UN OURAGAN EN 1915.
Durant sa longue histoire, le Pays Basque et ses côtes, en particulier, ont subi de nombreuses tempêtes.
BAYONNE ALLEES PAULMY AVANT L'OURAGAN DU 22 FEVRIER 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Je vous ai déjà parlé de diverses tempêtes ayant frappé le Pays Basque, par exemple : en avril
1878, en février 1900, en août 1912, en janvier 1924, en juin 1933 et en décembre 1951.
Voici ce que rapporta la Gazette de Biarritz-Bayonne et Saint-Jean-de-Luz, dans son édition
du 23 février 1915 :
"Le Désastre d’hier.
Voici de nouveaux détails sur la tempête qui à fait tant de ravages dans notre région :
De mémoire d’homme, jamais une tempête ne fut aussi dévastatrice que celle qui ravagea, hier, Bayonne, ses promenades et ses environs. Pendant près de neuf heures, le vent souffla avec une violence inouïe, au grand affolement des habitants dont quelques-uns furent les malheureuses victimes de cet effroyable ouragan.
Aux Allées-Paulmy.
Un rédacteur de la "Gazette" se trouvait sur ce point charmant de Bayonne, au plus fort de la tempête. Les arbres gigantesques qui, de distance en distance, érigent leurs fûts empanachés de vert, en été, s’abattaient sur le sol dans un fracas terrifiant de branches cassées.
Quand la rafale se faisait plus violente, le piéton se trouvait immobilisé, s’arc-boutant contre le vent pour ne pas être brutalement projeté à terre. Le sifflement assourdissant du vent à la cime des arbres, était impressionnant au possible. A chaque pas, l'on risquait d’être broyé par la chute d’un de ces énormes ormeaux déracinés, ainsi que de grêles arbustes.
Tout le long de cette promenade, si appréciée des Bayonnais, c’est un enchevêtrement de troncs d’arbres, de branches en miettes, que les indigents viennent ramasser pour en garnir leur foyer.
Aux Allées-Marines.
Il fut un temps, avant l’établissement de la gare maritime, où l’ombrage des grands arbres s’étendait sur les Allées-Marines, depuis la route de Biarritz jusqu’au Pont de l’Aveugle. Depuis, tout a été transformé, et la partie respectée a été, hier, véritablement saccagée.
GARE MARITIME BAYONNE 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Là, aussi, ce fut une véritable hécatombe, Sur certains points, les allées disparaissent sous un amoncellement de branches brisées dont les cantonniers de la ville font d’énormes piles.
Au cours de cette mémorable tempête, l’Adour, boueuse, présenta l’aspect d’une mer agitée ; des lames d’une grande hauteur s’entrechoquaient, couvrant d’écume le fleuve en révolte. Les bateaux ancrés dans le port durent doubler leurs amarres ; ils roulaient et tanguaient d’une façon inquiétante. Des futailles, venues d’on ne sait où, dérivaient au fil de l’eau. Les petites barques de pêcheurs et les bateaux de plaisance étaient, presque tous, complètement submergés et flottaient entre deux eaux.
Dans les rues.
Le nombre de cheminées abattues, de contrevents arrachés, de tuiles et d’ardoises projetées à des distances appréciables, engins menaçant la sécurité publique, est considérable. Les rares passants qui se hasardaient dans les rues au moment de la tourmente, rasaient peureusement les maisons. Des débris de toute sorte tombaient à leurs pieds dans un fracas terrifiant. Une jeune femme vit se briser à ses côtés, une ardoise immense arrachée à la toiture d’une maison voisine.
Un ouvrier se rendant à son travail échappa, par miracle, à la mort ; une cheminée s’écrasa sur le sol, à quelques centimètres de lui. Des éclats de maçonnerie l’atteignirent même. Nous pourrions citer quantités de faits analogues. Pendant quelques heures, la panique régna dans notre ville.
Le garage de la Société Nautique, élégante construction en bois, avec salle de fêtes, buvette, bibliothèque, est,.., est en partie détruit.
Il pleut dans les halles, les toitures ayant beaucoup souffert. Les échafaudages de la gare du Midi, les palissades du Pont-Mayou et de diverses autres constructions ont été renversées.
PONT MAYOU BAYONNE 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
En résumé, les dégâts sont considérables.
Les victimes.
Au Allées-Paulmy, aux Allées-Marines, au camp St-Léon, les beaux ormeaux séculaires qui en étaient l’ornement ont beaucoup souffert. Une centaine ont été abattus par la tempête et gisent, brisés, sur le sol. La circulation du B. -A. -B. et du B.-L.-B. a été interrompue.
Malheureusement, il n’y a pas eu que des dégâts matériels. Deux personnes ont trouvé la mort au cours de ce terrifiant cyclone.
Le jeune Hubert Dibart, 16 ans, élève au Lycée de notre ville, se rendait à Bayonne vers huit heures, pour prendre le tramway à destination du Lycée. Arrivé à la station "Les Arènes", Allées-Paulmy, un gros arbre s’abattit sur lui.
PORTE D'ESPAGNE BAYONNE 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
M. Grégoire, commissaire central, qui se trouvait non loin du lieu de l’accident, se porta au secours du jeune homme. Lorsqu’il fut dégagé, il respirait encore, mais pendant son transport, il rendit le dernier soupir. La tête et le thorax étaient complètement broyés. Le docteur Dordosgoïty, appelé, ne put que constater le décès.
Le jeune Dibart est le fils du capitaine au 49e, en traitement dans une ambulance du front à la suite d’une deuxième blessure reçue au Champ d’honneur.
Presque à la même heure, une laitière d’Anglet, Clarisse Farabos, épouse Susbielle, 59 ans, conduisait son attelage sur la route qui borde le camp St-Léon. Elle fut tuée net par la chute d’un arbre énorme.
PLACE DU REDUIT BAYONNE 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Dans les environs du cimetière, cinq enfants se trouvèrent pris dans les branchages d’un arbre renversé par la violence du vent. On les releva blessés plus ou moins grièvement.
Une grande partie de la toiture de la Halle a été arrachée. Le garage de la Société Nautique, sur les bords de l’Adour, est presque entièrement détruit. La gare du Midi où s’accomplissent, actuellement, des travaux en vue de sa prochaine reconstruction, a été sérieusement endommagée.
Les dégâts causés par la tempête n’ont pas été encore évalués. Ils doivent être considérables.
Dans la matinée.
La bourrasque, quoique moins violente, s’est maintenue ce matin. La pluie est tombée avec abondance. La grêle, ensuite, a recouvert la ville et les campagnes environnantes d’une épaisse couche blanche. Il a tonné à plusieurs reprises. Puis, vers midi, quelques éclaircies se sont produites. Le vent est tombé et le soleil, pâle, éclaire le triste carnage fait dans notre région par les éléments déchaînés.
A Biarritz.
GARE DU MIDI ET JARDIN PUBLIC BIARRITZ 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Les détails nouveaux abondent sur les dégâts de la tempête.
Tous les parcs de la ville et des environs ont été saccagés ; Aguiléra a beaucoup souffert et une douzaine d’arbres ont été déracinés ; les propriétés Thorold, Tamamès, La Rochefoucauld, Sapieha, Frias ont perdu beaucoup de leurs plus beaux arbres.
CHALET NADAILLAC BIARRITZ 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
On nous signale que toute la côte a été aussi impitoyablement traitée, depuis Hendaye jusqu’à Arcachon.
La violence des éléments était telle que, par exemple, la toiture de la maison Bellevue (Côte des Basques) a été arrachée et projetée à 150 mètres de là, sur des maisons qui ont été littéralement défoncées.
Dans plusieurs maisons, les étages supérieurs ont été mis à découvert par la chute du faîtage et la pluie a pénétré d’étage en étage jusqu’au rez-de-chaussée.
CASINO MUNICIPAL BIARRITZ 1915 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire