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mercredi 27 septembre 2017

ORGANISATION DE LA CHASSE AU PAYS BASQUE NORD EN 1930

EN 1930, SE CRÉENT AU PAYS BASQUE NORD PLUSIEURS SOCIÉTÉS DE CHASSE.

En effet, les chasseurs tentent de s'organiser dans plusieurs communes, en Labourd, en particulier.


Avant 1930, la chasse était soit réservée à une élite qui chassait le renard, les vautours ou bien à 

des "gens du peuple" chassant de façon individuelle le gibier.



On trouvait hélas aussi de très nombreux braconniers qui faisaient diminuer la ressource.



pays basque 1900
CHASSE AUX VAUTOURS ASCAIN - AZKAINE
PAYS BASQUE D'ANTAN



pays basque 1900
CHASSE AU RENARD A BOUCAU - BOKALE
PAYS BASQUE D'ANTAN



pays basque autrefois
LES VENEURS BIARROTS
PAYS BASQUE D'ANTAN

La presse locale informe régulièrement ses lecteurs de ces diverses tentatives d'organisation et 

le débat commence entre les pro et les anti sociétés de chasse.

En voici, ci-après quelques exemples :


  • La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque, le 21 août 1930, informe :

"Une importante Société de Chasse vient de se fonder Elle englobe Saint-Pée, Arcangues, Ahetze, Arbonne et Bassussarry.

Il y a quelque temps déjà s’est formée une société de chasse désignée sous le nom de : "Société des Chasseurs Basques", dont les territoires s'étendent sur les cinq villages suivants : St-Pée, Ahetze, Arbonne, Arcangues et Bassussarry. 

Tout le monde a été stupéfait de la rapidité et de la facilité avec laquelle cette société s'est constituée. En masse, chasseurs et propriétaires des villages cités plus haut ont donné leur adhésion à la nouvelle société et se sont montrés ravis de se trouver enfin unis et défendus contre le vandalisme et le braconnage de chasseurs peu scrupuleux. 

Car pour défendre les cinq communes unies contre les braconniers et les maraudeurs, la Société des chasseurs Basques a déjà pris d’énergiques mesures. 

Une trentaine de gardes assermentés sont prêts à faire la police et à vérifier les cartes de chacun pour le jour de l'ouverture, car personne ne pourra chasser sur le territoire de cette société sans être muni, au préalable, de la carte qui seule y donne droit. 

La Société des Chasseurs Basques, dont le Dr Henri Courrèges est président, poursuit les buts suivants : 

1. Préservation du gibier contre le braconnage. 

2. Destruction des animaux nuisibles. 

3. Repeuplement du gibier sédentaire

4. Sauvegarde des droits des propriétaires. 

Des gardes de métier, connaissant à fond l’élevage du gibier et la destruction des animaux nuisibles, développeront dans les importantes "réserves" de chaque commune, le gibier sédentaire (faisans, perdrix, lièvres) qui, jusqu'à maintenant a fait tant défaut dans notre région. 

Nous félicitons bien vivement le Dr Henri Courrèges, M. Germain Irigoin, M. Pierre Legasse, ainsi que les autres initiateurs de ce mouvement, d'avoir mené à si bonne fin leur œuvre bienfaisante. 

Grâce au mouvement déclenché par eux, de nombreux villages désireux de sauvegarder leurs intérêts, vont à leur tour, établir des sociétés sur des bases identiques."


  • La Gazette de Bayonne, le 25 novembre 1930, poursuit :

"Sous ce titre, la Petite Gironde publie le manifeste que nous reproduisons ci-dessous, signé : "Un groupe de chasseurs de Guéthary" : 


Guéthary est, comme chacun sait, un petit village assez restreint ; si l'on estimait la valeur de la station à sa superficie, à son nombre d’hectares, il est évident que le coin préféré des artistes et des ambassadeurs, gens de goût, je suppose, ne vaudrait pas lourd. Il n’en est heureusement pas ainsi, et la qualité supplée largement à la quantité. 


D’accord, mais cela ne fait pas l'affaire des chasseurs, qui, les dimanches et jours de fête, recherchent les vastes espaces, les bois, les taillis où le gibier peut, avec quelque chance de succès, se cacher et échapper à l'hécatombe. Quand arrive la saison de chasse, une seule préoccupation hante le cerveau des nemrods : prendre le permis en temps voulu ; et c'est avec joie qu'en cette occasion, peut-être unique, ils déboursent 45 francs pour faire l’ouverture. Mais où faire l’ouverture? Sur la plage ? Guéthary, grand comme un mouchoir de poche, ne compte ni plaine, ni bois, ni taillis. Où donc chasser ? A Ahetze, à Saint-Pée, que sais-je ? Stop, messieurs les Chasseurs ! Vous n’avez pas le droit d’y chasser, le permis ne vous sert à rien ; si vous voulez chasser à Ahetze, il vous faut payer à une certaine Société la somme de mille francs, somme ridicule qui ne tend qu'à empêcher tous ceux qui ne possèdent pas une grosse fortune de chasser, au profit de certains égoïstes ; mesure antidémocratique, qui si elle était réalisable, nous ramènerait tout simplement au temps des seigneurs chassant à courre au travers des champs ensemencés. 



Mais est-elle réalisable, cette mesure ? Pas le moins du monde. Un beau jour, deux messieurs sont allés rendre visite aux paysans; ils s'étaient même fait, pour la circonstance, escorter par un jeune séminariste de première année : la soutane, en Pays Basque, risque d’avoir son influence. Le trio s’est donc présenté dans de nombreuses fermes, avec une mission sacrée. Il s’agissait de défendre la campagne contre la ville, les champs et les récoltes contre ceux qui les parcourent en tous sens et portent à ces dernières les plus grands dommages. Si les paysans le voulaient bien, les ouvriers des villes, les bourgeois qui n’ont rien à faire, resteraient chez eux, tandis que la sacro-sainte Société garderait le gibier pour elle et s’occuperait de repeupler le pays. Certains paysans surpris, trompés, signèrent, sans s’en douter, la déclaration de guerre de la campagne à la ville sous la pression de ce trio; alors que ville et campagne devraient, au contraire, se tendre une main fraternelle, car si la ville a besoin do la campagne, la campagne a besoin également de la ville pour écouler ses produits du sol tels que légumes, fruits, volailles, beurre et surtout lait. 



Oh ! ces paysans qui signèrent, soit qu'ils fussent surpris pendant leur sieste, soit qu’ils ne comprissent pas les explications et ne virent qu’un avantage, une rétribution à retirer de la location de leur propriété, ne furent pas nombreux, loin de là ; ils furent un bien petit nombre. Le bon sens basque dépasse bien souvent, en effet, l’intelligence de gens mieux lettrés, mais dont l’instruction est souvent camouflée par les sentiments d'égoïsme ou le parti-pris. 



Certains donc signèrent par surprise, trompés par les promesses de ces beaux messieurs. Pour la location de leurs propriétés, ils n’ont pas touché même un centime ; quant au repeuplement en gibier, il est absolument impossible dans une zone de dix kilomètres de profondeur en bordure de la Côte Basque. La surpopulation de la côte est telle qu'il suffirait aux chasseurs de se mettre, un dimanche, en tirailleurs, à dix mètres d'intervalle, pour balayer tout le terrain, et quelle pièce de gibier pourrait se sauver ! Dans notre région, il ne faut compter que sur le gibier de passage : cailles, râles, canepetières, bécasses, palombes, tourterelles, gibier d'eau, etc. En fait de gibier sédentaire, seul le lièvre et le lapin peuvent se défendre, l’un grâce au voisinage de la montagne, l’autre grâce à ses garennes. L’offre de repeuplement en perdreaux, faisans, que sais-je ? n’était donc qu’une vaste fumisterie. Quant à la location des propriétés aux paysans, ces derniers ne toucheront pas un centime, cela coûterait trop cher. Aussi voyons-nous les braves paysans qui ont signé sans savoir ce à quoi ils s’engageaient regretter leur acte, arrêter les chasseurs étrangers pour les inviter à chasser sur leurs terres, bien qu’ils aient donné leur signature. Ils envient le sort de ceux qui, plus malins, ne se sont pas laissé faire et ont envoyé promener les solliciteurs qui voulaient les faire signer. Ils se trouvent à ce point confus et dépités qu'ils n’osent même plus aller vendre leur lait et leurs légumes à la ville voisine. Et c’est cela que l'on appelle une chasse gardée! Non, c'est tout simplement une "fausse" chasse usurpée au mépris de la bonne foi de quelques braves paysans désolés du geste inamical qui leur a été suggéré, imposé par certains profiteurs. 



Les chasses gardées peuvent obtenir de l’Etat pour le repeuplement, des indemnités quand ce repeuplement n’est pas fait dans un but égoïste. Ce dernier mot est la condamnation sans appel de cette Société, qui, dans un but intéressé et par antidémocratie, prétend faire payer mille francs aux chasseurs désireux de passer sur certaines terres qui ne lui appartiennent pas et dont elle n’a même pas payé la location. 



Et, pour terminer, nous mettons au défi les organisateurs de chasse dite gardée qui se sont rendus chez les paysans pour obtenir leur signature, soit par surprise, soit par duperie, de s'y présenter de nouveau en notre présence. S’ils acceptent notre offre, ils verront que pas un seul de nos paysans basques ne veut la guerre entre la ville et la campagne, qu'ils sont tous partisans et conservateurs des vieilles traditions basques d’hospitalité et de liberté ; que les idées d’indépendance sont plus que jamais ancrées dans leur cerveau et dans leur cœur. Enfin, ils entendront dire par ceux-là mêmes auxquels ils ont soustrait la signature et qui sont navrés de leur geste : "Venez chasser chez nous, ils nous ont trompés !"


Nous lançons le défi ; à ces messieurs de le relever ! 



Oh ! oh !... voilà qui sent la poudre et les balles. Heureusement que c'est seulement aux oiseaux qu'elles sont destinées ! "


  • La Gazette de Bayonne, le 29 novembre 1930 continue :


"Nous recevons la lettre suivante : Nous voici bien surpris, nous chasseurs d’Ahetze, à la lecture sur deux journaux, d’un long article, assez vexant, nous traitant de braves gens, un peu... simples, qui se sont laissé rouler par trois Messieurs (merci pour la trinité) qui seraient venus de porte en porte extorquer nos signatures en faveur d’une certaine Société de Chasse. 



Et d’abord, depuis quand nous est-il défendu de donner nos signatures à qui nous semble bon, surtout lorsque les gens qui nous la demandent, en nous en expliquant loyalement les raisons, sont tous sympathiques et honorablement connus dans le pays ? S’il s était agi de quelques gens de passage, plus ou moins gascons ou marseillais, alors la chose aurait été différente. 



Ces Messieurs de Guéthary, certes, étaient très gentils de venir fouler notre herbe sans que nous ayons à leur dire: merci ! Il nous était assez agréable de les voir parcourir nos taillis, égratignés par les ronces et traînant péniblement leur attirail de chasse et leur gibecière lourde... en provisions. 



Au point de vue de la destruction du gibier, ils n'étaient évidemment pas dangereux. Mais tout le monde sait que les coups de fusil tirés à tort et à travers éloignent le gibier et en privent les véritables chasseurs. 



Aussi, comme nous n’avons pas comme ces bons Messieurs de Guéthary la plage et les gracieuses baigneuses pour nous distraire, que nous devons nous contenter des modestes distractions de la campagne : pelote et chasse, pour passer nos dimanches et nos jours fériés, nous sommes-nous laissés facilement aller à une proposition avantageuse pour tous. Il s’agissait d’organiser une Société de chasse et de se fédérer avec Saint-Pée qui était déjà organisé depuis cinq années. 



Or, au nom de Saint-Pée, tout chasseur sent battre son cœur, si réellement il est chasseur de bécasse. Saint-Pée n'est-il pas un lieu de chasse exceptionnel dans toute la région ? Ses landes désertes, ses bois et ses taillis ; son étendue un peu sauvage en font un lieu de prédilection tant pour le gibier de passage que pour le gibier sédentaire. C'est là que viendront le mieux les lièvres et les perdreaux lorsque, chaque année, des lâchers de gibier seront organisés. 


Mais n’insistons pas sur tous ces avantages qui ne font pas du tout l'affaire de Guéthary. En bons condisciples en saint Hubert, nous leur réservons beaucoup mieux ! 

1. D’abord, un bon conseil : 

Au lieu d’aller ainsi se fatiguer, ce qui n’est pas du tout recommandé aux vieux rhumatisants, qu’ils se consolent et se réjouissent. Leurs halles étant, à présent que Guéthary a conquis au soleil la place qu’il mérite, des mieux approvisionnées, au dire des plus fins gourmets. Le groupe des Nemrods en question pourra y trouver, sans frais de déplacement, du gibier de toute espèce. Les ménagères en resteront bouche bée. 


2. Ne dites pas, Messieurs les anonymes, que le repeuplement en gibier est chose impossible dans ce pays. Nous sommes persuadés, tout au contraire, même si vous deviez nous traiter d’optimistes, que certains gibiers sédentaires s’acclimateront très bien chez nous. 


Le lièvre, d’abord, s’y accroîtra rapidement et nous serions fort étonnés que les perdrix rouges rechignent devant les belles landes bien abritées qui leur seront offertes et les réserves ensemencées de sarrasin. 


Ce n’est pas tout : nous voulons terminer par une nouvelle qui vous fera certainement plaisir. Vous n’ignorez pas que de nombreux villages basques ont monté des Sociétés de chasse. Ces Sociétés ont l’inconvénient de séparer les communes et d’empêcher tous les étrangers d’y pratiquer la chasse. Ah ! pauvres gens qui vous croyez malins ! vous devriez — nous sommes peut-être indiscrets de vendre si tôt la mèche — remercier la Société que vous prétendez égoïste et qui est assez bien intentionnée pour défendre malgré vous vos intérêts. 


Dimanche, à Biarritz, une importante réunion de toutes les Sociétés de chasse existant dans le Pays Basque, aura pour but de créer une large Fédération qui pourra ainsi, vue l’étendue de ses territoires, ouvrir ses portes à tous les chasseurs des villes pour un prix certainement moins élevé que ceux, gens malins, que vous faites payer aux étrangers de passage qui viennent goûter les charmes de votre village. 


Saluez, Messieurs, et permettez aux humbles chasseurs d’Ahetze d’émettre le vœu suivant : "Un groupe de chasseurs d’Ahetze adresse aux dirigeants de la Fédération de chasse du pays du Labourd ses félicitations pour l’œuvre commencée et le travail déjà accompli. Ils les encouragent à continuer dans cette même voie, malgré les critiques d’esprits jaloux et intéressés. Ils les félicitent de leur initiative de grouper toute une partie du Pays Basque dans une même Fédération et les assurent de leur sympathie et de leur dévouement." 


Un groupe de Chasseurs d’Ahetze."



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