IMPRESSIONS SUR LE PAYS BASQUE EN 1919.
En juillet 1919, on redécouvre, dans la presse, le Pays Basque.
LA REVUE MONDIALE OCTOBRE 1919 |
Voici ce que rapporta à ce sujet La Revue Mondiale, dans son édition du 1 juillet 1919 :
"Impressions sur le Pays Basque.
...La maison a sa porte avec dispositions en ogive ; c’est, dit M. O'Shea, plus qu’une chose, c’est une personne, avec ses droits, son état civil et qui donne même son nom à ses habitants, le leur propre étant souvent ignoré. La maison familiale se nomme en basque etche-ondo, c’est-à-dire maison-souche. Le grand économiste Le Play l’ignorait sans doute quand il a fait la famille-souche. Elle n’est pas symétrique ; l’axe du toit ne passe pas au milieu de la maison, aussi une partie du toit est plus large que l’autre.
La chambre nuptiale du jeune ménage est particulièrement soignée et ornée. On prétend même, la Chronique Médicale l’a rapporté, M. L. Etcheverry également, qu’assez récemment encore, on a vu dans certains villages du pays basque, le mari y prendre la place de sa femme après les couches de celle-ci, et y recevoir les compliments des parents. Cette coutume (Strabon) renouvelée des Ibères, a sans doute été transmise aux Basques par cette voie (Marco Polo signale cette coutume chez les Tartares, et Diodore de Sicile en Corse.)
Le contenu des maisons est aussi confortable que l’aspect extérieur. Des armoires pleines de linge sont dans les chambres, beaucoup de linge de corps et de table. Un beau vaisselier garni de plats et d’assiettes, des brocs de cuivre et d’étain, le tout étincelant, figurent dans les cuisines qui sont d’ailleurs les lieux de réception et de longues causeries en basque.
Les vêtements sont cossus et simples. La robe de laine noire, la mantille épaisse recouvrant le visage d’aspect monacal sont la tenue féminine d’enterrement et de l’église ; les hommes, rasés, chauves le plus souvent, — je l’attribue au béret jamais quitté que par politesse, — le Basque est très poli pour ses relations et pour les étrangers qu’il sait étudier et juger. Le béret tient le cuir chevelu en serre chaude. Blouse à l’ordinaire. Les bérets sont en noir, avec la cape pour l’église ou l’enterrement. Couramment, la femme porte le mouchoir de tête ; l’homme le béret bleu foncé, et tous, des espadrilles à semelles de corde par les temps secs. Mais la coquetterie des villes, les chapeaux, les chaussures, pénètrent de plus en plus.
DEUIL AU PAYS BASQUE DESSIN DE LE TANNEUR |
IV. — Un Type de Commune Basque : Saint-Jean-le-Vieux.
SAINT-JEAN-LE-VIEUX BASSE-NAVARRE PAYS BASQUE D'ANTAN |
En 1897, la Société des Agriculteurs de France, ouvrit un Concours pour des "monographies de communes". Depuis, une trentaine d années, cet exposé de la vie des Communes, dressé localement par les curés, les instituteurs, les archéologues ou historiens de la région, étaient très à la mode. On comprend aisément quelles sources de documentations et de comparaisons - donc de progrès - ressortissaient de ces exposés. Le pays basque, avec ses traditions conservées et ses conséquences, devait nécessairement intervenir. Parmi les mémoires primés en 1897 - quatre seulement - est celui de M. L. Etcheverry, ancien député de Mauléon sur la commune de Saint-Jean-le-Vieux sur la route de Saint-Jean-Pied-de-Port à Saint-Palais. Nous allons y recourir, car avec les traditions conservées, c'est décrire tout le pays basque. Si tous nos pays envahis et détruits avaient été ainsi étudiés, combien serait facile serait la reconstitution et la régénération !
M. L. Etcheverry, - et le regretté E. Cheysson, rapporteur, le rappelle, - avait pris pour devise cette citation de l'économiste Le Play en sa Réforme Sociale : "Chaque localité, pourvu qu'elle adopte le Décalogue pour loi suprême, trouve en elle-même toutes les satisfactions que procurent la jouissance du pain quotidien et le règne de la paix Sociale." C'est dire l'esprit du mémoire et l'esprit dominant du pays du reste.
Saint-Jean-le-Vieux est un lieu de passage (port) vers l'Espagne, à 12 kilomètres de la frontière, à 4 kilomètres de Saint-Jean-Pied-de-Port, lequel est à 8 kilomètres d'Arneguy, village frontière, où la contrebande jadis florissante, est encore un peu à la mode.
Tous les grands courants d'invasions et de peuples ont passé par ici, mais si l'on juge par la conservation de la langue basque (dont l'origine est inconnue), on peut en conclure que les passants, et non les conquérants, laissèrent peu de traces dans toute la région, Saint-Jean-le-Vieux, Saint-Jean-Pied-de-Port...Annibal, les Romains, Charlemagne, Roland...ont traversé. Saint-Jean-le-Vieux avait trois châteaux ; l'un d'eux, celui de Salha, a été démoli en 1178 par Richard Coeur de Lion en personne. Après les guerriers, les pèlerins passèrent, allant, soit vers Roncevaux, "où se donne grand pardon", soit vers Saint-Jacques de Compostelle. Puis ce sont les guerres civiles entre l'infant don Carlos, prince de Viana et son père ; de religion, avec le retour des invasions et du pillage et le château d'Yrumberry est brûlé par les armées de Jeanne d'Albret, avec Montgomery et les protestants. Saint-Jean-Pied-de-Port, alors évêché voisin, avec sa citadelle toujours existante, sa cathédrale, a sa part de ces ravages. La "Revue Internationale des Etudes Basques" avec ses épisodes de la "guerre civile de Navarre" par Jean de Jaurgain, d'après le bailli Pedro - Paris de Jassu, 1451-1455, et son actuel curé doyen M. P. Garacotche, ont écrit d'intéressantes pages documentées sur ces temps troublés ; l'abbé Etchegaray, raconte le chroniqueur Ugarte, fut l'âme de la résistance en ce pays qui garda sa foi catholique ardente, à côté des voisins protestants. Puis, c'est la paix, aux XVIIe et XVIIIe siècles. Les guerres de la République et de l'Empire, ont encore là, leur contre-coup, et en 1814, les armées anglo-espagnoles occupent le pays.
La dépopulation a fait, à Saint-Jean-le-Vieux, ses ravages comme partout. Depuis 1613, on a les registres des baptêmes, mariages et enterrements ; de 1613 à 1623 (1618 manque), on a 153 baptêmes ; de 1627 à 1636, 183 pour 57 décès et 43 mariages ; de 1713 à 1722, 164 baptêmes, 112 décès, 42 mariages ; en 1792, la population était de 1 474 habitants ; elle était de 1 047 en 1841 ; de 1 121 en 1846 ; on comptait encore 1 137 en 1856 ; 955, en 1866 ; 927 en 1876 ; 915 en 1896. Depuis la population est restée stationnaire entre 920 et 950 - dont 650 autochtones et 80 Bohémiens. Les naissances ont varié de 11, en 1916 ; à 18 en 1915 ; 19, en 1896 ; 26 en 1902-1907, à 29 en 1899 ;...les mariages, de 2 en 1896 et 1915 ; à 8 en 1906 et 1913 ; et 9, en 1904 et 1910 ; ...les décès, de 6 en 1898 ; à 18 en 1903, 1906, 1907 ; à 22, en 1901 (moyenne 14 à 15) ; renseignements fournis par l'abbé Gombault, curé de la paroisse. (Beaucoup de prêtres sont au pays basque, greffiers de mairie, au lieu et place des instituteurs)."
SAINT-JEAN-LE-VIEUX BASSE-NAVARRE PAYS BASQUE D'ANTAN |
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