L'ÉTÉ 1936 AU PAYS BASQUE NORD.
Après le chassé-croisé des vacanciers et des réfugiés à Hendaye, d'autres communes du Pays Basque Nord voient arriver le flot des aoûtiens de 1936.
Un mois après son arrivée au pouvoir, le Front Populaire généralise les congés payés en France.
La loi est votée à l'unanimité par les députés le 11 juin 1936 et promulguée le 20 juin 1936.
Elle prescrit un minimum de deux semaines de congés par an pour tous les salariés français liés
à leur employeur par un contrat de travail.
Durant l'été 1936, le Pays Basque connaît un afflux de touristes découvrant pour la première
fois cette destination ou revenant "au pays" pour tous ceux qui étaient montés travailler à
Paris, par exemple.
PLAGE DU PORT-VIEUX BIARRITZ - MIARRITZE 1936 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Pour la première fois depuis longtemps, en août, des jeunes femmes "placées bonnes à Paris"
reviennent au pays.
Ce fut l'été des retrouvailles et de la fraternité.
Tout le monde sympathisait.
Des deux côtés de la Nive, des étrangers se saluaient, poing levé.
Les gens chantaient les chansons de l'époque : "Marinella" de Tino Rossi, "Du soleil dans ses
yeux" de Damia ou "Quand on se promène au bord de l'eau" de Jean Gabin.
Des couples, costumés en jumeaux, escaladent la montagne basque à tandem, poussent par la
falaise jusqu'à Bidart ou Saint-Jean-de-Luz.
VILLAS A VENDRE CALITCHO URRUGNE 1936 PAYS BASQUE D'ANTAN |
A Urrugne, à Calitcho, on vend des villas sur des terrains morcelés avec "vue panoramique
incomparable".
La route de la Corniche est en travaux, l'aménagement de la falaise de la Côte des Basques
aussi.
La Gazette de Bayonne, de Biarritz et du Pays Basque, le 26 septembre 1936 informait :
"Le réseau routier de la Côte Basque est désormais en parfait état. Il faut féliciter les Ponts-et-Chaussées tout en souhaitant la réalisation prochaine de certains projets.
... C'est bien vrai que depuis Bayonne, au départ des spacieuses allées Paulmy jusqu'à Hendaye, il fait bon rouler. L'effort entrepris par les Ponts et Chaussées est méritoire : les effets qu'il provoque sont particulièrement satisfaisants, car ils augmentent sensiblement la renommé et le prestige d'une région déjà très privilégiée. Le meilleur accueil, celui qui impressionne en premier lieu et le plus favorablement le touriste, est constitué par le fait de lui offrir de bonnes, de larges routes."
Face à la "horde" annoncée, Biarritz avait anticipé à sa façon.
Le 16 juin 1936, un arrêté municipal a décrété "l'obligation de renoncer à l'exécrable habitude
de se déshabiller et de se rhabiller sur le sable... De telles licences, intolérables, seront
sévèrement réprimées."
PUBLICITE CHEMINS DE FER POUR BIARRITZ PAYS BASQUE D'ANTAN |
Dorénavant, "des cabines communes seront mises à disposition des ouvriers et employés à des
conditions répondant à leurs moyens, 0,25 franc de l'heure".
Les vacances coûtent cher.
La paye mensuelle des ouvriers plafonne à 625 francs et une journée dans la plus modeste
pension de famille coûte 62 francs.
Les tarifs dégressifs proposés par les hôteliers ne les concernent pas.
Le Front populaire contrarie les Biarrots.
CARICATURE VACANCES CONGES PAYS 1936 PAYS BASQUE D'ANTAN |
Au printemps, le personnel hôtelier a brandi le drapeau rouge pour faire appliquer les
nouvelles lois sociales .
Plusieurs hôtels ont failli rester fermés.
Les "événements" d'Espagne, à la une de la presse internationale, ajoutent à la confusion.
M. Ferdinand Hirigoyen, maire de Biarritz (liste de Concorde et d'Action Républicaine), a
beau diffuser des communiqués radiophoniques rassurants, la "bonne clientèle" annule en
cascade.
De luxueuses réclames, pourtant, vantent dans l'Europe entière le concours d'élégance
automobile, le terrain de polo, ou la grande plage chère à l'impératrice Eugénie de Montijo.
"Plus vous resterez, moins chers seront les tarifs", lit-on dans la presse internationale comme
le le Daily Telegraph ou The Times.
Rien n'a été prévu, en revanche, pour l'accueil des congés payés.
Leur arrivée dérange.
Fin août, la situation est jugée catastrophique.
Biarritz, 20 000 habitants, 2 000 chômeurs, ne veut pas du tourisme de masse et s'accroche au
"tourisme de qualité".
Au Boucau, frontière nord des Basses-Pyrénées, on s'émerveille.
Les Forges de l'Adour, monstre industriel, ferment quinze jours ; 2 000 ouvriers découvrent,
non pas les vacances, mais "le repos".
FORGES DE L'ADOUR BOUCAU - BOKALE PAYS BASQUE D'ANTAN |
Au Boucau, cité industrielle, pas de touristes. Les gens restent chez eux.
Ils bricolent, partent en pique-nique avec les paniers d'osier qui servent à l'usine.
Parfois, c'est tout le quartier qui s'échappe à vélo dans la pinède.
Le soir, on danse dans des bals improvisés.
PLAGE DE LA PETITE MER BOUCAU - BOKALE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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