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lundi 2 août 2021

LES PAROISSES DU PAYS BASQUE NORD PENDANT LA RÉVOLUTION FRANÇAISE : URRUGNE ET USTARITZ EN LABOURD (quatrième partie)

  

LES PAROISSES BASQUES PENDANT LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.


Pendant la Révolution française, le Pays Basque Nord, avec sa frontière avec l'Espagne a connu de nombreux combats et a souffert avec la déportation de milliers d'habitants en 1794.



pays basque autrefois paroisses
LIVRE LES PAROISSES DU PAYS BASQUE
PENDANT LA PERIODE REVOLUTIONNAIRE

DE L'ABBE PIERRE HARISTOY TOME II



Voici ce que publia à ce sujet l'Abbé Haristoy, Curé de Ciboure, en 1899 :



URRUGNE (suite) :



La population d’Urrugne était en 1650, de 750 feux ; en 1718 de 4 500 âmes ; en 1820 de 1874. — Le curé, aidé d’un vicaire, était à la nomination du vicomte d’Urthubie. Les revenus au 18ème siècle consistaient dans 3/4 de la dîme des trois maisons d’Urthubie, de Fagoague et de Arabehère évaluée 150 l., les prémices 1 350 1., casuel et offrandes 300 1. — La fabrique possédait une rente annuelle.



pays basque autrefois château
CHÂTEAU D'URTUBIE URRUGNE
PAYS BASQUE D'ANTAN



La municipalité d’Urrugne fut révolutionnaire. Et si au gré de ses désirs, elle ne put pas établir la guillotine, on doit l’attribuer, dit-on, au mauvais état de sa vicinalité. Quoi qu’il en soit, on a soustrait des registres de délibérations municipales, les pages les plus compromettantes. N’importe, ce que les registres de la municipalité de St-Jean-de-Luz révèlent à cet égard suffit à éclairer les moins clairvoyants. Pinet, Cavaignac et consorts ne trônaient-ils pas à Belchanea ?



La cure était dignement occupée par Martin Teillary. Né à St-Jean-de-Luz, le 2 décembre 1743, de Joachim T. et de Marie Mora , il avait été ordonné à Dax en 1770. Frère de Joseph-Vincent, curé de Sare, poursuivi par la haine révolutionnaire, c’en était assez même sans ses qualités personnelles pour le désigner à la rage des sectaires. Il se refusa avec énergie è publier le prétendu mandement de Sanadon et à prêter le serment schismatique. Dès le mois d’avril 1792, sinon plutôt, il fut remplacé officiellement par un nommé Larre, âgé de 36 ans. C’était un ex-prémontré qui, après avoir joui, un an environ, de son traitement de 2 100 l., abdiqua et devint employé aux charrois et inspecteur des convois. A son côté, voulut figurer l’abbé Cavenave, prêtre matutinier, interdit depuis trois ans. Il s’offrit à prêter serment pourvu qu’on le nommât vicaire d’Urrugne.



Cependant l’abbé Teillary se vouait au salut des âmes de ses ouailles et de celles du voisinage. Nous l’avons reconnu dans ce prêtre berger de la maison Elhorrien-borda, de Ciboure. Voici, entre mille, un trait de sa vie apostolique, qui détermina son arrestation et son départ pour la terre d’Espagne.



Un jour, le bon pasteur, portant en cachette le saint viatique, s’acheminait du côté de Ciboure. Reconnu, il est saisi et arrêté par un jeune exalté et dénonciateur de prêtres ; l’héritier de la maison Mertzerena d’Urrugne, et autres prêtrophobes. "Au nom de celui que je porte, s’écrie le digne prêtre, laissez-moi aller visiter un malade". Vaine prière ! on l’amène dans la maison d’arrêt de la commune d’Urrugne. En attendant de nouvelles dispositions, ledit héritier et un fils de la maison Chapelabaita se firent ses gardiens à la porte du cachot. Ils étaient relevés par un fils de la maison Chandizurbaita et un certain Guillaume, fils du valet de la commune.



Profitant d’un moment où celui-ci lui portait son repas à la prison, l’abbé Teillary lui dit : "Au nom de Dieu, sauvez-moi d'ici, Guillaume". Celui-ci en parle à son père, qui lui répond :  "Oui, il faut le sauver. Fais en sorte d’être de garde à la porte avec le fils de Mertzerena, à l’heure du souper du curé. En ce moment, arriveront tes sœurs avec les oies de la maison. Je leur chercherai querelle. Aux cris de tes sœurs, accours avec ton compagnon à leur secours après avoir ouvert la porte de la prison". Le soir, le père reçoit ses filles à coups de bâton, et Guillaume, exécutant les ordres de son père, donne un tour de clef à la porte du cachot et accourt avec l’indigne dénonciateur au secours de ses sœurs, faisant semblant de maudire son père. On s’interpelle., on se bat... On gagne du temps, le prisonnier s’évade, joue des jambes et va se cacher dans un ravin du côté de N.-D. de Sokorri, au lieu convenu avec Guillaume.



Quand la scène entre le père et les filles s’est apaisée, nos gardiens reprennent leur poste. Ils constatent l’évasion de leur prisonnier. Chacun s’empresse de prendre une direction différente pour le ressaisir. Guillaume accourt au lieu convenu où le digne curé l'attendait depuis deux ou trois heures. Il l’accompagne à travers les ténèbres de la nuit jusqu’à Irun (Espagne), ou le saint prêtre, se mettant à genoux, remercia Dieu et son bienfaiteur de sa délivrance.



La lettre suivante prouve que le curé d’Urrugne était poursuivi par d’autres que l’héritier de Mertzerena.



"St-Jean-de-Luz, le 7e jour de la décade, 2e mois, an 2e de la république une et indivisible.


Le sans-culotte Philippon, capitaine aux sans-culottes, composant la société populaire de St-Jean-de-Luz.


Je vous ai dénoncé un espèce d’homme habillé de noir (le curé d’Urrugne) qui par ses discours fanatiques a réussi à égarer plusieurs de mes frères d’armes. Composant l’avant-garde, je m’empresse de vous faire connoitre les nouveaux moyens de corruption qu’employe ce monstre à calotte. Il fut hier dans un endroit où nos sans-culottes vont boire leur petite goûte d’eau-de-vie, et là, sous le manteau de l’hypocrisie, il leur tint ce discours bénin : Je suis fâché que le citoyen Philippon ce soit porté à déclasser (déclamer) contre la religion, car enfin nous devons la respecter. Le discours fut applaudi par quelques individus, qui ne sont pas encore à la hauteur de notre sainte résolution et qui préfèrent les discours d’un calotin à un discours d’un bon bougre de sans-culotte qui pourrait les éclairer.



"Vous voyez, citoyens, qu’il est instant de prendre des mesures de sûreté pour empêcher ce g... f.... de faire des prosélites ; ce qu’il vaut mieux couper le mal dans sa racine que de le laisser enraciner, enfin que l’on envoye à l’avant-garde un bon b... qui ne craigne pas de nous lire père Duchesne et que le mot foutre et bougre ne blesse pas les chastes oreilles, au lieu de Ss Sermons nous fasse l’analyse des bons papiers nouvelles et ce curé là sera un bon bougre. Vive les sans-culottes de la montagne et pe.... qui a peur, foutre.


Le sans-culotte Philippon."



Cet affreux personnage était un des séides du représentant du peuple Monestier. Que l’on juge du sort du digne curé s’il était tombé entre ses mains. La Providence veillait sur lui. A son retour de la terre d’exil, l’abbé Teillary préféra se préparer à la mort par la prière et la retraite. Il mourut prêtre habitué à Arbonne, le 10 décembre 1812.



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INTERIEUR DE L'EGLISE D'URRUGNE
PAYS BASQUE D'ANTAN



A la Révolution, il eut pour vicaire à Urrugne, Etienne Mendiboure, enfant du pays, né de Jean M. et de Marie Barrandeguy.



Ordonné en septembre 1786 avec dispense d’âge, il suivit l’exemple de son curé. Sur la liste des émigrés, il est porté comme n’ayant quitté le pays qu’en 1799. Il est vrai qu’il pourrait être question aussi d’une seconde émigration. Quoi qu’il en soit, il figure sur la liste du nouveau clergé du district d'Ustaritz au mois d’avril 1792. Mais il ne faut pas le confondre avec un autre ecclésiastique de même nom, vicaire de St-Pierre d’Irube, qui abdiqua, et devint brigadier aux charrois.



Les registres paroissiaux nous révèlent la présence d’un prêtre espagnol Diego Lascano dans la paroisse, à la date du 24 septembre 1797. Etabli depuis quelque temps en France, il remplit les formalités légales et exerça les fonctions du saint ministère dans la paroisse. François Marsan, dit tantôt de Bayonne, tantôt de St-Pierre d’Irube, figure dans les mêmes registres de 1799 à 1801.



Nous avons parlé plus haut (même article) de la conduite d’un autre confesseur de la foi de la paroisse, Pierre Dargaignarats. Antoine Breton, capitaine de navire à Urrugne, émigra le 7 mars 1798 et Joseph Bergare de la même paroisse, au mois d’octobre de la même année.



En 1790, Urrugne fut le chef-lieu d’un canton dépendant du district d’Ustaritz et composé des communes de Biriatou, de Hendaye et d’Urrugne. C’est à ce titre sans doute qu’il faillit avoir la visite de la guillotine. Il y échappa, dit-on, grâce au mauvais état de sa vicinalité, car le gracieux instrument ne pouvant plus être transporté dut s’arrêter à mi-route. On en fut dédommagé, il est vrai, par le séjour sur son territoire, à Belchanea, des représentants du peuple Pinet, Garrau et Féraud etc. Tout le pays fut couvert de soldats et de retranchements, triste sort qui lui fut commun avec tous les pays limitrophes d’Espagne. — Les presbytères d’Urrugne et de Biriatou furent démolis par les espagnols. — Une tradition locale nous apprend qu’un soldat déchira d’un coup d'épée un tableau de la vierge, à la chapelle de N.-D. de Sokorri et qu’il expia cet acte d’impiété par une fin misérable. — La Révolution dépouilla l’église d’Urrugne après l’avoir profanée. Elle en enleva : 2 calices, 1 soleil, 3 boëtes aux huiles, 1 cuiller pesant 21m 4° 12d ; galons d’or 6m 2° ; galons d’argent 11m ; 2 croix, grands chandeliers, 2 petits, 2 lampes, 1 bassin, 4 cloches etc.



Le premier curé concordataire de la paroisse fut Jean Lahirigoyen.



USTARITZ-ARRUNS : en basque Uztaritze eta Arrontza ?



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EGLISE D'USTARITZ
PAYS BASQUE D'ANTAN



Sanctus Vincentius de Ustarits ou d’Ustaridz est mentionné, à la date de 1186 et de 1199, dans le cartulaire de Bayonne (fos 32 et 35). Les rôles gascons le mentionnent aussi sous le nom d’Ustaritz, en 1322. Le vicomte Sault d’Ustaritz, descendant des anciens vicomtes de Labourd engagea à perpétuité le 1/4 de la dîme d’Ustaritz à l’évêque et au chapitre de Bayonne vers 1234 et Johan de Sorroete (Sorhouet) celle de Jatxu, de Harauziz et d’Arrons. L’ancienne église d’Ustaritz, dont il ne reste plus vestige, remontait au 13ème siècle, à la belle époque de l'architecture religieuse. De forme rectangulaire, terminée à pans coupés, elle était construite en pierres d’appareil et renforcée de distance en distance par de beaux contre-forts à retraits. Ses deux portes ogivales, surtout la principale, ornées de voussures et ses trois ouvertures à lancettes de l’abside étaient remarquables. Lors de la démolition, on trouva les fondations d’une église plus ancienne et moins vaste. Vers 1862, elle a fait place à une autre, bâtie entre les deux bourgs ou quartiers. C’est un édifice où l’on a su concilier le style ogival à bas côtés avec nos galeries basques.



La population, en 1650, était de 500 foyers ; en 1718 de 3 000 habitants et en 1820 de 1 790. — La cure au 18ème siècle était à la nomination de l’évêque, car Ustaritz ayant eu, croyons-nous, des seigneurs particuliers, la présentation à la cure a pu anciennement leur appartenir. Les revenus de la cure consistaient dans la dîme entière de la noble et antique maison de Haïtze, la dîme de toutes les novales, les prémices (3 art.) évaluées 1 500 1., le casuel 300 1., ensemble 1 800 1. avec la charge d’un vicaire 1 6001. net. 



La fabrique avait une portion de la dîme et une pièce de terre, le tout 110 1. par an. — Il y avait 89 obits d’un rapport annuel de 1 000 1., plus la prébende de Suharsa, fondée le 4 mars 1547, sur une prairie de ce nom située à Villefranque, rapportant net en moyenne 230 1.



La paroisse possédait une confrérie de St-Pierre et de St-Paul "érigée en 1594 avec le bon plaisir de Mgr l’évêque de Bayonne". Nous avons vu ses remarquables statuts dans les registres paroissiaux à la Mairie. — La vieille cloche conservée, croyons-nous, dans la nouvelle église, portait cette inscription gothique : « Faicte je suis pour en ce lieu, Eternel Dieu, te rendre gloire : ainsy soit faicte l’œuvre des mains de tous humains à ta mémoire."



A suivre...


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