nichent sous ces vieilles ramures ; à droite, voici le château de Trois-Villes, souvenir du Jaon Kunte de Mauléon.




pays basque autrefois soule église
EGLISE DE GOTEIN-LIBARRENX SOULE
PAYS BASQUE D'ANTAN



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CHÂTEAU TROIS-VILLES SOULE
PAYS BASQUE D'ANTAN



Les villages sont gais, les maisons portent des galeries de bois. Sous l'auvent, sur la porte basse des plus petites, sur la porte charretière des plus grandes, je retrouve la croix de papier attachée pendant la nuit de la Saint-Jean. Cette route très fréquentée se couvre de carrioles qui vont un train d'enfer ; le Basque aimera toujours le bruit et l'allure. Plus loin viennent de lourdes charrettes chargées de foin, trainées par des boeufs dont la tête est coiffée d'un singulier ornement de toile blanche brodée de rouge ou de bleu, garnie de glands de même couleur. Puis ce sont des troupeaux de vaches conduits par des pâtres à cheval, brandissant un long bâton qui a des airs de lance. On dirait Don Quichotte pasteur.



Tardets et Larrau.



Aux approches de Tardets, les montagnes ont reparu vers le sud. En avant, on aperçoit un ballon surmonté d'une chapelle ; dans la partie des Pyrénées que nous avons parcourue jusqu'à présent, nous voyons pour la première fois cette forme ronde des monts. Nous entrons dans Sorholus, le faubourg de Tardets : un nom basque, avec une désinence qui paraît latine. Sorholus est assis au bord de la route, presque au pied d'un coteau, ses jardins descendent vers le Gave. - Ce côté droit du chemin est donc bordé de maisons qui portent inscrite la date de leur fondation ; aucune n'a plus d'un siècle et demi ; quelques-unes sont ornées de galeries de bois. - A gauche, les habitations s'élèvent sur d'assez hautes terrasses, que dominent de beaux vergers disposés sur les pentes. L'église est là, entourée de son cimetière. - De ce côté, à l'horizon, vers l'ouest, quelques cimes bleuâtres ; de l'autre, à l'est et au midi, les ballons se succèdent, couverts d'herbe rase ou de bois ; bientôt ils se rapprochent, se croisent, se heurtent ; le Saison disparaît derrière ces murailles rondes, dans une gorge qui de toutes parts semble fermée.




pays basque autrefois soule gave
TARDETS GAVE SAISON 1906
PAYS BASQUE D'ANTAN



L'église de Sorholus n'a de remarquable que la riante propreté de son cimetière. J'y vois la tombe d'Augustin Chaho, un érudit qui vécut en homme de bien dans ce pays. Il a composé quelques ouvrages sur les usages et la langue basque ; l'inscription funéraire qui raconte sa vie et ses travaux est pourtant latine. Près de ce tombeau en est un autre, celui du capitaine Garat, parent des Garat d'Ustarits, qui servit dans les armées de la République et de l'Empire, et vint, comme dit le peuple, "manger sa retraite" dans cette tranquille vallée. C'est à peine du pain blanc que ce pain de la gloire, et l'envie populaire s'attaque à peu de chose. Il suivait la musique du canon, le capitaine, tandis que son cousin Pierre-Jean, le rossignol à deux pieds, faisait entendre celle de l'amour et chantait à l'Opéra. Il a laissé de bons souvenirs à Sorholus et à Tardets, car sa tombe est entourée de fleurs. Tout le cimetière, au reste, en est rempli ; elles ont des parfums plus pénétrants en cet arrière-été qui est déjà presque l'automne ; leur haleine se rafraichit aux nuits plus longues ; la route, au loin, en est embaumée.



Nous montons à pied vers Tardets, nom français de la bourgade ; le nom basque est Atharratz. Un chemin s'ouvre à droite, il conduit au Gave. Nous le prenons et nous arrivons à un pont de bois du haut duquel il nous est aisé de suivre, sur un espace de trois ou quatre kilomètres en amont, le cours du torrent jusqu'au moment où il se perd derrière les remplis croisés des monts. Sur la rive gauche, les maisons de Tardets le dominent du haut de leurs terrasses et de leurs galeries. Sur la rive droite des prairies s'étendent au pied des ballons, verts comme elles. Le Saison, en cet endroit, est large et ne roule d'eau que dans une partie de son lit ; de longs bancs de cailloux blancs en émergent. Des rideaux de trembles et de peupliers courent sur ces bandes étroites de pré ; la vue est fraiche et tranquille. Tardets est un lieu de plaisance ; aussi de toutes parts voit-on des castels dans la vallée.



La villette a pour vestibule une grande place carrée, formée de maisons bâties sur un plan uniforme, et reposant sur des arcades cintrées en portique. Excellent promenoir, bien qu'un peu sombre les jours de pluie. Or on peut aimer passionnément les Pyrénées, qui le méritent par ce mélange attachant qu'elles offrent sans cesse de la nature du nord et de celle du midi ; mais on ne doit pas nier que le nord y a quelquefois le dessus, et que, ne pouvant envoyer de vraie froidure, il se venge en faisant tomber ses pluies. Au reste, il pleut aussi par le vent d'Espagne ; mais alors la pluie est chaude. - Une maîtresse ondée signale notre entrée dans le vieil Atharratz, et nous voici bienheureux de nous réfugier dans l'auberge. Elle est excellente, cette auberge de montagne : bonne table, avec des sauces fines à faire rougir les traiteurs parisiens, si leurs fronts n'étaient point de pierre. Et la jolie situation pour une hôtellerie ! Du côté de la ville, sur l'autre bord de la rue, de vieux murs, restes d'un manoir disparu, couronnés d'arbres superbes formant une allée qui sert de promenade publique ; du côté de la campagne, le Gave, les prés, les bois, les monts. Le château d'autrefois, c'était celui des barons, puis comtes de Luxe...



La chambre où l'on me conduit, après le repas, est immense et s'ouvre sur les deux faces. Au-dessus du Saison, règne la galerie, où je m'oublie à considérer les derniers reflets du jour. Le fond est encore assez lumineux pour que les montagnes les plus proches s'y découpent en silhouettes énormes, qui peu à peu perdent leurs reliefs ; ce ne sont plus que des masses d'ombres. La pluie a cessé ; le grand tapis bleu, là-haut, se pique d'étoiles...



Le matin, à Tardets, on nous dit qu'une visite à la chapelle de la Madeleine nous servirait au moins à reconnaître la situation du pays. Un long débat s'engage entre mon compagnon et moi. Ferons-nous cette excursion topographique ? Nous apercevons maintenant au nord le petit mont qui porte la Madeleine ; il n'a guère que huit cents mètres ; mais ce ne sera pas une ascension de moins de deux heures."




pays basque autrefois soule église
EGLISE DE LA MADELEINE BARCUS
PAYS BASQUE D'ANTAN



 



A suivre...










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