LES DANSES BASQUES EN 1906.
Les danses Basques constituent une partie très importante de la culture Basque et la base de son folklore.
Voici ce que rapporta le Journal de l'automobile, du cyclisme et de tous les sports, le 2 janvier
190, sous la plume d'Urbain Raymond :
"Les danses Basques.
Le pays basque deviendra-t-il dans la suite des temps une simple province française ou conservera-t-il toujours ses mœurs particulières et son caractère distinct ?
Les vieux Basques, désolés des innovations que la jeune génération leur rapporte "des Amériques" et du service militaire, ne se posent même pas la question. Ils sont convaincus dans leur orgueil national que le peuple basque étant le plus extraordinaire, le meilleur de tous et détenant à lui seul la Vérité, avec un grand V, doit survivre à tous les autres peuples qui vivent, dans l’Erreur. Ils sont, du reste, bien excusables, ces vieux Basques d'aimer par-dessus tout leur pays. Il est tellement charmant le pays basque, tellement aimable, et la vie y est si douce ! Et comment en vouloir à ses habitants de s’opposer au progrès... Nous autres Parisiens qui représentons l'esprit, nouveau dans toute sa beauté — ou dans sa douce fantaisie — nous ne sommes pas tout à fait persuadés, à chacune de nos villégiatures au pied du mont Abarakakobarria (le limaçon sur la branche), que nous avons raison et que les Basques ont tort dans leur opposition aux mœurs nouvelles.
A quoi bon la lumière électrique, si ce n’est pour faciliter l’accès du cabaret après la journée de travail, quand "l'iharguia", lumière des morts, lumière de la lune, suffit à protéger le repos du travailleur ! A quoi bon la bicyclette dans un pays où il semble au pédaleur que, dans quelque sens qu'il aille, les montées sont plus longues et plus raides que les descentes ! A quoi bon la photographie, qui fait paraître les montagnes minuscules et qui ne rend pas la couleur des prairies ! Pourquoi chanter La Boiteuse ou Viens Poupoule, quand on a été bercé par la chanson de La Fileuse, quand on a parcouru les routes en s’entraînant avec l'histoire de Madame Madeleine, quand on a célébré les victoires des jeux en entonnant Guernica, le chant national ! Pourquoi, enfin, danser le quadrille des Lanciers, tourner sur la valse des Boudoirs ou se contorsionner dans la Matchiche, quand on danse avec grâce le saut basque, avec noblesse la danse des Epées ?
SAUTS BASQUES MASPARRAUTE BASSE-NAVARRE D'ANTAN |
Quand nous nous faisons ces réflexions, nous pensons certainement que les anciens du pays ont raison et que le progrès manque de charme. Et nous ne condamnons les mœurs basques que parce qu'elles font mépriser les "étrangers" comme nous et qu'elles ne nous permettent pas la naturalisation !
La danse basque est un véritable sport.
Les enfants y sont entraînés dès leur plus jeune âge et c’est à cela qu'ils doivent la grande souplesse et le rythme qui se retrouveront dans tous leurs mouvements.
Voyez, par exemple, passer ce bouvier majestueux devant ses bœufs paisibles. Il tient sur l’épaule le long bâton qui sert à les guider. Certainement, M. Mounet-Sully, même avec tous les titres de l'empereur d’Autriche, premier gentilhomme du monde, ne descendrait pas un escalier avec une démarche plus souple et plus noble que celle de ce paysan descendant la route de Saint-Martin-d’Arberoue à Hasparren.
Et c’est à la danse qu’il doit cette démarche. Comme le dit le maître à danser du Bourgeois gentilhomme : sans la danse, un homme ne saurait rien faire...
Dans certaines parties du pays basque, en effet, la municipalité, qui a probablement lu Molière, se charge de faire enseigner la danse aux enfants.
Des musiciens connus pour leur opposition au mouvement moderne jouent sur la chirula les airs antiques, rythmés par le tambourin dont ils gardent jalousement la tradition. Et pendant que les enfants s’exercent et dansent, des juges contrôlent leurs mouvements, car il ne faut pas que le style qui fait tout le charme de ces danses se perde. Il faut montrer de l'aisance, de la légèreté, de la souplesse.
Les qualités de grâce et de rapidité ne sont pas tout dans les danses basques : il y a aussi le côté résistance. A côté de la danse de vitesse, il y a la danse de fond. Dans le "Matchico" (ne pas confondre), par exemple, on pose deux bâtons par terre ; on les place en équerre. Il faut exécuter entre ces bâtons une série d’exercices très rapides, plus rapides que la musique, s’il est possible, et profiter de l’épuisement des musiciens pour les ramasser vivement. Le danseur, s’il réussit, est alors vainqueur.
DANSE DES BATONS EN CROIX TARDETS SOULE D'ANTAN |
On retrouve une danse presque analogue en Ecosse.
Une autre particularité de la danse basque est son côté chaste. Ça n'se danse pas comme ça, tra-la-la-la-la (bis). Presque toujours, même dans les danses où les deux sexes se trouvent en présence, l’accouplement est interdit. Les hommes et les hommes se tiennent par un mouchoir, qu’ils se jettent quelquefois ; mais les apparences sont sauvegardées ! Une seule femme à la fois peut entrer dans la danse.
Les Basques, par la chasteté de la danse mixte, se rapprochent des Grecs. Comme le plus beau peuple du monde, également leur danse se compose de sauts rythmés, de vis-à-vis.
Il est bien probable même que ce n'est pas dans la danse seulement qu'on peut trouver des points de contact entre les mœurs des deux peuples. Bien souvent, lors des parties de pelote, nous avons été frappés de la ressemblance entre l'architecture anatomique du pelotari et celle des statues d'athlètes grecs. Des civilisations qui aboutissent au même développement physique doivent avoir beaucoup de côtés communs.
Du reste, comme les Achéens, les Basques n'ont-ils pas des improvisateurs qui, lors des fêtes, engagent de grandes luttes hostiques.
La plus importante de ces fêtes commence, tous les ans, le premier dimanche de septembre. Le centre où l’on se réunissait, de beaucoup de kilomètres à la ronde, était, il y a encore peu de temps, le plateau d’Ahusquy, entre Mauléon et Saint-Jean-Pied-de-Port. C’est un site absolument féerique. Une terrasse naturelle, couverte de gazon, à un millier de mètres d’altitude, et d’où l’on découvre un paysage admirable, était le lieu de rendez-vous des Basques sportsmen et sportswomen. Les femmes, en effet, s’exercent aussi à des jeux de force et d’adresse.
AHUSQUY SOULE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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