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vendredi 6 août 2021

EXERCICES ET AMUSEMENTS DES BASQUES EN 1817 (deuxième et dernière partie)

 

EXERICES ET AMUSEMENTS DES BASQUES EN 1817.


En 1817, les distractions sont plutôt rares au Pays Basque.




pays basque autrefois makila
GRAVURE 1828 BASQUE AVEC MAKILA
PAYS BASQUE D'ANTAN



Voici ce que rapporta à ce sujet le journal Mercure de France, le 17 mai 1817, sous la plume de 

l'Ermite de la Guyanne : 



"Exercices et amusements des Basques (suite).



... Léger comme un Basque dit-on proverbialement et sans se douter de l’exagération que renferme un pareil éloge : ce vers sur le cerf poursuivi par une meute, L’œil le cherche et le suit aux lieux qu’il a quittés ? n'est pas moins littéralement vrai en parlant des jeunes habitants de ces montagnes : le vol de leur balle en l’air n’est pas plus difficile à suivre que la trace de leurs pas.



Une idée qu’on se fait encore plus difficilement, c’est celle des émotions que leur font éprouver les diverses révolutions de la partie. Durant ce flux et reflux de crainte et d’espérance, des témoins courent de tous côtés pour en porter au loin les nouvelles. Les routes, à plus de six lieues de la place, sont semées de curieux qui interrogent, en palpitant, ces messagers. Denain, Fontenoy, n'excitaient pas de plus vives inquiétudes. Enfin, quand le talent ou le sort, qui prend sa part dans tous les événements de ce monde, a décidé la victoire, les vaincus ne songent plus qu’à des revanches, et les vainqueurs, qu’à de nouveaux combats. Ces luttes ne sont pas seulement des jeux ; on y voit la fortune et la gloire.



La paume a ses héros, et les Sorrende, les Duraty, les Silence, les Parquins et quelques autres ont attaché à leur nom une célébrité dont la tradition, à défaut de l’histoire, leur garantit la durée. M. Destère m’a raconté à ce sujet l’anecdote suivante : "Le fameux Parquint, dans le cours de la révolution, avait été forcé d’émigrer eu Espagne ; il apprend qu’un de ses rivaux de gloire, nommé Crutchatty, annonce une partie de paume aux Aldudes sur la frontière. Aussitôt Parquins fait solliciter auprès des autorités du lieu un sauf-conduit qu’on lui accorde, et que l’on motive sur la nécessité d’opposer à Crutchatty le seul rival digne de lutter avec lui. Parquins arrive, entre en lice, combat, remporte la victoire, et retourne eu Espagne aux acclamations de la foule qui l’accompagne jusqu’à la frontière."



C’est dans les fêtes locales qu’il fallait voir, il y a quelques années encore, ces danses où figuraient des communes entières, où tous les âges de la vie humaine (depuis le moment où l’on forme les premiers pas, jusqu’à celui où l’on se prépare à franchir le dernier), se réunissaient autour des tombeaux pour y célébrer, par les mêmes danses, ces fêtes où trois ou quatre cents générations avaient successivement assisté dans les mêmes lieux.



Les âges, dans l’ordre de leur succession, et les sexes sur deux lignes, après l’office divin, se rendent, de l’église au cimetière, précédés du maire de la commune, que, dans la langue poétique du pays, on nomme Pontife Civil ( aousso apessa ). Ce pontife (précisément comme Plutarque à Chéronée), des branches de laurier et d’olivier à la main, conduit, en cadence, la marche solennelle qu’il amène sur la place publique au son des instruments indigènes, parmi lesquels on ne compte que le tambour de basque, le flutet à cinq trous, et une espèce de violon sans chevalet, sur lequel le rythme se marque en frappant les cordes avec un court bâton recouvert en peau. C’est au moyen de ces instruments, si pauvres d’harmonie, auxquels se mêlent, par intervalle, quelques voix agrestes, que des laboureurs, des pâtres, leurs mères, leurs femmes et leurs filles remplissent la vaste étendue des cieux de chants qui semblent en descendre.


pays basque autrefois musicien
BASQUE AVEC TAMBOURIN
PAYS BASQUE D'ANTAN


Arrivée sur la place, toute cette population y forme un rond immense et la parcourt plusieurs fois à pas mesurés. La marche s’anime progressivement ; et c’est au moment où son action devient la plus vive, que le tambourin donne le signal du mouchico, danse violente et qui admet tout un peuple sans confusion. Noverre et Dauberval ont essayé d'en donner une idée sur le théâtre de l'Opéra ; mais comment lui conserver son caractère national ? Ce ne sont pas seulement les pieds, les bras, c'est le corps des Basques que le mouchico met en mouvement, et leur âme est encore plus agitée ; ils crient, parlent et chantent en dansant ; ils remplissent la place de ces éclats, de ces gloussement de voix dont ils font retentir les échos des montagnes, lorsqu’ils traversent les Pyrénées, et qu'ils veulent s’avertir de l’endroit où ils se trouvent. Cette espèce de gamme rapide s’appelle irrincina dans les Pyrénées, et incina dans quelques parties des Alpes. Je crois me souvenir que Silius Italicus en fait mention dans son poème, et qu’il cherche à l'imiter par l’harmonie de ses vers.



Les paroles improvisées pendant le mouchico, sont l’expression bien plus vraie de l'ivresse que produit cette danse parmi les Basques. On ferait un recueil charmant des mots passionnés, des louanges délicates que leur inspirent en ce moment l’amitié, l'amour et la piété filiale.



Les chants des Basques sont langoureux, comme dans tons les pays de montagnes où le séjour des hommes, dans ces hautes régions terrestres, semble disposer leurs âmes aux sensations les plus tendres. La langue des Basques, dont presque tous les substantifs se terminent en a, qui se sert de circonlocutions orientales pour désigner les objets qui commandent l’amour, le respect ou la crainte ; cette langue, dis-je, est plus favorable qu’une autre à l’expression de la pensée mélancolique. Dieu s’appelle Jaungoicoa (Seigneur d’en haut) ; la nuit, Gab-a (absence de lumière) ; la mort, eriotza (maladie froide) ; le soleil, egusquia (créateur du jour) ; la lune, ilarquia (lumière morte).



Les Basques sont courageux, mais vindicatifs, excellents soldats, surtout pour la guerre des montagnes, mais indépendants et difficiles à retenir sous les drapeaux au-delà du temps qu’ils se prescrivent eux-mêmes. Un grand capitaine, qui se connaissait en soldats, disait que les Basques, si distingués par le courage personnel, ne valaient rien en ligne. Dans la guerre de 1793, contre l’Espagne, deux demi-brigades, commandées par un général (au nom duquel l’épithète de brave se joint si naturellement qu’elle semble en faire partie) ; deux demi-brigades, disais-je, commandées par le brave Harispe, après avoir fait des prodiges de valeur, désertèrent presque jusqu’au dernier homme pour aller embrasser leurs parents et leurs amis. Au bout de quelques jours, tous étaient de retour au camp où leur chef les attendait sans inquiétude.





pays basque autrefois marechal baigorry
JEAN-ISIDORE HARISPE



Les noms propres, véritablement basques, ont presque tous une signification, tels que Salaberry (salle neuve) ; Etcheberry (maison neuve) ; Etchecahar (maison vieille) ; Ithurbide (chemin de la fontaine) ; Jaurguiberry (château neuf) ; Uharte (entre deux eaux).



La propreté dans les habitations et dans les vêtements est portée à un plus haut degré parmi les Basques, qu’en aucune autre province de France. Les femmes sont généralement belles, bien faites, vives et gracieuses.





pays basque autrefois femme
GRAVURE 1828 FEMME
PAYS BASQUE D'ANTAN



La religion, chez les Basques, n'est point exempte de superstition ; mais cette superstition, loin d’être intolérante, n’altère pas même cette douce philanthropie qu’ils exercent sans en connaître le nom : le respect des morts et des tombeaux est ici un véritable culte : les cérémonies des funérailles ne sont plus que touchantes ; jadis elles ont donné lieu à des actes violents de désespoir et même de rage, auxquels le gouvernement crut devoir remédier par une ordonnance que M. Depping nous a conservée dans son Histoire générale d’Espagne : j’en citerai quelques lignes.


"Comme il existe en ce pays un usage indécent de pousser des cris immodérés à la mort d’une personne, et de troubler par toute sorte d’actions violentes la cérémonie des funérailles ; nous ordonnons et établissons pour loi, qu’il sera dorénavant défendu de faire entendre, à la mort d’une personne quelconque, des lamentations désordonnées ; de s’arracher les cheveux, de se meurtrir la chair, de se blesser à la tête, et de prendre le deuil de bure, sous peine d'une amende de, etc., etc."





pays basque autrefois mort funérailles
FEMME EN DEUIL MUSEE DE LOURDES
PAYS BASQUE D'ANTAN



Je pars demain pour continuer mon voyage dans le département des Basses-Pyrénées ; mais avant de quitter ce doux pays, je dirai quelques mots d'Ustaritz, véritable capitale du pays basque, où tout voyageur qui n'a pas de patrie doit être tenté de s’en choisir une."




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