L'AVIATION ALLEMANDE EN PAYS BASQUE SUD EN 1938.
Dès 1938, avant la Seconde Guerre mondiale, l'aviation allemande est positionnée en Pays Basque Sud.
Voici ce que rapporta à ce sujet le quotidien L'Oeuvre, le 30 mai 1938, sous la plume d'André
Morizet :
"L'aviation allemande en Espagne.
Pour l'Espagne, çà ? Peut-être. Mais pour la France, certainement.
La carte que voici n'a pas été dressée d'après des renseignements incertains. Elle est le résultat, tel qu'il m'a été donné de le connaître, des relevés opérés par l'aviation des républicains espagnols. On n'en saurait contester la sûreté ni la précision.
Elle indique les champs d'aviation qu'utilise à l'heure actuelle l'armée "franquiste" entre les Pyrénées et la meseta, le plateau aragonais-castillan. Là où, sur le croquis, un avion est tracé se trouve un terrain plus ou moins complètement aménagé. Là où sont tracés un, deux ou trois avions entourés d'un cercle, se trouvent un, deux ou trois terrains complètement aménagés avec abris, hangars et réservoirs souterrains.
Un examen rapide suffit à montrer à quoi ces installations sont destinées. On peut prétendre sans doute que celle de Sariñena et de Bujalaroz sont nécessaires aux opérations actuelles sur la Noguera et la Sègre, mais on ne saurait soutenir sérieusement qu'il en est de même pour les autres.
SARIÑENA HUESCA ESPAGNE |
Tudela se trouve à 170 kilomètres, Logroño à 270 kilomètres, Lazarte à 300 kilomètres, Vitoria à 350 kilomètres du front de Catalogne. Par contre, pour atteindre la frontière française il n'y a que 100 km. de vol depuis Tudela, 90 depuis Vitoria, 50 depuis Pampelune, 20 depuis Lazarte.
La distance qui sépare le cours de l'Ebre, axe général des champs d'aviation "franquistes", du sommet des Pyrénées, varie de 100 à 150 kilomètres entre Logroño et Saragosse. C'est-à-dire qu'un avion de bombardement partant de l'Ebre n'a parcouru, lorsqu'il arrive aux limites françaises, que le cinquième environ de son rayon d'action.
Or ces installations, inutiles pour la guerre actuelle, placées en des lieux où les hostilités ne se dérouleront vraisemblablement plus, on y travaille encore à cette heure même, on continue toujours à les équiper.
Pourquoi ? Si ce n'est parce qu'elles font partie d'un large plan de préparation à une autre guerre, plus longuement étudié, dont toutes les parties se tiennent. et qu'on peut lire sur le sol même ?
Les provinces du Nord, aux mains de techniciens allemands de l'aéronautique et de la métallurgie, sont devenues la vaste place d'armes qu'un foyer d'attaque excentrique rendrait indispensable dans un conflit général se déroulant sur mer, sur terre et dans les airs.
Pasajes, Bilbao, Santoña, sur la côte cantabrique, constituent dès maintenant de redoutables bases navales.
Le camp retranché de Oyarzun, à Saint-Sébastien, a vu modifier ses fortifications archaïques et les forts de Guadalupe, San Cristobal, San Nicolas, les monts Igueldo et Ulia se hérissent, aujourd'hui de batteries lourdes à grande puissance.
A Eibar, Beasain, Bernedo, Vera de Bidassoa, Galdacano, Riabaja del Nervion, des ingénieurs allemands dirigent la fabrication du matériel de guerre. Aux hauts fourneaux de Bilbao, aux aciéries de Reinosa (Santander) d'où sortent des canons et des plaques de blindage, à l'arsenal du Ferrol, à la fabrique de bombes d'Alarejos (Valladolid), à la raffinerie de Venta de Banols (Palencia), commandement et personnel de maîtrise sont allemands. La succursale de Michelin, à Lazarte, qui est la grande usine caoutchoutière de la péninsule, travaille à plein rendement.
Tout cela — techniciens des fabrications et combattants de l'aviation, de l'artillerie et du génie se montent à 15 ou 20 000 hommes — marche sous l'impulsion d'un général qui porte le titre de chef de la "Junta militar interaliada" ; ainsi s'intitule le grand état-major "franquiste". Celui-là, qui décide des opérations et a la haute main sur toute la guerre, s'appelle Von Heuser.
Il délègue ses compatriotes dans les chaires des académies militaires de Fuentes Calientes (Soria), San Roque (Cadix), Tafalla (Navarre) et du centre d'études militaires d'Oropesa (Tolède) où sont formés les officiers de troupe et les officiers d'état-major, aux écoles de Santander et de Jerez où sont formés les aviateurs.
Sa légion Condor — ainsi se nomme, on le sait, le corps des aviateurs allemands en Espagne — a son état-major général à Baños de Fitero (Navarre), ses états-majors secondaires à Burgos et Saragosse. Elle possède des aérodromes dans la Vieille Castille, à Léon, Burgo de Osma, La Cenia, un parc d'artillerie antiaérienne à Valderrobres.
LEGION CONDOR 1939 |
Une "Jefatura del Aire" — commandement de l'aviation — vient d'être créée cette année même à notre frontière, à Saint-Sébastien.
Ces faits se dispensent, n'est-ce pas, de commentaires ? Il y en aurait bien d'autres à citer. Je n'ai point parlé des bases établies par l'Allemagne au Maroc espagnol, aux Canaries, à Ifni, dont la seule raison d'être est de couper en cas de guerre la France de l'Afrique française, comme celles que l'Italie a installées à Palma, Alcudia et Pollença (Majorque), à Ibiza et à Formentera.
LEGION CONDOR BARCELONE 1940 |
Volontairement, je me suis limité à ce qui touche notre frontière pyrénéenne. C'est suffisamment démonstratif.
Il en ressort clairement que l'Allemagne collabore sans doute à la guerre espagnole, mais qu'elle prépare surtout l'encerclement de la France.
LEGION CONDOR 1939 |
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