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samedi 22 janvier 2022

LA LANGUE BASQUE PAR ABEL HOVELACQUE EN 1876 (troisième et dernière partie)

 

LA LANGUE BASQUE PAR ABEL HOVELACQUE EN 1876.


Abel Hovelacque, né le 14 novembre 1843 à Paris, et mort le 22 février 1896 à Paris, est un linguiste, anthropologue et homme politique français.




langue basque origines
ABEL HOVELACQUE


Voici ce que rapporta Abel Hovelacque dans la Bibliothèque des Sciences Contemporaines, en 

1876 :



"La langue basque.



... Il est aisé de se rendre compte de la déclinaison basque ; elle consiste en simples postpositions suffixées au nom : l'escuara ne dit pas, par exemple, "à la femme" ; il dit : "femme la à" ; au lieu de prépositions, il emploie des postpositions, c'est-à-dire des suffixes plus ou moins agglutinés au nom ou à l'article. Les principaux suffixes dont il s'agit sont en "de", indiquant le génitif ; i "à", indiquant le datif ; ko "de, pour ", tik "de", indiquant l'ablatif ; n "dans", z "par", kin ou gaz "avec", ra "vers", ik, ayant le sens partitif de l'anglais "some" (c'est-à-dire le sens de notre "de" français dans les phrases comme celle-ci "donnez-moi de l'eau"), no "jusque", gabe "sans", gatik "à cause de", tzat "pour", etc. On donne le nom de déclinaison définie à celle qui comporte l'article. Les grammairiens distinguent encore dans leurs tableaux la déclinaison des êtres raisonnables d'avec celle des êtres dépourvus de raison : la première serait caractérisée par l'intercalation, entre l'article et le suffixe, d'une syllabe particulière, baith — syllabe inexpliquée, mais que les étymologistes ont naturellement assimilée sans hésitation à l'hébreu beth "maison", vu que cette intercalation n'a lieu qu'auprès des suffixes locaux, "dans, chez, vers", etc. — La déclinaison indéfinie est unique, c'est- à-dire qu'elle n'a en quelque sorte ni pluriel ni singulier ; le basque, en effet, ne peut joindre à ses noms le signe du pluriel, quand ils ne sont pas déterminés : il ne saurait dire "femmes", force lui est de dire "les femmes". Il en résulte que le signe du pluriel — qui est k — se suffixe seulement à l'article a (ancien pronom démonstratif conservé en biscayen). La déclinaison définie a donc, grâce à cet article, un singulier et un pluriel.



Il est bon de noter que de grandes irrégularités signalent l'adjonction des suffixes au nom ; quelquefois, par exemple, l'article et le signe du pluriel disparaissent. Mais ce sont là des détails particuliers que nous devons négliger dans une esquisse aussi sommaire que celle-ci.



L'on conçoit, aisément, d'après, ce qui précède, à quel point il serait inexact de se servir pour le basque des mots de cas, de nominatif, de génitif, et ainsi de suite. On emploie parfois ces expressions, mais il ne faudrait point s'y laisser tromper ; ce ne peut être qu'une façon de parler. En basque, il n'y a pas et ne saurait y avoir de suffixe nominatif, accusatif ou autre — par exemple les s, m du latin "dominu-s, dominu-m" : — l'on se sert du thème pur et simple, du thème tel quel ; seulement ce thème, lorsqu'il est sujet d'un verbe actif, se voit postposer un suffixe k dont l'origine est inexpliquée : gizonak eman du "l'homme l'a donné", gizonak yo dute "les hommes l'ont frappé" ; gizon veut dire "homme", a est l'article, k le signe du sujet dont nous venons de parler.



Une particularité de la langue basque qui parfois ne laisse pas que d'étonner, c'est le grand nombre de mots, souvent réduits à une syllabe, qui viennent s'annexer à d'autres mots pour marquer l'augmentation, la diminution, l'abondance, la mauvaise qualité, l'excès, le défaut, l'attachement, la répugnance, et ainsi de suite. Mais beaucoup de nos langues modernes n'ont-elles pas — à un moindre degré, il est vrai, — la faculté de former des diminutifs et des augmentatifs ?



L'adjectif, toujours invariable, se place constamment après le nom ; le basque, pour rendre la phrase que voici : "la belle maison du petit homme", devra dire : "homme petit le de maison belle la". Remarquons que l'adjectif s'intercale ici — comme chez nous, du reste, — entre l'article et le nom auquel il se rapporte, mais que le génitif ("de l'homme") précède le nom ("la maison") dont il dépend.



Les pronoms personnels sont ni "moi", gu "nous", lu "toi", zu "vous". Le basque contemporain emploie comme nous la seconde personne du pluriel pour exprimer poliment le singulier ; aussi s'est-il fabriqué un "vous" pluriel : zuek. Point de pronoms relatifs ; pour imiter les Français ou les Espagnols, les Basques modernes ont employé souvent avec le sens relatif les pronoms interrogatifs ; mais cela est absolument contraire au génie même de leur langue. — En ce qui concerne les noms de nombre, nous pouvons remarquer que le basque ne possède pas de mot original pour exprimer "mille" et que tout, chez lui, indique une numération vigésimale : "trente-neuf" est pour lui vingt et dix-neuf, "soixante" est trois-vingts.



Le verbe basque est simple ou périphrastique. La conjugaison simple est caractérisée par ce fait que des éléments dérivatifs marquant le temps, le mode, la personne sont unis au radical ; la conjugaison périphrastique a lieu au moyen de deux verbes simples auxiliaires "être" et "avoir" — dut et naiz —joints à un nom d'action décliné. La question du verbe basque est d'une grande importance ; c'est elle qui déroute le plus les esprits accoutumés à nos grammaires classiques grecques et latines, et l'on ne peut dire encore — même après les travaux de MM. van Eys, L.-L. Bonaparte, Vinson — qu'elle soit enfin résolue. L'un des premiers points qui aient été discutés est relatif à l'antériorité de l'une des deux conjugaisons sur l'autre ; pour MM. Mahn, van Eys, Vinson, la conjugaison simple est seule primitive et l'autre n'est qu'une composition dont l'origine ne remonte qu'à la période historique de la langue basque. Sans entrer dans les raisons spéciales qui militent, invinciblement, selon nous, en faveur de cette opinion, nous ferons simplement remarquer que l'opinion opposée, qui conteste l'existence d'un radical à sens verbal dans les formes des auxiliaires, a un caractère métaphysique qui la rend inacceptable de prime abord.



La conjugaison basque périphrastique a cet avantage de permettre pour chaque verbe une double expression répondant au sens transitif et au sens intransitif : la voix intransitive, c'est un nom d'action accompagné de naiz "être" ; la voix transitive, c'est un nom d'action accompagné de dut "avoir". De même que le verbe sémitique qui incorpore le régime direct (ou, pour parler plus exactement, l'exprime par un signe pronominal suffixé au verbe), de même qu'agissent en semblable occasion le magyar, le vogoul, le mordvin (sans toutefois placer le signe en question au même lieu que le placent les langues sémitiques), de même agit le basque, — mais avec cette infériorité sur les langues que nous venons de citer, qu'il ne saurait séparer du verbe actif son régime direct : il ne pourrait dire, par exemple : "j'aime une femme" ; il ne peut dire que ceci : "je l'aime une femme". Mais, dans son verbe, le basque exprime le régime indirect et dit en un seul mot : "je le donne à lui" ; ici encore il ne peut omettre le régime direct, il ne peut dire : "je donne à lui".



Chacune de ces formes complexes est susceptible de quatre modifications, suivant qu'on parle familièrement à un homme ou à une femme, qu'on s'adresse aune personne que l'on veut honorer ou qu'enfin l'on ne veuille pas tenir compte de ces circonstances. Les grammairiens désignent ces modifications sous le nom de traitement masculin, féminin, respectueux, indéfini.



Certains caractères de la langue basque se retrouvent, ainsi qu'on l'a souvent répété, dans les langues américaines : le verbe basque a sans doute quelques analogies avec la conjugaison des langues de l'Amérique, mais de là à conclure, comme le font sans hésiter quelques auteurs, à une parenté intime entre le chippeway et le lénâpé, par exemple, et l'escuara, il y a loin, fort loin. Avant d'affirmer que le basque est, comme ces idiomes, polysynthétique ou incorporant, il conviendrait de déterminer ce que c'est au juste que le polysynthétisme ou l'incorporation. Dans le paragraphe relatif aux langues américaines, nous essayerons de définir ces deux expressions ; nous nous contenterons, pour l'instant, de signaler ici une particularité des idiomes du nouveau monde que l'on retrouve en basque, à savoir la composition par syncope, qui, d'ailleurs, n'est point tout à fait inconnue aux langues européennes modernes : de ortz "nuage" et azantz "bruit", le basque fait ortzanz "tonnerre, bruit du nuage". Mais les composés de cette espèce ne sont pas très nombreux. Pour l'ordinaire, on les rencontre dans les noms de lieux, ces restes précieux d'une époque antérieure et si souvent réfractaires à l'analyse.



Il se peut que les noms de lieux nous apprennent un jour bien des mots tombés en désuétude et finalement oubliés. En effet, dans son état actuel, et bien qu'il soit imparfaitement connu, on peut dire que le vocabulaire escuara est assez pauvre. Exclusion faite des nombreux mots gascons, français, espagnols et latins qu'il renferme, et encore d'autres mots qu'il est possible de rattacher à quelque autre source, il est probable que les termes réellement basques n'expriment, en général, aucune idée abstraite. C'est ainsi que l'on ne connaît pas de mot basque simple ayant le sens large que nous attachons en français au mot "arbre", au mot "animal" ; c'est ainsi encore qu'il existe en basque six expressions différentes pour exprimer l'état de chaleur de la chienne, de la jument, de la vache, de la truie, de la brebis et de la chèvre, mais il n'existe point, paraît-il, de terme général applicable à cet état d'une façon commune. Pour les Basques, "dieu" est "le seigneur d'en haut", et s'ils ont un terme pour exprimer notre mot de "volonté", ce terme signifie également "pensée, désir, fantaisie".



Pour reconstituer, autant que faire se pourra, le vocabulaire commun euscarien, il s'agira de rechercher tous les mots usités dans les divers dialectes et il conviendra, naturellement, de ne les admettre comme originaux, qu'après certitude acquise qu'ils n'appartiennent point en propre à quelque idiome étranger. L'histoire nous apprend que la région où se parle l'escuara a été traversée par des peuples de langue celtique, par des Germains, par des Arabes, surtout par des peuples de langues romanes. L'influence du latin a dû être d'autant plus puissante qu'elle a été continue vingt siècles durant et qu'elle s'est exercée plus activement ; pour bien connaître le basque, il importe donc de savoir à fond le latin et l'histoire de ses deux dérivés le français et l'espagnol, de posséder aussi bien leurs patois pyrénéens que leur langue littéraire.



L'on n'est malheureusement pas aidé dans l'étude du basque par les documents écrits, car sa littérature est d'une pauvreté singulière. Elle se compose presque uniquement de versions d'ouvrages de piété d'un intérêt négatif. Il y a peu d'attraits à dépenser son temps sur des "méditations", des "cantiques", des "guides spirituels" et autres compositions soi-disant morales et moralisantes de semblable intérêt. A la vérité, l'on a publié quelques recueils de chansons populaires, mais presque toutes sont des plus médiocres ; on n'a encore imprimé aucun conte ni aucune de ces interminables "pastorales" dramatiques qui font les délices des Basques de la Soule aux jours de fêtes locales. Elles sont curieuses, au moins à ce point de vue, qu'elles ont été manifestement inspirées par les chansons de geste, les soties et les épopées héroïques du moyen âge. Il n'existe guère qu'un millier de livres basques, et encore, pour atteindre ce nombre, faudrait-il faire entrer en ligne de compte tous les ouvrages écrits en français, en espagnol, en latin, en italien, en allemand, en magyar même, relatifs à la langue, au pays, aux moeurs, à l'origine des Euscariens.



LANGUE ORIGINES BASQUE
LE BASQUE ET SON MYSTERE DE JULES MIHURA


Ce dernier sujet, l, a inspiré de nombreux écrits. Le problème, à notre sens, n'est pas encore élucidé ; nous persistons à penser, notamment, que si l'idiome escuara a été la langue des anciens Ibères, ou du moins l'un des dialectes de leur langue, le fait n'est pas encore scientifiquement démontré. D'après de très anciennes traditions, les Ibères formaient le peuple, qui, avant l'arrivée des nations de langue indo-européenne, habitait l'ensemble de la péninsule ibérique, soit l'Espagne et le Portugal ; ils occupèrent également, paraît-il, toute la partie de la Gaule qui plus tard reçut le nom de Narbonnaise. Leurs premiers rapports connus avec des individus de race étrangère remontent au temps des expéditions phéniciennes dont l'histoire nous a transmis le souvenir. Advint l'invasion celtique ; les Celtibères résistèrent vaillamment aux légions romaines et supportèrent le choc des musulmans après avoir subi la domination des Visigoths. Conservé dans la région où vivaient les Ibères, l'escuara n'étant ni sémitique, ni indo-européen, on fut amené à le tenir pour le représentant direct, au moins pour l'un des anciens représentants, de la vieille langue ibérienne. L'on s'appuie d'habitude, pour soutenir cette opinion, sur trois sortes de preuves : preuve tirée des mœurs, preuve tirée du type, preuve tirée de la langue.



L'argument tiré des mœurs se résume dans une disposition légale des coutumes françaises de la région pyrénéenne — même en dehors du pays basque — qui établissait dans les successions un droit absolu de primogéniture, sans distinction de sexe ; or Strabon dit que chez les Cantabres, qui paraissent être une tribu ibérienne, les filles héritaient. Un jurisconsulte bayonnais, M. J. Balasque, a démontré que le droit de primogéniture provenait du principe essentiellement gallique ou celtique de la conservation intégrale du patrimoine.



Le type est aujourd'hui connu : nous possédons les caractères, du véritable crâne basque, celui d'Espagne, mais ce type aurait beau s'être étendu sur l'Espagne entière nous le rencontrons sans doute aussi en Corse et dans le nord de l'Afrique — cela ne prouverait en aucune façon que cette seule et même race n'ait point parlé plusieurs langues différentes, comme cela est de nos jours un cas très fréquent.



Les preuves linguistiques se résument en essais d 'explications de mots ibères par le basque. Les monuments de la langue ibérienne parvenus jusqu'à nous sont de deux sortes ; d'une part des médailles et des inscriptions, d'autre part des noms propres et surtout des noms topographiques transcrits par des auteurs grecs et latins. Les médailles et les inscriptions offrent les éléments d'un alphabet dérivé du phénicien, mais il ne faudrait pas s'illusionner sur leur prétendu déchiffrement : il n'est rien moins que certain ; nous ne voyons, avec M. Vinson, dans les différentes lectures proposées jusqu'à ce jour, que des traductions aventureuses et forcées. La forme des noms recueillis par Strabon, Pline et autres anciens auteurs présente, au contraire, une base appréciable, mais il est tout naturel que les étymologistes en aient abusé, et largement, selon leur coutume. Les explications proposées par Humboldt, et, après lui, par nombre d'étymologistes sans principes, sans méthode, sont pour le moins très douteuses ; nous pouvons dire que les deux seuls linguistes auxquels il se trouve permis d'accorder aujourd'hui une pleine confiance sur le terrain de l'escuara, MM. van Eys et Vinson, sont tout à fait d'accord à ce sujet. Leur opinion est la nôtre ; nous pensons que le nom de Humboldt ne peut suffire, à lui tout seul, à entraîner une conviction. Il est possible que les présomptions de Humboldt aient été justes ; il est possible, peut-être même est-il vraisemblable et probable, que les anciens habitants de l'Ibérie aient parlé une langue alliée au basque, sinon même une forme plus ancienne du basque ; mais que cela soit prouvé, nous ne l'admettons point ; il s'agirait de pactiser ici sur une question de méthode, ce à quoi nous ne saurions nous prêter.



En résumé, cette prétendue identité est possible, mais les faits accumulés pour la faire admettre ne lui ont point donné d'autre caractère que celui d'une hypothèse simplement plausible et qui attend encore sa justification. Elle est vraisemblable, mais non démontrée. Dans tous les cas, d'ailleurs, la langue basque resterait isolée, en dépit des étymologistes que rien n'arrête jamais et qui la rattachent intrépidement au phénicien, au copte, à l'algonquin, au suomi ou à quelque autre idiome encore, — pour la plus grande gloire de l'unité originelle du langage."




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jeudi 23 décembre 2021

LA LANGUE BASQUE PAR ABEL HOVELACQUE EN 1876 (deuxième partie)

 

LA LANGUE BASQUE PAR ABEL HOVELACQUE EN 1876.


Abel Hovelacque, né le 14 novembre 1843 à Paris, et mort le 22 février 1896 à Paris, est un linguiste, anthropologue et homme politique français.




ABEL HOVELACQUE


Voici ce que rapporta Abel Hovelacque dans la Bibliothèque des Sciences Contemporaines, en 

1876 :



"La langue basque.



"...Le basque, pour l'étranger, est dans un complet état d'isolement. Aucun des idiomes qui l'environnent ne peut, s'il s'agit de la formation des mots, de la morphologie, lui être comparé, et la langue qui lui ressemble le plus par quelques traits généraux, à savoir le magyar, s'en trouve géographiquement fort éloignée. L'histoire du magyar est d'ailleurs connue en partie, tandis que l'on ne sait rien de celle du basque. Impossible de rencontrer dans un monument authentique plus ancien que le dixième siècle des traces indéniables de la langue basque ; encore ne peut-on faire remonter à cette époque qu'une charte latine datée de 980, qui délimite le diocèse épiscopal de Bayonne et donne les noms plus ou moins altérés de quelques localités du pays basque. Il est avéré que les prétendus chants de guerre euscariens attribués à un âge plus ancien — à plusieurs centaines d'années, disait-on, avant le dixième siècle — ne sont rien moins qu'apocryphes. Du dixième au seizième siècle, rien encore que des noms de lieux épars dans diverses chartes, coutumes, lettres patentes, bulles pontificales. C'est Lucius Marinaeus Siculus qui parla le premier de l'escuara dans ses "Cosas memorables de España" (Alcala, 1530), et qui, le premier, en cita quelques mots.




Quant au plus ancien texte basque imprimé — le plus ancien du moins à notre connaissance — c'est le petit discours de Panurge dans le célèbre chapitre neuvième du deuxième livre de Rabelais. C'est en 1542 que ce morceau fut publié. Le premier livre imprimé est daté de 1545 ; ce sont les poésies moitié religieuses, moitié érotiques de Bernard Dechepare, curé de Saint-Michel-le-Vieux, en Basse-Navarre, fidèlement réimprimées ces temps derniers. Mais l'ouvrage le plus important pour l'étude du basque, c'est la version du Nouveau Testament par Jean de Liçarrague (de Briscous), ministre protestant à la Bastide-Clairence, imprimée à la Rochelle, en 1571, aux frais du Parlement de Navarre, par ordre de Jeanne d'Albret. Ce livre, pour des motifs faciles à deviner, est devenu  tellement rare que l'on n'en connaît en Europe que treize exemplaires. M. Vinson vient d'en faire réimprimer un extrait considérable, comprenant la dédicace et l'évangile de Marc tout entier (Bayonne, 1874). On peut dire sans doute que les changements subis par la langue depuis cette époque sont assez sensibles ; mais, certainement, ils ne sont point considérables.





On constate même aujourd'hui des différences plus importantes entre les divers dialectes ; les variétés de la langue basque sont, pour ainsi dire, innombrables, et chaque village a quelque particularité qui lui est propre. Ce fait n'a sans doute rien d'anormal ; mais, à côté du langage spontanément parlé du langage local, les langues ont d'habitude un dialecte général, en quelque sorte conventionnel, fruit de l'éducation, et qui souvent est très voisin de la langue écrite. En basque, rien de tel, et chaque écrivain se fabrique un langage à sa fantaisie. Certains auteurs ont compté jusqu'à huit dialectes, qui ne formeraient pas moins de vingt-cinq variétés principales ; c'est, en Espagne, le biscayen, le guipuzcoan, le haut-navarrais méridional et le haut-navarrais septentrional ; — en France, le labourdin, parlé dans l'ancien Labourd (partie sud-occidentale de l'arrondissement de Bayonne) ; le souletin, dans les deux cantons sud-est de l'arrondissement de Mauléon (ancienne Navarre) ; le bas-navarrais occidental et le bas-navarrais oriental, en usage dans la Navarre française, c'est-à-dire dans le reste de ces deux arrondissements.





Au surplus, ces huit dialectes se réduisent sans peine à trois grands groupes. Le premier de ceux-ci, formé du seul Biscayen, est particulièrement remarquable par l'originalité de son verbe ; le second se compose du Souletin et du Bas-Navarrais : aspirations fréquentes et variation des u en i ; le troisième, aux formes généralement plus pleines et moins altérées que les formes du second groupe, comprend les quatre autres dialectes : Guipuzcoan, Labourdin, Haut-Navarrais de l'est et de l'ouest. Nous n'entreprendrons pas d'indiquer ici les différences plus ou moins notables qui distinguent ces dialectes les uns des autres ; disons simplement que les quatre dialectes de France possèdent l'aspiration, dont sont totalement dépourvus les dialectes d'Espagne. Ajoutons, d'ailleurs, qu'en ce qui concerne l'intérêt spécial que peuvent offrir ces différents dialectes, le souletin, le labourdin, le guipuzcoan et le biscayen sont à peu près les seuls étudiés, parce que ce sont les seuls qui aient eu une certaine littérature. Les dialectes du centre, guipuzcoan et labourdin, paraissent être les moins altérés, tandis que les deux autres ont subi chacun de plus profondes modifications ; en tous cas, M. Vinson donne le pas au labourdin même sur le guipuzcoan.



culture littérature basque
JULIEN VINSON




On comprend aisément que c'est par l'étude simultanée et comparative des huit dialectes qu'il est possible de déterminer le caractère général de la langue basque, en reconstituant, autant que faire se peut, ses formes communes. La phonétique peut seule conduire à ce résultat ; jetons sur elle un rapide coup d'oeil.





Le basque compte cinq voyelles simples : a, e, i , o, u ; six diphtongues : ai, ei, oi, ui, au, eu ; les deux demi-voyelles y et w ; et  vingt-deux consonnes que l'on peut classer ainsi : k, g, kh— tch, ts— t, d, th— p, b, ph— n du grec "aggelos", n mouillé de "régner", "agneau", n dental, m— les sifflantes h, ch, z, s, — r dur (presque deux "rr"), r doux (très voisin de "l"), enfin l. Mais s'il fallait comprendre dans cette liste les sons particuliers aux différents dialectes, elle serait plus que doublée ; il faudrait y faire rentrer notre "u" français, propre au souletin, notre "j", la jota espagnole, et des "g", "t", "d" et "l" mouillés.





Les lois phonétiques du basque sont assez nombreuses, et il n'est pas sans intérêt de signaler ici quelques-unes des plus importantes d'entre elles. Deux voyelles se trouvent-elles en présence, la première est élidée si elle est placée à la fin d'un mot ; que la rencontre, au contraire, ait lieu dans le corps même d'un mot, à l'intérieur d'un mot, le hiatus est de règle, mais l'une des voyelles doit changer : e devient i, o devient u ; toutefois a persiste. Les variations que subissent les consonnes, lorsqu'elles se rencontrent, sont bien plus remarquables : une consonne dure, placée à la fin d'un mot, rencontre-t-elle au commencement du mot suivant une consonne douce, la dure disparaît et la douce devient dure ; c'est ainsi, par exemple, que hunat goiti, "ici en haut", se prononce hunakoiti. Autres lois : les explosives dures — par exemple k, t — tombent devant les nasales ; après une sifflante, les explosives doivent être dures ; après une nasale, elles doivent être douces. Une consonne ne peut être doublée, c'est-à-dire que deux g, par exemple, deux t et ainsi de suite, ne peuvent se suivre immédiatement ; — les explosives dures initiales deviennent douces spontanément ; — entre deux voyelles simples g, d, b, n et r doux sont absolument supprimés ; aux mots étrangers l'on préfixe une voyelle : c'est ainsi que "raison" devient arrazoin. Nous devons nous garder d'insister outre mesure sur des détails aussi particuliers, mais nous ne pouvons les passer tout à fait sous silence, et, si peu de place que nous leur donnions, cela suffit cependant à jeter quelque jour sur l'idiome qui nous occupe.





L'orthographe la plus généralement admise aujourd'hui dans le pays basque est assez nouvelle et n'est d'ailleurs qu'une réforme des vieux usages du pays. Le basque n'ayant point conservé — s'il en a jamais eu, ce qui n'est prouvé en aucune façon — de caractères graphiques particuliers, il avait fallu, pour l'écrire, adopter l'alphabet latin tel que l'employaient les Gallo-Romains ou Hispano-Romains de la région des Pyrénées. Deux orthographes, sensiblement différentes, se trouvèrent en présence, l'une française, l'autre espagnole. Chacune avait ce défaut capital de représenter souvent le même son, un seul et même son, par des lettres différentes ; on écrivait, par exemple, z, c, ç pour s, et c, qu, k pour k. L'orthographe réformée s'inspira du système espagnol plutôt que du système français ; toutefois z s'y prononce s.





Arrivons à la formation des mots et disons quelque chose, tout d'abord, de la déclinaison et de la conjugaison."



A suivre...





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mercredi 24 novembre 2021

LA LANGUE BASQUE PAR ABEL HOVELACQUE EN 1876 (première partie)

LA LANGUE BASQUE PAR ABEL HOVELACQUE EN 1876.


Abel Hovelacque, né le 14 novembre 1843 à Paris, et mort le 22 février 1896 à Paris, est un linguiste, anthropologue et homme politique français.




pays basque linguiste anthropologue
ABEL HOVELACQUE


Voici ce que rapporta Abel Hovelacque dans la Bibliothèque des Sciences Contemporaines, en 

1876 :



"La langue basque.



Cette langue si remarquable, si intéressante, n'est guère parlée aujourd'hui que par 450 000 individus, sans grande originalité sociale, sans existence politique distincte ; les trois quarts d'entre eux, environ, appartiennent à la nationalité espagnole, et un quart (120,000 approximativement) à la nationalité française. Il est entendu que nous ne parlons ici que des individus parlant la langue basque et que la question spéciale de la race reste en dehors de cette statistique ; nous savons, en effet — grâce aux excellents travaux de M. Broca — qu'il y a Basques et Basques ; que les Basques espagnols, par exemple, sont de sang bien moins mélangé que les Basques français.



On a longtemps cherché à tracer les limites de la langue basque ; c'est seulement en ces derniers temps que l'on est arrivé à des résultats qui, pour ne pas être sans doute tout à fait irréprochables, méritent cependant une véritable confiance. La carte dressée récemment par M. Broca, et publiée par lui dans la Revue d'Anthropologie, nous semble particulièrement recommandable. Essayons de donner une idée plus ou moins nette de son tracé. Partant d'un point de la côte situé un peu au sud de Biarritz, la ligne frontière passe au sud-est de Bayonne, longe d'assez près l'Adour, et, par un brusque mouvement du nord au sud, contourne le territoire de la Bastide-Clairence ; elle remonte, non moins brusquement vers l'Adour, et passant au-dessous de Bidache, de Sauveterre, de Navarreins, s'approche, quelque peu d'Oloron, mais sans atteindre cette ville. Un retour presque horizontal vers l'ouest l'amène à Tardets même ; de là elle gagne le pic d'Anie et pénètre sur le territoire espagnol. Elle se dirige sur Navascues, contourne, au nord, les environs de Pampelune, redescend vers Puente la Reina, passe également un peu au-dessus d'Estella, de Vitoria, atteint vers le nord-ouest Orduna et remonte vers Portugalete pour aboutir à la mer. La plus grande largeur du pays basque (depuis Orduna jusqu'à 5 kilomètres environ à l'ouest d'Oloron) serait donc, approximativement, de 190 kilomètres ; sa hauteur varierait de 50 à 80 kilomètres. 




anthropologue langue basque
ANTHROPOLOGUE PAUL BROCA



Des renseignements puisés à une autre source, non moins sûre, concordent de tous points avec ceux qui précèdent : la ligne frontière, nous dit-on, partie du golfe de Gascogne, un peu au-dessous de Biarritz, rejoint l'Adour au bas de Saint-Pierre-d'Irube (à 2 kilomètres au sud-est de Bayonne), suit ce fleuve jusqu'au delà d'Urcuit, le quitte alors pour englober Briscous et Bardos (à l'exclusion de la Bastide-Clairence), puis Saint-Palais et Esquiule (près d'Oloron) pour aboutir au pic d'Anie. En Espagne, la limite du pays basque s'étend jusqu'en dehors de la vallée de Roncal (vers l'Aragon) ; après Burgui, elle s'infléchit à gauche vers Pampelune, qu'elle contourne extérieurement, pour redescendre jusqu'au delà de Puente la Reina, et revenir ensuite, presque en ligne droite, à Vitoria, d'où elle remonte vers la mer, qu'elle atteint un peu à l'ouest de Portugalete. Le pays basque se compose donc de la province espagnole de la Biscaye presque tout entière, du Guipuzcoa, de la partie septentrionale de l'Alava et de près de la moitié de la Navarre ; il comprend en outre, en France, une commune de l'arrondissement d'Oloron, celui de Mauléon, et celui de Bayonne presque intégralement ; ce qui correspond aux anciennes divisions locales de la Soule, de la Basse-Navarre et du Labourd.





pays basque autrefois langue carte
CARTE LINGUISTIQUE LANGUE BASQUE 1863



Il n'y a pas de preuve historique, de preuve vraiment historique, que le basque ait occupé dans les temps anciens une aire géographique plus étendue. Nous reviendrons plus loin sur la question dite ibérienne. En France, sans aucun doute, l'on ne peut démontrer avec certitude que le basque ait été en usage dans aucun des villages où le gascon se trouve aujourd'hui employé de façon exclusive. Par contre, il est incontestable qu'en Espagne il a perdu du terrain depuis plusieurs siècles : Pampelune, tout espagnole aujourd'hui, était basque jadis. Et de nos jours il est facile de constater une altération très sensible de la langue basque dans les localités un peu importantes où se fait plus vivement sentir l'activité de la vie moderne et où le contact est plus fréquent avec les étrangers ; le langage de Saint-Sébastien, par exemple, et celui de Saint-Jean-de-Luz sont particulièrement incorrects, et l'on y rencontre un grand nombre de mots espagnols ou français.



Autre fait d'une grande importance : la carte de M. Broca ne comprend pas seulement les trois zones : gasconne (Bayonne, Orthez, Oloron), basque (Tolosa, Saint-Jean-de-Luz, Mauléon), espagnole (Vitoria, Estella, Pampelune) ; elle en compte quatre très distinctes, qui sont, du nord au sud : zone gasconne, zone basque, zone mixte basque et espagnole, zone espagnole. La zone mixte basque et espagnole, large parfois de 15 à 20 kilomètres, parfois excessivement minime, contient, entre autres localités assez connues, Bilbao, Orduna, Agiz, Roncal. Dans son mémoire sur la répartition de la langue basque, M. Broca a expliqué ingénieusement l'absence d'une zone analogue entre le basque et le gascon. "En Espagne, dit-il, le basque se trouve aux prises, sur sa lisière, avec le castillan, dans des conditions d'infériorité qui rendent inévitable l'empiétement graduel de cette dernière langue. Mais en France la langue qui entoure le basque n'est pas, comme le castillan, une langue officielle, administrative, politique et littéraire ; ce n'est qu'un idiome populaire, un vieux patois qui n'a aucune force expansive, qui est, au contraire, en voie d'extinction. Il n 'y a aucune raison pour que ce patois supplante le basque, ni pour que le basque empiète sur lui. Les deux idiomes restent donc stationnaires, égaux dans leur faiblesse et menacés l'un et l'autre par le français, qui les remplacera tôt ou tard. La langue que les Basques ont intérêt à apprendre, c'est le français. 



Tous ceux qui ont quelque instruction le connaissent déjà ; tous les habitants des villes de quelque importance le parlent ou le comprennent. Chaque ville, chaque bourg deviendra ainsi un foyer de diffusion ; il arrivera un moment où le basque ne sera plus parlé que dans les hameaux les plus isolés et dans les vallées les moins accessibles, et là même il finira par tomber en désuétude. Il périra donc sous l'influence d'une cause qui, sans doute, n'agira pas sur tous les points avec la même rapidité, mais qui agira partout à la fois. On ne le verra pas reculer pas à pas, comme il fait en Espagne, où le castillan l'envahit de proche en proche, car il n'est pas plus menacé sur sa lisière que dans le reste de son territoire. Il n'est pas dit, toutefois, que le basque doive se maintenir jusqu'à la fin dans ses limites actuelles. Il est assez probable que le patois béarnais qui l'entoure disparaîtra avant lui, et qu'alors le français, venant presser directement sur la frontière basque, la refoulera peu à peu vers le sud, c'est-à-dire vers les Pyrénées, dont les hautes vallées seront probablement le dernier refuge de la plus ancienne langue de l'Europe."



Le nom propre, le nom original du basque est escuara, euscara, uscara —- suivant les dialectes — d'où, en français "euscarien", synonyme de "basque". Les Espagnols donnent à la langue basque le nom de vascuence, à ceux qui la parlent le nom de Vascongados. Nous ne saurions nous prononcer sur l'origine de ces différents mots. En ce qui concerne escuara, l'étymologie la plus probable — encore qu'elle ne soit pas avérée — est sans doute celle de M. Mahn ; ce mot signifierait "manière de parler", "langage." Les explications que l'on obtient des Basques eux-mêmes, à ce sujet, sont des plus fantaisistes, ce dont nous ne devons pas nous étonner ; lorsqu'ils comparent leur langue aux idiomes des peuples qui les entourent, les Basques se trouvent si complètement désorientés qu'ils tombent aussitôt dans la plus naïve admiration pour leur parler maternel. L'un d'eux, le jésuite Larramendi, dont le livre porte ce titre présomptueux : "El impossible vencido" — l'impossible vaincu — fait à peu près du basque la source commune de toutes les autres langues ; un autre, Astarloa, affirme que chacune des lettres de l'escuara possède une valeur mystérieuse ; un troisième, l'abbé Darrigol, démontre, à l'aide de Beauzée, l'éternelle perfection de ladite langue ; Chaho invente son ingénieuse théorie des "voyants" basques, dont la civilisation précoce a été étouffée par les Celto-Scythes barbares ; l'abbé d'Iharce de Bidassouet fait de l'escuara la langue dont se servit le Père éternel pour converser avec le premier des Juifs. 




pays basque autrefois culture langue
AUGUSTIN CHAHO



Est-il quelque insanité à laquelle n'ait donné prétexte ce précieux débris des idiomes de l'Europe antique ? A la vérité l'escuara offrait des difficultés d'étude insurmontables à ceux qui n'étaient habitués qu'à commenter les textes grecs et latins au moyen de procédés empiriques ; aussi les savants du moyen âge regardaient-ils volontiers la langue basque comme une énigme indéchiffrable, comme un problème insoluble. Un proverbe conservé dans le nord de l'Espagne prétend que le diable lui-même demeura chez les Basques sept longues années durant sans parvenir à entendre un seul mot de leur langue. Ainsi s'explique cette remarquable définition d'un dictionnaire espagnol : Vascuence.

Lo que esta tan confuso y oscuro que no se pue de entender. "Basque". Ce qui est si confus et obscur qu'on ne le peut entendre."



Par malheur, beaucoup d'érudits fort peu linguistes, beaucoup d'amateurs étrangers, ont voulu résoudre le problème, sans préparation spéciale, et leurs efforts infructueux n'ont fait qu'exalter l'infatuation qu'inspirait déjà aux Basques le spectacle de tant d'efforts stériles. L'on a pu dire, non sans une certaine apparence de vérité, que l'étude du basque menait droit à la folie ; mais les choses sont bien changées aujourd'hui qu'il existe une méthode linguistique. Le sphinx, mieux entrepris, a livré son secret, et bien qu'il reste encore nombre de points à éclaircir, il est présumable que le jour n'est pas éloigné où l'on pourra se féliciter de connaître à fond les lois nombreuses et complexes de la langue basque. Il y avait assurément de bonnes, d'excellentes choses dans les écrits d'Oihenart, de Chaho, et surtout de Lécluse ; mais les travaux tout récents signés L.-L. Bonaparte, W. van Eys et Julien Vinson, ont fait faire à la question des progrès décisifs."



A suivre...




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dimanche 21 mars 2021

UN "MIRACLE" À SAINT-PALAIS EN BASSE-NAVARRE AU PAYS BASQUE EN JUILLET 1876

LE "MIRACLE" À SAINT-PALAIS EN 1876.


Au cours de l'histoire, des "miracles", c'est-à-dire des faits extraordinaires, dépourvus d'explication scientifique, attribués à une puissance divine, ont eu lieu au Pays Basque.



pays basque autrefois miracle basse navarre
APPARITION VIERGE MARIE 1876
64 SAINT PALAIS




Voici ce que rapporta à ce sujet le journal La Petite République, le 16 juin 1876 :



"Le Miracle de Saint-Palais



Ce miracle ne date que du 10 avril et n'a encore que deux mois. Mais il est de belle venue, et soyez sûrs qu’il grandira, car, étant du pays basque, il est presque espagnol. A peine sorti du berceau, le voilà déjà grandelet et capable, s’il tient ses promesses, de devenir aussi vigoureux que ses frères de Lourdes et de la Salette. 



Suivons, pour notre instruction, toutes les phases de sa croissance. Qui connaît un miracle les connaît tous. 



Celui-ci n’est au début qu’une farce grossière. A Saint-Palais, petite ville des Basses-Pyrénées, le petit Jean Lansereux, s’en allant aux champs, voit dans un sentier une belle dame qui fait en s’approchant de lui le bruit d'un vent léger



L’enfant, de retour à la maison, raconte la chose à son père, et celui-ci, au lieu de le conduire chez un médecin, lui administre une correction sévère. 



Le 6 mai, nouvelle apparition. Le petit Jean, monté sur un âne, allait dans une maison voisine chercher un agneau, quand il rencontre la même dame qui lui fait signe d’approcher. Il s’agenouille, et elle lui dit : "Je suis l'Immaculée-Conception." Puis elle lui recommande de réciter une dizaine de chapelet, et elle lui dit encore : "Tu iras vers la rivière, tu boiras de l'eau de la rivière, et tu avaleras trois cailloux." Enfin, elle lui confie un secret pour lui tout seul, avec défense de le révéler à personne. 



L'enfant obéit, et devant une nombreuse assistance il boit l’eau de la rivière et avale les cailloux.



C’est ici que l’affaire commence à devenir sérieuse. Le miracle grossit, il prend du corps. Les apparitions recommencent, et la fièvre superstitieuse gagne la foule. 



Les rendez-vous de la dame et du petit Jean se multiplient. Rendez-vous le 20 mai, puis le 21, puis le 22, le 24, le 26, le 29, et chaque fois au milieu d’un concours de population de jour en jour plus émue, plus crédule, plus fanatisée. 



Une fois la dame a béni un cierge, et l'enfant, l’œil égaré, la main tremblante, en proie à des convulsions, le présente à baiser au peuple, et le peuple le baise pieusement. 



Le clergé de Saint-Palais, composé du doyen et de ses vicaires, juge opportun d’intervenir et consacre par sa présence ces grotesques représentations. 



Quand on demande au jeune miraculé pourquoi il est si agité pendant les apparitions, il répond qu’il est ébloui par les rayons de la dame et que cette lumière lui transperce les yeux



Quand on lui demande pourquoi il tremble, il dit : "Le corps tremble peut-être, mais pas le cœur." C’est probablement un mot qu’on lui a soufflé. 



Quand on lui demande pourquoi il pleure, il dit : "Je pleure de bonheur par force." 



Quand on lui demande ce que lui a dit la dame et dans quelle langue elle lui a parlé, il dit qu’elle lui a parlé tantôt en basque, tantôt en français. 



Quand on l’interroge sur le secret qu’elle lui a confié, il se tait. 



Un jour, la dame lui dit que l'eau du ruisseau était bonne et que ceux qui en boiraient, ayant la foi, seraient guéris. Plusieurs en burent et ne furent point guéris. Le petit Jean en fit ses remontrances à la dame, qui lui dit : "Ce ruisseau ne changera pas, mais il fera du bien." 



Et à ce propos nous pouvons prédire, sans être prophètes, que l’eau de ce ruisseau se vendra cher, un jour, en bouteilles. 



Entre deux apparitions, un habitant de Saint-Palais, quelque mécréant sans doute, quelque lecteur de la Petite République, avait conseillé au petit Jean de solliciter de la dame un grand miracle évident, public, capable de confondre les incrédules. Le petit Jean fit la commission, et la dame lui dit en langue basque qu'elle en ferait un au dernier dernier jour



Cette réponse jeta les fidèles dans une grande curiosité et dans une véhémente impatience. Que fallait-il entendre par ce dernier dernier jour ? La dame avait promis quinze apparitions, et la dernière tombait le dimanche de la Pentecôte. Or, ce dimanche passa, et de miracle point. Et voilà que nous apprenons, par une correspondance du journal l'Univers, que les apparitions recommencent avec promesses de nouveaux rendez-vous. La dame a confié encore un secret au pauvre petit visionnaire ; mais le peuple attend toujours le miracle. 



Que le peuple prenne patience, il n'attendra pas longtemps. Le miracle viendra bientôt, à moins que la gendarmerie ne s'en mêle, et nous sommes fort étonnés qu’elle ne s’en soit pas encore mêlée. Car il n’y a rien qui mette en fuite les apparitions comme un tricorne de gendarme."


pays basque autrefois gendarmerie basse-navarre
GENDARMERIE ST PALAIS
PAYS BASQUE D'ANTAN





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mercredi 6 février 2019

LE ROI D'ESPAGNE DON CARLOS À ARNÉGUY EN BASSE-NAVARRE AU PAYS BASQUE EN 1876


LE ROI D'ESPAGNE À ARNÉGUY EN 1876.


Pendant la troisième guerre carliste (1872-1876), nombreux furent les carlistes à se réfugier au Pays Basque Nord.

vendredi 9 novembre 2018

LE "MIRACLE" DE SAINT-PALAIS EN BASSE-NAVARRE AU PAYS BASQUE EN JUIN 1876


LE "MIRACLE" DE SAINT-PALAIS EN 1876.


Au cours de l'histoire, des "miracles", c'est-à-dire des faits extraordinaires, dépourvus d'explication scientifique, attribués à une puissance divine, ont eu lieu au Pays Basque.