LA CITÉ FUTURE DE BAYONNE EN 1926.
Dans les années 1920, de nombreux projets d'extension et d'agrandissement de communes voient le jour sur la Côte Basque.
Je vous ai déjà parlé dans plusieurs articles de la commune de Ciboure, le 23/08/2021, le
22/09/2021, le 22/10/2021 et le 22/11/2021.
Voici ce que rapporta au sujet de Bayonne la revue hebdomadaire La Côte Basque : revue illustrée
de l'Euzkalerria, le 7 mars 1926 :
"La Cité future.
Ainsi que le savent la plupart de nos lecteurs, la Municipalité de Bayonne, décidée à réaliser les embellissements et l'extension nécessaires à la prospérité croissante de la Ville, a chargé M. Martinet, l’architecte paysagiste réputé et l’un des plus remarquables urbanistes contemporains, de lui présenter un projet et des plans.
ARCHITECTE HENRI MARTINET PAYS BASQUE D'ANTAN |
Ce projet et ces plans, attendus avec impatience, viennent d'être soumis au Conseil municipal qui a été heureux de voir s'évoquer, grâce à eux, les possibilités d'une admirable cité future. Ces projets sont l'œuvre d'un grand artiste, qui, en les élaborant, a donné une fois de plus la mesure de son talent, sachant unir t’esthétique au sens pratique.
En effet, à côté du Palace, du Casino, des magnifiques avenues et du Parc des Sports projetés, sans compter la future "place des Basques" qui est une des plus belles conceptions urbaines de notre époque, l'auteur des projets a réservé des lotissements qui assureront à la Ville, en raison de la plus value des terrains, exceptionnellement mis en valeur, des ressources qui devront lui permettre d’effectuer une partie des travaux de très grande envergure dont chacun espère la réalisation aussi prochaine que possible.
Nous sommes heureux d'offrir à nos lecteurs la primeur du projet grandiose et des plans de M. Martinet, dont les illustrations de ce numéro leur donneront une idée. Elles sont la reproduction des maquettes actuellement exposées à la Mairie de Bayonne, et notre "Côte Basque" de ce jour sera à la fois un document intéressant et un souvenir curieux à conserver.
PROJET D'AMENAGEMENT BAYONNE 1926 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Pour l'explication du projet, nous laissons la parole à M. Martinet, qui l'a fort clairement exposé dans la lettre suivante adressée à M. le Maire de Bayonne :
Monsieur le Maire,
En vous remettant les projets dont le Conseil Municipal de Bayonne m’a fait l’honneur de me confier l’étude, je crois devoir vous indiquer les raisons qui m’ont fait adopter les différentes solutions que je vous propose, et pour lesquelles je me suis d’ailleurs inspiré des directives que vous avez bien voulu me donner.
La Ville de Bayonne, Capitale du Pays Basque français, peut et doit participer à l’essor aussi rapide que justifié de toute la région, et principalement de la Côte.
Est-ce à dire que la Ville de Bayonne doit s’ériger en concurrente des autres stations balnéaires, climatiques ou thermales du pays, et chercher à prélever sa clientèle sur celle de ces diverses stations ? Je ne le pense pas.
La Ville de Bayonne, déjà si séduisante par son aspect général, par l’ample perspective de son fleuve, par le charme de ses vieilles rues et de ses arceaux, par son caractère qui est celui d’une grande ville, possède des moyens propres d’assurer sa prospérité par des travaux d’extension et d’embellissement, qui en feront une cité différente de celles qui existent dans son voisinage. En ce faisant, elle ajoutera un nouveau fleuron au magnifique diadème du pays basque, au développement général duquel elle apportera ainsi une puissante contribution.
La Ville de Bayonne est une cité commerçante, gaie, active. Située à la porte de l'Espagne, elle doit devenir chaque jour, de plus en plus le centre des grandes affaires, non seulement pour la région française, mais encore dans les relations économiques avec l’Espagne.
Une nouvelle note d’art et d’élégance, qui n’est nullement incompatible avec le genre d’affaires qui s’y traitent, loin de nuire à son développement, ne pourra qu’y contribuer. Mais ce n’est pas seulement dans le champ des affaires purement commerciales que la Ville de Bayonne peut trouver une source de prospérité ; ses attraits sont trop nombreux el variés pour que sa population sédentaire ne soit pas susceptible de s’accroître considérablement, au profit de tous.
On sait, en effet, combien les personnes aisées de tous les pays ont maintenant tendance à rechercher les bienfaits du soleil et à aller fixer leur résidence sous des climats tempérés, chauds, comme ceux du Midi de la France. C’est ainsi que la Ville a vu, depuis une vingtaine d’années surtout, sa population s’accroître considérablement par l’afflux de propriétaires, de rentiers, de retraités, de sportsmen qui se contentaient, autrefois, d’aller passer quelques semaines, l’hiver, sur la côte d’Azur, mais qui se sont dit qu’il était préférable d'y vivre toute l’année, sauf pendant la période caniculaire dont nulle réclame, même la plus habile, sinon la plus tapageuse ne peut faire disparaître tous les inconvénients.
Or, est-il dans le monde, ou même simplement en Europe, un climat plus délicieusement tempéré que celui du pays basque, où, c’est aujourd’hui une vérité acquise, il est infiniment doux de vivre non pas seulement une partie de l'année, mais en tous temps ?
Pourquoi, dès lors, ne pas concevoir que la capitale du Labourd, faisant le pendant de Nice, n’attire à son tour, si l’on fait connaître au loin les avantages multiples qu’elle offre, beaucoup de ces gens aisés qui sont anxieux de découvrir un Eden pour y planter leur tente.
La Ville de Bayonne, se prête d’autant mieux à cette immigration que, tout en étant propice au repos, elle se trouve à deux pas des fêtes et des plaisirs qui, se succédant sans interruption dans les stations de la Côte, viennent s’ajouter à ses propres attractions.
C’est cette perspective favorable d’accroissement de la population qui m’a déterminé à prévoir, dans l’aménagement des glacis, des fortifications, des terrains à lotir, sur lesquels pourront être édifiés, des villas et des immeubles de rapport modernes, confortables et dignes en tous points des hôtes que nous voulons attirer et retenir.
Et c'est en m’inspirant de toutes ces considérations et de ces possibilités que j’ai crû devoir diviser le projet en cinq parties distinctes qui sont les suivantes :
1° L'emplacement des glacis nivelés entre la rue Militaire et les Allées Paulmy ;
2° Le parc public, ou Promenade des Remparts ;
3° Les terrains à lotir ;
4° Le Parc des Sports au Camp St-Léon ;
5° L'Hôtel et le Casino.
PLACE DES BASQUES BAYONNE PROJET MARTINET 1926 |
La Place des Basques.
Les Membres du Conseil Municipal qui assistaient, il y a quelques semaines, à la présentation sur le terrain de mon avant-projet ont tous été d’avis qu’il y avait lieu d’affecter le vaste espace libre situé entre la rue Militaire et les Allées Paulmy, d’une part, le Monument aux Morts et le Jardin Public, d’autre part, à la création d’une grande place publique, entourée de constructions d’un caractère architectural régional.
Cette partie des anciens remparts et des glacis se trouve, en effet, rattachée directement à l’ancienne ville, dont elle fait en quelque sorte partie intégrante, par suite de l’arasement sur ce point, des fortifications.
Depuis des années déjà, cette question, assez controversée, a fait l’objet d'études successives, dont aucune, jusqu’ici n’a été définitivement adoptée.
A mon avis, la meilleure utilisation de cet emplacement consisterait à construire en bordure de la rue Militaire de vastes édifices d'un style uniforme dont la destination sera fixée par la Municipalité, mais qui, en toute occurrence devraient comporter, au rez-de-chaussée, des arcades pour la promenade à l’abri, et des magasins. Ayant appris, au moment où j’ai commencé l’étude du projet, que la construction d’un nouvel Hôtel des Postes avait déjà été prévue dans l'axe de la place, en bordure de la rue Militaire, j'avais pensé que ce monument pourrait concourir à la décoration de la place et à cet effet, j’avais pris contact, sous les auspices de M. Henry Ader, toujours si dévoué aux intérêts de Bayonne, avec mon très distingué confrère, M. Godefroy, chargé de la construction de l’édifice. Mais, pour des motifs d’ordre budgétaire et de rapidité d’exécution, cette conception a dû être abandonnée et c’est pourquoi j’ai cru devoir présenter, en même temps que le projet primitivement élaboré, sous forme de vue d’ensemble, des variantes offrant d’autres solutions. Pour ma part, je crois devoir le dire immédiatement, je préférerais celle qui figure sur le grand plan d’ensemble, à l’échelle de un millimètre par mètre, ou toute autre s’en rapprochant le plus.
Pour le surplus de la place, comme l’espace restant libre entre ces constructions et les Allées Paulmy serait encore trop dénudé, il conviendrait, semble-t-il de l’entourer d’une colonnade ou galerie couverte, favorable à la promenade et à la circulation, dans une ville comme Bayonne, où darde souvent un soleil brûlant, et où il est permis de l’avouer ici, il pleut quelquefois.
Cette galerie permettrait notamment, aux habitants du Grand Bayonne de gagner, à l’abri du soleil ou de la pluie la gare du B. A. B. et la station des tramways de Biarritz.
Comme l’indique le plan, elle serait interrompue par de grandes arcades, dont les détails d’architecture symboliseraient les provinces basques. En outre, elle offrirait un avantage précieux : la possibilité à l’aide d’un matériel portatif et démontable, facile à remiser et réutilisable chaque année, d’être transformée en de nombreux magasins, aux époques des fêtes et kermesses, et d’une foire commerciale que Bayonne pourrait organiser chaque année, dans le but de faire connaître et apprécier, les produits de la région du Sud-Ouest, foire qui, comme celles de Lyon et Bordeaux, serait susceptible d’attirer de nombreux étrangers et particulièrement les acheteurs espagnols.
PLACE DES BASQUES BAYONNE PROJET MARTINET 1926 |
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